Partie 3- Chapitre 15 : La Révélation

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Pauline, toujours dans le doute, se tenait droite au milieu de la pièce, mais son esprit vacillait. Elle ne comprenait pas ce qu’on attendait d’elle. Chaque mot, chaque geste autour d’elle lui paraissait une énigme. Les visages fermés de Varek et Kennywood, leurs regards perçants qui semblaient fouiller son esprit, tout cela la mettait mal à l’aise. Et Jeff… sa présence parmi eux était comme une dague plantée dans son ventre. Une sensation de trahison lui donnait la nausée. Elle avait envie de vomir.

Le piège se refermait, elle le sentait. Varek, avec son sourire narquois et ses yeux qui brillaient d’une lueur dangereuse, n’avait jamais caché son mépris pour elle. Son rôle dans ce groupe restait un mystère, mais il avait toujours une longueur d’avance, un plan en tête, des mots soigneusement choisis pour manipuler ceux qui croisaient sa route. Quant à Kennywood, il ne disait presque rien, mais son silence pesait. Il la scrutait comme un scientifique devant une anomalie à disséquer, comme s'il cherchait le moment exact où elle craquerait sous la pression.

Pauline sentit la sueur perler dans son dos, et une vague de panique la submergea. Elle tenta de se raccrocher à ses pensées, de rassembler les pièces du puzzle, mais plus elle essayait de comprendre, plus tout lui échappait. Pourquoi l’avaient-ils attirée ici ? Était-elle une simple pièce d’un jeu qui la dépassait, ou avait-elle un rôle plus important qu’elle ne l’imaginait ? Et Jeff… pourquoi lui ?

Elle osa un coup d'œil dans sa direction. Il n’avait pas bougé, toujours immobile, les bras croisés, observant la scène avec un calme déroutant. Ce même homme qui, quelques jours plus tôt, semblait prêt à tout pour l’aider, se tenait désormais parmi ceux qui la menaçaient. Était-il là contre son gré ? Ou, pire encore, faisait-il partie de ce plan sinistre depuis le début ? Pauline ne pouvait plus distinguer le vrai du faux.

Une voix grave brisa le silence oppressant, celle de Varek.

— Tu te demandes sûrement pourquoi tu es ici, Pauline. Pourquoi nous avons tant insisté pour que tu nous rejoignes.

Son ton était mielleux, presque paternaliste, mais Pauline savait qu'il n'y avait rien de bienveillant dans ses paroles.

— Il est temps que tu comprennes ta place dans tout ça.

Elle déglutit, son estomac se nouant encore plus.

— Ma place ? murmura-t-elle, luttant pour garder son calme malgré la peur qui lui étreignait la gorge.

Varek s’avança lentement, chaque pas résonnant dans la pièce comme un avertissement.

— Tu crois vraiment que tout ceci est une coïncidence ? Que ton chemin a croisé le nôtre par hasard ?

Il la fixa, son regard presque amusé par son incompréhension.

— Nous t’avons observée, Pauline, depuis bien plus longtemps que tu ne le penses. Et Jeff… Il se tourna vers lui avec un sourire en coin et continua …il n’est pas là par accident non plus.

Pauline sentit le sol se dérober sous ses pieds. Elle cherchait désespérément à comprendre. Si Jeff était impliqué, pourquoi ne lui avait-il jamais rien dit ? Sa respiration s’accéléra, et une colère sourde commença à bouillir en elle.

— Alors, tout ce temps… Jeff, tu jouais la comédie ? lança-t-elle, la voix tremblante, mais teintée de défi.

Jeff, enfin, brisa son silence.

— Pauline…, commença-t-il à dire doucement, presque avec regret.

Mais ses mots ne suffirent plus. Elle attendait des explications, une vérité à laquelle se raccrocher dans cette tempête de mensonges et de trahisons.

Varek intervint avant qu’il ne puisse continuer sa phrase.

— Ah, mais c’est là que tu te trompes. Jeff a toujours été sincère avec toi… mais peut-être pas de la manière que tu imagines.

Un éclat de cruauté dans sa voix.

— Il t’a menée là où tu devais être, c’est tout. La question maintenant est : vas-tu enfin comprendre ce que nous attendons de toi, ou dois-je te l’expliquer en des termes plus… directs ?

Pauline sentit le piège se refermer, et malgré la colère et la confusion qui se bousculaient en elle, une certitude commençait à prendre forme : elle n’était pas là par accident. Quelque chose, quelque part, l’avait menée précisément à ce moment. Mais elle n'était pas encore prête à abandonner. Pas sans savoir ce qu’ils voulaient vraiment d’elle – et surtout, pas sans comprendre le rôle de Jeff dans cette trahison.

Le silence s’épaissit dans la pièce tandis que le Professeur Kennywood s'avança lentement vers Pauline, ses yeux perçant l’obscurité qui l’entourait. Chaque pas résonnait comme une horloge macabre comptant les secondes avant une révélation inéluctable. Pauline sentit son cœur s'accélérer, son souffle se faire plus court, mais elle ne montra rien. Elle savait que montrer de la faiblesse face à cet homme serait fatal.

Kennywood s’arrêta juste devant elle, suffisamment proche pour qu’elle sente l'aura glaciale qui émanait de lui, mais pas assez pour la toucher. Il prit une longue inspiration avant de parler, comme s'il savourait chaque instant avant de délivrer son message.

— Pauline… tu as plus de valeur que tu ne le crois.

Sa voix était calme, presque douce, mais Pauline y décelait quelque chose de plus sinistre, une menace déguisée sous un masque de sérénité.

— Ce que j’attends de toi, c’est ta collaboration. Tu détiens des informations… des clés que nous ne pouvons obtenir seuls.

Pauline fronça les sourcils, luttant pour ne pas trahir son incompréhension.

— Des clés ? Je ne comprends pas…, murmura-t-elle.

Sa voix se fissura légèrement, mais elle se ressaisit immédiatement. Elle ne pouvait pas lui laisser voir ses doutes.

Kennywood esquissa un sourire en coin, comme s'il attendait cette réponse.

— Oh, tu comprendras bientôt. Tu vois, tes parents faisaient partie du projet Codex Obscura alors que tu étais encore une très jeune enfant. Leur rôle a été… disons… essentiel. Sans eux, nous n’en serions pas ici aujourd’hui.

Son regard se fit plus intense, scrutant ses réactions, cherchant la fissure dans son armure.

Les mots s'écrasèrent contre Pauline comme une vague glaciale. Ses parents ? Elle sentit une nausée encore plus violente monter en elle. Jamais ils n'avaient parlé d’un quelconque projet de cette ampleur. Codex Obscura. Ce nom elle l’avait déjà entendu par Varek quelques temps plus tôt, pourtant il ne lui était pas inconnu, c’était comme un souvenir, une ombre qui avait plané sur son enfance, sans qu’elle en comprenne la véritable nature.

— Mon père et ma mère… faisaient partie de ce projet ? se força-t-elle à articuler chaque mot, luttant contre le flot d’émotions qui menaçait de la submerger.

— Bien sûr, répondit Kennywood, satisfait de l’impact de ses paroles.

— Ils ont été des pionniers, des chercheurs brillants, dévoués à une cause bien plus grande qu’eux. Leur savoir a permis de décrypter des fragments du Codex que personne d’autre n’avait pu comprendre.

Il marqua une pause, observant ses réactions avec un plaisir à peine dissimulé.

— Ils avaient une vision. Une vision que nous poursuivons aujourd’hui. Mais leur travail… n’a jamais été achevé. C’est là que tu entres en jeu, lui affirma-t-il.

Le monde autour de Pauline se mit à vaciller. Ses parents avaient toujours été des chercheurs scientifiques, elle en avait toujours eu conscience, mais ce qu'on attendait réellement d'elle, elle n'en avait aucune idée. Un projet de cette envergure, à cette époque… Elle n’en avait jamais entendu parler. Pourtant, à mesure qu’elle repassait les fragments de recherches qu’elle avait trouvés dans leurs documents, et en repensant à la clé USB que Jeff lui avait donnée, elle commençait à entrevoir quelque chose. Mais quoi exactement ? Elle n'était pas sûre. Il y avait quelque chose dans ces archives, quelque chose qui lui échappait encore. Et puis, il y avait la mort de ses parents... Un accident, avait-on dit. Mais maintenant qu’elle y repensait, était-ce vraiment un accident ? Tout semblait si bien calculé, si étrangement... parfait.

Elle sentit le piège se refermer encore un peu plus autour d’elle.

— Qu’est-ce que vous attendez de moi exactement ? balbutiât-elle d'une voix glacée, bien que ses pensées soient en plein tumulte.

Kennywood reprit, son ton se durcissant légèrement :

— Toi seule peux finir ce qu’ils ont commencé. Tu possèdes en toi… certaines prédispositions, disons, des aptitudes que nous avons longtemps observées sans que tu ne le saches. Le Codex n’est pas un simple texte ancien, c’est une carte. Une carte vers quelque chose de bien plus grand que tu ne peux l’imaginer. Mais pour la déchiffrer entièrement, nous avons besoin de toi, de ton héritage.

Pauline sentit le poids des mots s’abattre sur elle.

— Mon héritage ? dit-elle sans en comprendre le sens.

— Tu as en toi, avec toi, une partie de leur travail, Pauline. Une connaissance que tu n’as pas encore découverte, mais qui réside profondément en toi, héritée de leur recherche. Et pour accéder à ce savoir, tu devras fouiller plus loin dans ce que tu croyais savoir de ton passé, dit Kennywood

Il se pencha légèrement, ses yeux perçant les siens et continua :

— Ils t'ont préparée à cela. Ils savaient que tu serais la clé, un jour.

Pauline vacilla sous le choc de la révélation. Elle chercha des réponses, des souvenirs qui pourraient confirmer ou infirmer les propos de Kennywood, mais tout était flou. Elle se souvenait des livres et des symboles mystérieux qu’elle avait aperçus lorsqu’elle se faufilait en cachette dans le bureau de ses parents, malgré l’interdiction stricte d’y entrer des conversations à voix basse, des voyages dont elle ignorait l’objet précis. Et cet "accident" qui les avait emportés, toujours aussi trouble dans son esprit…

Une pensée la transperça. Elle redressa la tête, son regard désormais plus dur.

— Si mes parents étaient si essentiels à votre projet… pourquoi sont-ils morts si brutalement ?

La question flottait entre eux, lourde de sens, comme une accusation déguisée.

Kennywood soutint son regard, impassible.

— Leur mort a été… tragique, bien sûr. Un hasard malheureux.

Son ton était lisse, mais Pauline n’y croyait pas.

— Mais cela ne change rien à ce qu’ils ont accompli. Leur sacrifice, qu’il ait été intentionnel ou non, a permis d’ouvrir une voie. C’est à toi maintenant de la suivre.

Pauline serra les poings, luttant pour ne pas flancher sous le poids des révélations. Elle était piégée, liée à un passé qu’elle ne comprenait pas encore totalement, un passé que Kennywood utilisait pour la manipuler. Mais une chose était certaine : il ne lui avait pas tout dit. Ses parents étaient morts pour une raison, et elle était déterminée à découvrir la vérité, même si cela signifiait se plonger encore plus profondément dans ce labyrinthe de mensonges.

Jeff, jusque-là resté en retrait, fit un pas en avant. Pauline le regarda, cherchant dans ses yeux une réponse, un soutien, mais elle n’y trouva que du silence et une ombre de regret. Sans en demander une quelconque autorisation, elle quitta la salle en courant pour aller se réfugier sans ses quartiers.

Varek tenta de la retenir.

— Laissez-la ! ordonna Kennywood en rajoutant, la séance est levée.

Ce que Pauline ignorait, c'est que le professeur Kennywood, cette figure charismatique et rassurante, avait autrefois gagné la confiance totale de ses parents, Léa et André Wullschleger. Avec une habileté machiavélique, il leur avait fait croire que leurs recherches avaient été dérobées par une branche clandestine du gouvernement, une organisation redoutable prêt à exploiter leurs découvertes pour des raisons inavouables. Pris de panique, incapables de discerner la vérité dans cette tempête d’incertitudes, Léa et André s'étaient tournés vers Kennywood pour qu'il les protège. Ils n'avaient pas deviné qu'ils s'en remettaient justement à l'homme qui avait tout orchestré depuis le début. C'était lui, l'instigateur du vol, celui qui, dans l’ombre, manipulait leurs peurs pour mieux les contrôler, les entraînant jour après jour plus profondément dans sa toile perfide.

Mais ce n'était là que la surface d'une conspiration bien plus vaste. Derrière cette équipe de recherche, à laquelle Léa et André avaient consacré tant d'années, se cachait un financement aux origines aussi opaques que terrifiantes. Sous la direction de Kennywood, une coalition d'élite s'était formée, réunissant des magnats richissimes, des industriels influents, et même des hommes politiques de plusieurs pays. Cette alliance sombre et secrète avait un but commun : tirer profit des découvertes des Wullschleger, quel qu’en soit le prix. Pauline, plongée dans l'ignorance, était sur le point de découvrir que le monde dans lequel elle avait grandi était bien plus dangereux qu'elle ne l'avait jamais imaginé. Mais lorsqu'elle commencerait à assembler les pièces du puzzle, ne serait-il déjà pas trop tard pour échapper à l'emprise mortelle de Kennywood ?

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