Chapitre 9 : Le projet Codex Obscura
Le laboratoire central, caché dans les montagnes au nord du pays, était pour Pauline un lieu à la fois fascinant et oppressant. En traversant les couloirs froids et blancs, elle ne pouvait ignorer le léger vertige qui la gagnait à chaque pas. « Qu’est-ce qu’ils me cachent ici ? pensait-elle, le cœur battant. Et pourquoi ai-je l’impression que tout pourrait basculer d’un instant à l’autre ? »
De son côté, Virgil Varek avait pris l’habitude de la surveiller discrètement depuis son poste de contrôle. Il la regardait maintenant avancer, notant chaque geste, chaque hésitation dans ses manipulations. « Elle commence à comprendre, songea-t-il, l’ombre d’un sourire se dessinant sur ses lèvres ». Pauline ignorait tout de cette surveillance constante et se figurait que Varek la laissait en paix par respect pour son travail. En réalité, il observait chaque progrès, chaque anomalie.
Assis à son bureau encombré, Virgil consultait le dossier secret que le Professeur Kennywood lui avait confié. Chaque semaine, il y ajoutait ses rapports détaillés : les trouvailles de Pauline, ses intuitions parfois troublantes... et ces résultats étranges qu’elle semblait vouloir interpréter différemment. Il leva les yeux vers les écrans où elle apparaissait, absorbée dans son travail. «Kennywood doit tout savoir, pensa-t-il en fermant le dossier d’un geste sec. »
— Ha…vous voilà enfin, Pauline, dit-il d’une voix glaciale, sans lever les yeux de ses notes.
— Il se passe quelque chose de grave, Monsieur Varek, haleta-t-elle toujours sous l’émotion de son mal-être ressenti dans le couloir.
Pauline tenta de garder son calme, mais son cœur battait à tout rompre.
— Les résultats que nous obtenons ne correspondent pas à ce que nous avions prévu. Il y a une composante... que je n'arrive pas à expliquer. Ces gènes ne sont pas naturels. Ils ne peuvent pas l’être.
Varek releva les yeux, un sourire étrangement calme sur son visage.
— Nous y voilà ! C’est ce que je voulais vous montrer, approchez-vous.
Il ouvrit le dossier devant lui. À l’intérieur, des photographies d’embryons modifiés, mais aussi des diagrammes détaillés des mutations génétiques appliquées.
Pauline feuilleta rapidement les documents, son souffle s'arrêtant à chaque nouvelle ligne. « Non… impossible, pensa-t-elle, les mots dansant devant ses yeux. » Ce qu'elle découvrait allait bien au-delà de tout ce qu’elle aurait pu imaginer. Les scientifiques avaient non seulement isolé des gènes liés à la sensibilité occulte… mais ils les avaient déjà implantés dans des embryons humains. Elle porta une main tremblante à sa bouche.
— Ils ont créé des êtres… des Hybrides, murmura-t-elle, à peine capable de croire aux mots qui franchissaient ses lèvres.
— Vous êtes allé trop loin, Varek, hurla Pauline.
Ses mains tremblaient légèrement alors qu'elle refermait le dossier, les doigts crispés sur le bord des pages. Elle pouvait presque sentir le papier rugueux sous sa peau. Le bruit sec de la couverture qui se referma résonna dans la pièce, amplifiant le battement rapide de son cœur, qui résonnait dans ses oreilles.
Une boule de tension s’était formée dans sa gorge, et elle peinait à avaler, son regard se fixant intensément sur l’homme en face d'elle. Ses yeux brillaient d’une détermination mêlée d’inquiétude.
— Vous ne pouvez pas jouer avec ces forces, le supplia-t-elle du regard, les sourcils froncés, la voix tremblante.
Elle se leva brusquement, le dossier glissant de ses mains sur la table. Elle ne pouvait plus rester immobile face à ce qu’elle savait.
— Je vous en prie, implora-elle, sa voix se brisant sur les derniers mots. Pensez à ce qui pourrait arriver si nous échouons.
— C’est pour ça que vous êtes ici, Pauline, répondit Varek d’une voix douce. Tout comme vos parents, vous avez le talent et les connaissances pour stabiliser tout le processus. Vous comprenez ces gènes mieux que personne. Nous pouvons faire en sorte que ces Hybrides soient… parfaits.
Elle secoua négativement sa tête, horrifiée.
— Vous jouez avec quelque chose qui vous dépasse. Ces gènes... ils sont instables. Si vous continuez, vous allez provoquer une catastrophe.
Varek ne répondit pas immédiatement. Il se contenta de la fixer, un éclat glacial dans les yeux. Il se pencha légèrement en avant, comme pour mesurer son prochain mot. L'ambiance était électrique entre eux , et il savait qu'il devait choisir ses paroles avec soin.
— Nous ne sommes pas les premiers à jouer avec la magie noire, Pauline. Mais nous serons les premiers à la contrôler, laissez-moi vous présenter le Projet Codex Obscura, annonça-t-il en soulevant un rideau de matière PVC tout en l’invitant à le suivre.
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