Chapitre 14

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Qahir rouvrit les yeux, surpris par l’étrange force qu’il sentait lui traverser le corps de part en part. Au-dessus de lui, il aperçut le visage inquiet d’Eylen, ses étranges yeux bleus fixés sur lui avec intensité. Les racines de ses cheveux, habituellement noirs, avaient pris une teinte blanche argentée, presque irréelle. L’expression de la jeune femme s’apaisa soudain en le voyant éveillé et elle poussa un soupir de soulagement.

L’empereur s’apprêtait à se redresser quand les traits d’Eylen se déformèrent en une expression de souffrance fulgurante, il réagit instinctivement, la rattrapant avant qu’elle ne s’écroule à terre.

Autour d’eux, les Garidans et les guerrières Suharis avaient formé un cercle, les observant presque religieusement. Blottie dans ses bras, Eylen gémissait de douleur, le visage en sueur, ses cheveux redevenus aussi noirs que l’ébène. D’une main, elle fouilla dans la besace pendue a son épaule, très  certainement pour y trouver des petites fleurs bleues qui lui servaient à se soigner.

— Qu’on m’apporte un voile, ordonna l’empereur d’une voix ferme.

L’un des guerriers se précipita vers la charrette qui étaient restée quelques mètres plus loin, tandis que Babil faisait signe aux autres de s’éloigner.

Qahir se redressa, tenant toujours Eylen contre lui. Tout son corps semblait déborder de vie et de force, la fatigue et la douleur ayant totalement disparu. La jeune femme perdit connaissance quand il la prit dans ses bras pour la soulever et la porter jusqu'à leurs montures. Le guerrier qui était parti chercher le voile plus tôt, revint en courant vers lui en tendant devant lui un long tissu sombre.

Qahir le prit sans jeter un regard à l’homme, inquiet de sentir les tremblements qui parcouraient le corps frêle de la jeune femme contre lui. Elle ne tiendra pas jusqu’à Minar, songea-t-il en serrant les dents. Il jeta le voile pardessus elle, lui couvrant entièrement la tête et l’installa sur l’avant de la selle de son cheval avant de grimper derrière elle.

Il leur faudrait encore deux bonnes heures de trajet jusqu’à la ville fortifiée. C’est trop long. Jetant un regard aux chariots et à la procession, il décida finalement de faire signe à Babil et Saki d’approcher.

— Je pars devant avec Eylen, Babil, tu escorte le reste du groupe. Saki, tu me suis avec Inaya et deux autres de tes guerrières. Dit à Inaya d’emmener la monture d’Eylen avec elle.

Il partit aussitôt au galop sans attendre leur réponse, serrant fermement contre lui le corps tremblant d'Eylen.

Si ce qu’elle lui avait dit plus tôt était vrai, elle devait à présent souffrir des blessures qu’il avait subi lors de son combat contre le démon et qu’elle avait absorbé en elle. Cela plus la fatigue qu’il avait accumulée durant la traversée de la frontière en étendant son aura.

Le seul moyen pour elle de se soigner était de tenir dans ses mains des fleurs de puretés. Qahir était cependant intimement persuadé qu’elle parvenait également à se soigner lorsqu’elle était en contact avec lui, se souvenant de la plaie qui s’était refermée sous ses doigts dans la forêt de Toren, lors de leur première rencontre. Il avait alors eu la sensation que la jeune femme aspirait en elle sa propre force pour guérir ses plaies.

Le même phénomène s’était produit dans le hall du manoir du maire, lorsqu’elle avait soigné Babil. Il se souvenait également de l’étrange lueur argentée qu’avaient pris les racines de ses cheveux, comme tout à l’heure. La jeune femme avait semblé surprise quand il lui en avait parlé, lui avouant que jamais auparavant son maître ne l’avait informée d’une telle transformation lorsqu’elle se soignait durant son sommeil.

Derrière lui, il entendait les guerrières qui l’avaient rattrapé, Inaya tirant derrières elle l’étalon noir d’Eylen. Le soleil au-dessus d’eux commençait sa descente, indiquant que la journée allait bientôt toucher à sa fin. Encore quelques heures et la nuit serait là. Qahir talonna sa monture et se pencha un peu plus en avant pour accélérer sa course.

À mi-parcours, il arrêta son cheval et jeta un œil à Eylen, profondément endormie, qui semblait tout de même s’être apaisée, sa respiration étant redevenue lente et rythmée. Il fit signe à Inaya d’approcher le cheval noir et ils repartirent au galop une fois que Qahir et Eylen furent installés sur leur nouvelle monture, la jeune femme toujours inconsciente.

Le son des cors les annonça quand ils aperçurent enfin les rempars de la cité de Minar, les gardes ayant été alerté de leur arrivée par le nuage de sable qu’ils avaient créé dans leur course.

Arrivé aux portes, Qahir projetta directement son aura, ne voulant pas perdre de temps avant d’atteindre le palais de la ville. Reconnaissant l’aura écrasante de l’empereur, les gardes posèrent directement un genou à terre et baissèrent la tête à son passage, attendant que les guerrières les aient également dépassés pour se relever. Qahir connaissait parfaitement la ville de Minar pour s’y être rendu plusieurs fois lorsqu’il était encore Garandï et se dirigea donc directement vers le palais qui lui était réservé.

L’Hadjib* chargé de garder la demeure l’attendait devant l’entrée, prosterné au sol.

— Bon retour Empereur, dit-il sans relever la tête.

Qahir descendit de monture te passa devant lui sans un regard, portant toujours Eylen endormie dans ses bras. Il passa sous l’arche pour entrer dans le jardin intérieur, contourna la fontaine centrale et se dirigea vers la suite qu’il occupait habituellement, l’Hadjib le suivant silencieusement. Ce dernier se précipita devant lui pour lui ouvrir la porte de la chambre et Qahir déposa précautionneusement la jeune femme dans l’immense lit qui trônait au milieu de la chambre. Il ôta le voile qui couvrait sa tête et observa son visage apaisé. Elle ne semblait plus souffrir d’aucune douleur et il remarqua dans sa main les fleurs qui étaient devenue entièrement noires.

Il passa ses doigts sur sa joue, remettant l’une de ses mèches sombre derrière son oreille et elle tourna légèrement le visage, semblant accompagner instinctivement son geste. Un sourire fugace se dessina sur les lèvres du jeune homme avant qu’il ne se redresse et se tourne vers l’entrée de la chambre. L’Hadjib, Saki et Inaya l’attendaient dans le couloir, le reste des guerrières étant certainement resté auprès des chevaux.

— Inaya veille sur Eylen, Hadjib, dit-il en se tournant vers l’homme en robe de soie colorée. Prépare les chambres pour nos invités.

— Ce sera fait votre grandeur, répondit l’homme en souriant tout en claquant des doigts par-dessus son épaule.

Il portait différentes chaînes et autres bijoux dorés qui brillaient ostentatoirement autour de son cou et de ses poignets, sa robe bleue s’accordant parfaitement à son turban de la même couleur.

Derrière lui, plusieurs servantes vêtues de tenues aux couleurs pastel se précipitèrent dans les couloirs pour aller préparer les différentes chambres du palais.

— Souhaitez-vous vous reposer dans vos appartement votre grâce ? Ou peut-être préférez-vous boire un thé au salon ?

— Allons discuter au salon, répondit Qahir en se dirigeant vers ce dernier, j’ai été absent bien longtemps. Vous me raconterez ce que je ne sais pas.

— Ce sera un honneur empereur, répondit l’Hadjib en s’inclinant respectueusement.

Accompagné de ses servantes, il suivit Qahir, qui finissait de donner ses dernières indications à Saki, cette dernière repartant précipitamment vers l’entrée du palais.

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