Chapitre 3
Lorsqu'elle pénétra à l’intérieur de ce qui fut de nombreuses années sa maison, elle en respira profondément l’intense odeur boisée aux notes de jasmin.
L’atmosphère de la cabane était douce et chaleureuse. Construite de brindilles de bois, identiques à celles avec lesquelles Luna faisait son nid dans le tronc lors de ses couvées, elle abritait Arwenne des intempéries. Notre petite fée était plus fragile que la mésange. Ses ailes ne pouvaient voler lorsqu'elles étaient mouillées et elles eussent donc rapidement entreprit de créer "La petite maison feuillue", surnommée ainsi pour son toit en feuilles de fougères, et sa mousse recouvrant sa façade.
Deux jours durant, elles eussent posé brindille après brindille pour donner vie aux petits murs, les tenant entre elles par des fils en toiles confectionnés par la meilleure amie et voisine de Luna, Aurore l'araignée avec qui la mésange s'était liée d'amitié. Aurore avait tissée une toile dans l'arbre voisin de la mésange ce fameux soir d'hiver et fut témoin de l'arrivée d'Arwenne dans le nid de celle-ci. Touchée, et prise de compassion face au désarroi de Luna quant au fait de rechauffer le belle fée en son absence, l'araignée, prit son courage à deux mains pour proposer son talent de courturière et ainsi lui frabriquer des vêtements. Depuis ce jour, la jolie tisseuse devint une seconde mère pour Arwenne.
Dans ce petit espace, se trouvaient tout ce dont elle avait besoin. Une feuille de chêne séchée lui servait de lit. La douce fée avait toujours aimé s'y pelotonner, tel un renard dans son terrier, lorsque la fatigue la submergeait.
Des feuilles récoltées ici et là lui servaient de couvertures et plusieurs plumes de Luna étaient rassemblées en guise d'oreiller. Comme elle aimait y enfouir son visage le soir et sentir le duvet lui caresser le visage ! Son sommeil était guidé par ce rituel quotidien, naviguant sur l’odeur rassurante de sa mère.
Arwenne se dirigea vers son lit, prit l'une des plumes, l'enroula comme elle put sur elle-même, et la rangea dans son petit sac fait de feuilles de saule blanc, qu'elle avait appris à confectionner avec Aurore. Ensuite, elle ramassa près de son lit le gland qu’elle avait préalablement vidé, raccourci et séparé de sa cupule, pour en faire une gourde et y versa quelques gouttes de rosée pour ne pas en manquer durant son voyage. Elle y plongea ensuite des morceaux de baies de sureau noir qui la nourriraient également en cas de besoin. Elle revissa la cupule par-dessus et l'attacha à sa taille à l’aide d’une ceinture faite de toile.
La petite fée avait appris à capturer de petites gouttes de rosée dans une toile tissée par Aurore, pour ne jamais manquer d'eau. Cela lui servait également à voir son reflet, et elle s'y regarda, voulant lister tous ces détails qui faisaient d'elle un être à part dans cette forêt.
Si la petite fée et Luna avaient des points communs, des particularités physiques les différenciaient. Notamment, celles de leurs ailes qui n’avaient en semblable capacité toutes deux, que celle de voler.
Face à ce miroir, dans sa petite robe faite de digitales violettes, Arwenne déploya ses ailes et les étudia.Elle avait tout comme sa mère des ailes, oui, mais elles n'étaient pas identiques. Celles de la mésange étaient faites de plumes et d’os, alors que les siennes étaient fines, aux reflets bleutés. Si transparentes qu'elles ressemblaient à du givre recouvrant les gouttes de rosée au petit matin. À la lueur du soleil couchant, les reflets argentés scintillaient instantanément. Après les avoir admirées sous toutes les coutures, Arwenne les remua de plus en plus vite. Leur bruit était semblable à ceux des ailes des colibris. Elles étaient vives et rapides, à tel point que lorsqu’elles battaient à leur plus vive allure, elles en devenaient presque invisibles.
Elle les replia et continua son étude. Son visage était petit et ovale, plein de petites taches de rousseur, accentuant son air éternellement enfantin. Ses grands yeux aux iris gris et aux longs cils recourbés étaient ce qu'Arwenne aimait le plus chez elle. Elle en était fière. Son nez lui, était retroussé et fragile, tout le contraire du robuste bec de Luna. Sa peau, quant à elle, était rose et lisse, sensible aux températures, mais devenait plus blanche certaines nuits, comme si elle était faite pour absorber les rayons de la lune. Pour finir, elle toucha ses grandes oreilles pointues, dressées comme celles des lynx. Elles lui donnaient la faculté d'entendre des sons que même sa mère n'entendait pas.
Après cette inspection, la petite fée prit un fil fait d'une tige de pissenlit, et entreprit de transformer sa cascade de cheveux en une longue queue de cheval pour ne pas être dérangée lors de son vol.
La douce fée se plaça au centre de la cabane et regarda autour d'elle une dernière fois, son cœur battant d’appréhension mais aussi d’excitation. Elle avait l'impression qu'il allait sortir de sa poitrine.
Enfin, elle souffla un grand coup pour se donner le courage de quitter ce qu'elle avait toujours connu et ouvrit la porte, se jurant de revenir.
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