La Chronique des Bavandid

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Les flammes sacrées de l’autel du feu irradiaient la salle du Trône du Palais des Rois. Une silhouette évasive se détachait pourtant au milieu de ce déluge brasillant. Siégant sur un trône d’or surmonté de trois lions perses, le Shahanshah (*1) Dariush contemplait pensivement cet ersatz d’Atar (*2) . Il avait 20 ans, ses cheveux aux boucles dorées formaient comme une couronne naturelle qui soulignait la majesté émanant de ce « Soutien du Bien ».

On lui récitait un poème :

« C'est le livre des rois des anciens temps,
Évoqués dans des poèmes bien éloquents
Des héros braves, des rois renommés
Tous un par un, je les ai nommés
Tous ont disparu au passage du temps
Je les fais revivre grâce au persan »

Le jeune roi agréa : «—Voilà donc de sublimes vers, Ô Érudit Ferdowsi (*3) , que l'on croirait tout juste écrit pour moi et ceux de ma lignée! Un grand Seigneur se doit de savoir manier aussi bien l’épée que la plume.

—C’est bien trop de compliments votre Éminence » répondit le poète.

"— Allons point de modestie ! Approche donc Élu des Muses, suprême Clairvoyant que je te conte l’histoire de ma dynastie afin que tu la retranscrives en un récit épique qui, je l'espère, traversera les âges. Car bien que je sois encore jeune, j'ai conscience de ma condition de simple mortel, contrairement aux vaniteux Achéménides qui se prétendaient l'égal des dieux.

J’ai en effet retenu la leçon de l’épopée de Gilgamesh. Ce dernier, de retour de sa quête échouée d'un élixir de vie, eut une révélation en contemplant les murs de sa prospère Uruk : Il est vain, même pour le plus grand des rois, de rechercher l’immortalité, la mort est inéductable. En revanche, sa cité et ses exploits perdureront après lui, et entretiendront son souvenir.

Les véritables juges d’un règne sont le royaume et les légendes qu’un roi laissent comme héritage !

  • De sages paroles mon roi

—Je te m’excuse d’avance, il ne me reste que des bribes laissées par mes ancêtres, mon récit te semblera sans doute décousu, je fais confiance à tes talents de conteur pour le rapiécer. Si mon récit est une nébuleuse cacophonie, module ta fine lyre pour composer une harmonieuse mélodie. " déclara le juvénile souverain, il fît une pause avant de reprendre son récit :

"—Voici l’Histoire de la glorieuse dynastie des Bavandid. Notre glorieuse maison descend directement des Grands Rois Sassanides (*4) , des Shahanshah Kavadh I , Khosrow I "le Juste" ou Khosrow II "le Victorieux ". Toutefois, mon discours commence seulement en 930 avec Shariyar le Pieux, Marzoban (*5) de Tabaristan. Evidemment l’histoire de notre maisonnée remonte à des temps immémoriaux mais mes aïeux ne m’ont guère conter au delà de cette date.

Son père Rostam lui avait léguer une mince bande de terres dans les régions montagneuses du Daylam, bordées au nord par la mer Caspienne.

Je conterais à présent à la première personne pour insuffler à ces diverses épopées une âme commune. En effet, mes ancêtres et moi même formons une même volonté, nous obéissons à une volonté supérieure qui nous englobe et nous transcende. " affirma le Grand Roi, avant de poursuivre:

"—Je cherchais à récolter et me montrer digne mon héritage, mon but était simple : Raffermir notre foi et reconquerir les lieux saints pour restaurer la grande Prêtrise , rétablir l’antique empire de Perse afin de devenir le Shaoshyant (*6) , et enfin accomplir le mariages divins . L'objectif ultime étant de restaurer l’ordre de cosmos et de réaliser l' union sacrée.

Je partais de loin, impuissant vassal d’un émir musulman modeste , comme disent les romains: « Ad astra per Aspera » (*7) ".

Notes :

(*1) Shahansah = Roi des Rois

(*2) Avdar = concept zoroastrien du feu sacré," feu visible et invisible"

(*3) Ferdowsi = poète persan du Xe siècle. Surnommé « le Recréateur de la langue persane », il écrivit la plus grande épopée en langue persane intitulée le Livre des Rois.

(*4) Sassanides = dynastie perse ayant régné sur l'Empire Perse de 224 jusqu'à la Conquête arabo-musulmane, en 651.

(*5) Marzoban = Marquis (grossièrement) , commandant militaire qui gardait les régions frontalières (les marches) dans l'Empire Perse

(*6) le Shaoshyant ="celui qui apporte des bienfaits", le Sauveur/le Messie censé apporter la rennaissance finale du monde durant laquelle le Mal est finalement détruit.

(*7) « Ad astra per Aspera » = « Vers les étoiles à travers les difficultés»

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