Chapitre 1

 C'est l'horreur, je n'arrive pas à réaliser ce que j'ai fait. Il y a du sang partout, j'en suis couverte de la tête au pied. Le corps de Mathieu gît dans le divan pendant que celui de Charlène est à mes pieds. J'entends au loin la sirène. Je sais qu'ils viennent pour moi. Tout le quartier a dû nous entendre, elle a tellement crié quand elle m'a vue avec le couteau en main. Pourquoi est-ce que j'ai regardé par la fenêtre ? Pourquoi ?

— Madame, il va falloir y aller.

— Oui, oui, je sais. Je me lamente. Comment est-ce que j'ai pu faires ça ?

— Madame, vous êtes mise en état d'arrestation.

 Il sort son blabla habituel.

 J'ai encore du mal à bien tout saisir.

 Pourquoi mes pieds m'ont-ils porté jusqu'ici ? Pourquoi n'ai-je pas fait comme les autres jours ? Faire mon jogging et rentrer chez moi. Je croyais que nous étions heureux. Il disait qu'il voulait que nous formions une famille.

 Nous arrivons au commissariat, les menottes me font mal. Je repense encore à ses paroles du matin : << Je t'aime mon amour >>. C'était faux, bien évidemment sinon je ne l'aurais pas retrouvé dans ses bras.

 On m’enferme dans une toute petite cellule, le policier, prend mes effets personnels et me dit qu'on viendra me chercher plus tard, pour ma déposition.

 Les minutes passent et puis les heures. Je suis couchée et j'attends. J'espère me réveiller et me rendre compte que tout ceci n'était qu'un cauchemar, mais malheureusement, le sang sur moi et les images que j'ai dans la tête me rappelle constamment que ce n'est ni un cauchemar, ni un mauvais rêve, ni rien d'autre, simplement une très vilaine réalité.

 J'essaye de me soulager en me disant qu'il est fautif, mais même ça, je n'y arrive pas. j'ai tué l'amour de ma vie. Ce que je croyais être, l'amour de ma vie ! Et une soi-disant meilleure amie ! Elle aussi s'est bien foutue de moi. Quand je repense à toutes ses belles paroles, toutes ses dernières années. Tous ses réconforts quand je n'allais pas bien, ce n'était que du bluff pour passer du temps à la maison, près de Mathieu. Comment ai-je pu être assez bête et naïve pour ne me rendre compte de rien ! Tous ses soi-disant oublis au bureau, c'était juste un prétexte pour aller la rejoindre.

 N'arrivant plus à rester couchée, je me lève et fait les cent pas dans ma cellule. Je regarde le soleil finir de se lever et la ville commencer à s'éveiller. Je suis presque sûr, que tout le monde, ou presque, est déjà au courant de ce qui s'est passé cette nuit. Les ragots vont vite ici et chacun se l'approprie à sa sauce, le racontera à sa manière. Plus tard, quand les gens parleront de moi, ils ne diront plus : << tu sais la petite jeune, si gentille, celle qui n'arrivait pas à avoir d'enfants >>, mais plutôt : << celle qui a tué son compagnon et sa meilleure amie >>. Personne ne se souviendra qu'il m'a trompée avec elle.

 On vient, enfin, me chercher. Je présume qu'il leur fallait du temps pour se préparer pour mon audition, pourtant, je ne suis pas une criminelle comme les autres. C'est un dérapage, par sa faute, s’il ne m’avait pas trompé, je ne l'aurais pas retrouvé dans ses bras et je n'aurais pas péter un câble.

 Assise en face de leur caméra, je vois qu'ils ne sont pas très à l'aise. Ils m'ont remis les menottes comme si j'allais me jeter sur eux. Ils me dévisagent tous les deux, le premier a un regard sévère, il me regarde avec dédain tandis que l'autre à l'air d'avoir pitié de moi. Celui avec le regard sévère, se lève et fait le tour de la pièce avant de se poster devant moi, les bras sur les hanches. Il se donne un air supérieur, comme s'il allait m'impressionner.

 L'autre, le plus jeune, prend la parole :

— Vous savez pourquoi vous êtes ici ?

— Oui, vous croyez quoi, que je suis amnésique ?

— Non, je voulais juste être sympa.

 J'ai compris leur petit manège. Un joue le rôle du méchant et l'autre du gentil. Ils veulent des réponses, je peux tout leur expliquer. Je me souviens de tout ce qui s'est passé dans les moindres détails, toutes les sensations que j'ai ressenties.