Chapitre 24
Marwen se tenait sur le mur de protection de la cité aux côtés des jeunes Toréens et de Rainir. À l’extérieur, les cris des guerriers se mélangeaient aux cris stridents des monstres. Ces derniers se déplaçaient à une vitesse hallucinante, s’enfonçant dans le sable pour mieux en ressortir en faisant des bonds gigantesques, atteignant presque le haut des remparts de la cité. Le mage n’apercevait que leurs yeux luisants et leurs longues griffes qui brillaient sinistrement sous les rayons de la lune.
— Qu’est-ce que c’est ? Demanda-t-il à Rainir en haussant la voix pour se faire entendre.
— Aucune idée, lui répondit ce dernier le visage blême.
À cet instant l’une des créatures bondit à leur hauteur, plongeant sur eux griffes en avant. Marwen érigea instantanément une barrière contre laquelle il s’écrasa dans un bruit sourd et retomba au sol plusieurs mètres plus bas.
Le mage se pencha en avant pour mieux l’observer, le cœur battant, mais fut tiré en arrière par l’un des guerriers qui les avait fait monter sur le mur.
— Barrière ! Lui ordonna-t-il férocement en le poussant en arrière.
Marwen acquiesça et se tourna vers Rainir.
— Vos élèves savent-ils ériger une barrière magique ? Lui demanda-t-il en observant les jeunes mages terrifiés.
— Certains y arrivent, mais elles sont incomplètes.
— Bien dans ce cas, je me charge de créer les barrières et ils n’auront qu’à les maintenir en place. Ils pourront ?
— Oui, ils savent également se mettre en lien.
— Parfait qu’ils démarrent le lien, ils seront plus puissants.
Rainir se tourna pour donner ses directives aux jeunes Elariens, tandis que Marwen fermait les yeux pour se concentrer. Il plaça ses deux mains en avant et commença le processus de transformation de l’air en y insufflant une partie de sa propre Energie.
Quand il estima que la barrière était suffisamment solide, il rouvrit les yeux. Une jeune fille rousse s’avança alors, le regard concentré et plaça sa main près de la sienne.
Marwen perçut le mince filet d’Energie qui s’échappait d’elle pour maintenir le mur invisible. Il regarda autour de lui, observant les guerriers qui repoussaient avec efficacité les démons qui tentaient de sauter sur le mur. Il courut le long du rempart suivit par une partie des jeunes mage, l’autre suivant Rainir de l’autre côté, et s’arrêta quelques mètres plus loin pour ériger une seconde barrière qu’il lia à la première. Un second apprenti se chargea de la maintenir tandis qu’il continuait sa course pour sécuriser l’ensemble du mur.
Ils protégèrent ainsi tout le Sud de la ville face à la frontière et une partie des côtés Est et Ouest. Une des créatures avait réussi à atteindre le mur avant son arrivé et avait été tué par un guerrier, gravement blessé à l’épaule. Il sortit de sa poche un onguent qu’il appliqua sur la profonde entaille sanguinolante et murmura une incantation pour activer les fleurs de puretés présentes dans le remède.
Alors qu’il finissait d’ériger une dernière barrière, sentant son pouvoir commencer à faiblir, il observa le cadavre du monstre.
Son corps, long et fin, était recouvert d’une fourrure fauve, une crête de poils plus sombre courant tout le long de son dos, faisant penser à un croisement entre le lynx des forêts d’Elaria et les coyotes des plaines. Il avait de grands yeux ronds aux iris jaune ambré et des petites dent pointues. Mais le plus impressionnant était ses longues griffes fines, aiguisées commes des poignards et recouvertes de sang.
Plus bas, attiré par les bruits de la bataille faisaient toujours rage, il reconnut au loin l’imposante silhouette de l’empereur qui se mouvait parmi les monstres avec une agilité et une vitesse hors du commun. Chacun de ces gestes était précis et efficace, les bêtes mortes s’empilant sur son sillage.
Bientôt, le peu de monstre qui restait recula avant de repartir dans le désert en émettant de petits cris lugubres semblables à des ricanements aigus. Le conflit n’avait duré pour tout qu’une heure au plus, l’arrivée de l’empereur ayant déterminé la fin de la bataille.
Marwen laissa retomber ses bras et intima au jeune Toréen qui se tenait à sa gauche d’en faire de même. Un à un, les autres apprentis interrompirent le flux d’Energie qu’ils envoyaient dans la barrière pour la maintenir et celle-ci se désagrégea totalement.
Marwen s'assit sur le bord de son lit avec un soupir de fatigue, tandis que Rainir refermait la porte derrière lui avant de s’installer sur sa propre couche.
— Vous m’avez impressionné maître Marwen, lui dit-il finalement en le dévisageant.
Marwen leva un sourcil, ne comprenant pas tout à fait de quoi il voulait parler.
— La première fois que j’ai vu les monstres de la frontière attaquer Toren, j’ai littéralement fait sur moi, lui avoua le jeune mage avec un air gêné. Et ce n’étaient qu’une petite meute de hurleurs, pas ce genre bête. Vous avez su garder votre sang-froid.
Marwen balaya le compliment d’un geste de la main, remettant maladroitement ses lunettes en place.
— J’avoue que je n’en menais pas large non plus. Vous n’aviez jamais vu ce genre de monstre vous dites ? Le questionna-t-il avec intérêt.
— Non, répondit Rainir avec une expression inquiète. Les monstres qui attaquaient Toren étaient bien moins puissants que ces choses... S’ils nous avaient attaqué avant l’arrivée de l’empereur et ses guerriers, Toren aurait été décimé.
Marwen se tapota le menton en réfléchissant. Même dans les livres de la bibliothèque, il n’avait jamais vu de description de tels monstres. Les monstres qui sortaient de la frontière en Elaria n’étaient donc pas les mêmes que ceux qui attaquaient les habitants du désert ? Pour quelle raison ?
— Étiez-vous éveillé lors de la traversée de la frontière ?
— Oui.
— Combien de temps avons-nous mis pour la passer ?
— Une grosse demi-journée. Difficile d’être exacte, notre champ de vision était restreint par d’étranges amas de brouillard, et nous ne nous sommes pas arrêtés en chemin.
— Donc on peut supposer que la largeur de la frontière n’est pas si grande que ça. Pourquoi dans ce cas-là, est ce que ces monstres ne sont jamais apparus chez nous ?
— Aucune idée, mais je suis trop épuisé pour y réfléchir ce soir. Nous devrions dormir, une autre longue journée nous attend demain.
— Que voulez-vous dire ?
— Nous partons pour la cité impériale.
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