Chapitre 7-1
7-1
Aaron hésitait, il semblait mal à l’aise. Je fronçai les sourcils. Il prit une grande inspiration.
— Lorsque je t'ai vue la première fois, j’ai vu ton aura, mais il n’y avait pas que tes couleurs, il y avait - et c’est toujours le cas - du gris foncé dedans. Et ça, ce n’était pas normal, alors je suis resté pour comprendre ce que c’était.
— Tu m’as espionnée ? crachai-je en me redressant.
— Oui...enfin non...il soupira en se passant la main dans les cheveux, se leva et fit les cent pas. Je savais que tu étais une " innocente ", et cette chose qui tournait autour de toi…il fallait que je comprenne si tu étais en danger. Lorsque tu t’es endormie, tu t’es mise à crier. J’ai accouru et j’ai vu cette entité en train de t’attaquer en utilisant un cauchemar pour tenter de te posséder. J’ai réussi à arrêter l’attaque mais elle est toujours là.
Une sueur glacée me coula le long de la colonne vertébrale. Je ne voulais pas y croire, mais je ne pouvais pas me voiler la face. Mes cauchemars étaient réels. Je posais donc la question.
— Et c’est quoi cette chose ?
— Une âme noire, répondit Thomas.
— Et qu’est-ce qu’elle me veut ? ils restèrent muets. Répondez ! je n’en suis plus au point de faire une crise d’hystérie là !
Thomas prit alors la parole, m’expliquant le rôle que ma mère pouvait avoir eu dans cet enfer, ils se renseignaient sur sa possible implication. Apparemment ils connaissaient ma relation haineuse envers elle. Il me révéla mes particularités de Portail et de Réceptacle.
— Et ? ça veut dire quoi ?
— Que si l’ âme noire réussit à prendre le contrôle de ton corps, elle aura accès à ASILIA et pourra y faire entrer des Maudits par ton intermédiaire et y faire un carnage.
— Vous voulez dire que j’ai “ un truc ” vivant dans mon corps qui veut me bouffer ?
Je me sentais mal, la bile me remontait dans la gorge. Une main se posa sur mon épaule, Aaron, encore. Décidément, il ne faisait que me sortir la tête de l’eau. Mais cela m’apaisa, je m’ancrai à son touché.
— Non, elle ne veut pas te “ bouffer ”, me reprit Thomas, elle veut te contrôler, en corrompant ton âme, et si elle réussit, tu deviendras une Maudite à sa solde. Nous devons absolument l’en empêcher.
— Vous...je déglutissais, mais j’avais la gorge trop serrée. J’inspirais et expirais doucement. C’est la deuxième fois que j’entends le mot “ Maudit ”, c’est ce qui a essayé de m’agresser n’est-ce pas ?
— Oui, ce sont les soldats, si je puis dire, des âmes noires. N’ayant pas de physique solide au vu de leur état d’énergie, elles ont besoin d’eux pour faire leur sale boulot. Ils ont été corrompus de la même façon qu’ils vont essayer avec toi.
— Ok, il faut me débarrasser de cette chose au plus vite. Vous savez comment faire, n’est-ce pas ? Silence. Je les regardais tour à tour. N’est-ce pas ? répétais-je, plus fort.
— Nous cherchons comment faire, nous avons un mois pour trouver avant que tu ne récupères toutes tes facultés. En attendant, Tobias et Aaron vont rester ici pour te protéger. Après ton attaque, j’ai appelé notre Meneur pour lui expliquer la situation. Il va vous envoyer un Protecteur.
Je voyais du coin de l'œil Aaron ouvrir la bouche, mais Thomas leva la main pour le faire taire.
— L’arrivée de Maudits change la donne Aaron, vous n’êtes pas entrainés pour faire face à ces créatures. Loric a deviné que tu ne serais pas d’accord, mais il a dit que ce n’était pas négociable.
Aaron grogna. Je me tournai vers lui.
— Mais tu grognes ? tu grognes vraiment ! il me regarda et rougit. Trop mignon, fis-je, et là il devint écarlate. J’eus pitié de lui et me tournai vers Thomas. Vous pensez vraiment que je vais vous laisser squatter chez moi ? la moutarde me montant au nez, je me levai, les poings sur les hanches, le regard flamboyant de colère. Il fallait que je redevienne maîtresse de ma vie. Vous pourriez peut-être me demander mon avis, non ? j’ai une vie vous savez, un travail et je ne vous connais pas, pourquoi vous ferais-je confiance ? j’étais fière de mon ton autoritaire.
— Parce-que tu n’as pas le choix, me répondit Aaron durement. Nous devons rester là pour veiller sur ton sommeil, et te protéger contre les Maudits. Tant que cette histoire n’est pas réglée, on va s’incruster. Son regard déterminé m’impressionna. Il ne fallait pas que je le sous-estime. Et il avait raison, j’étais incapable de faire face à ces...choses. Je poussai un soupir.
— Ok, mais je n’ai qu’une chambre d’ami, comment allez-vous vous débrouiller ?
— Moi, je ne reste pas, il faut que je rentre faire un rapport à Loric, fit Thomas. Il baissa la tête pour se regarder, renifla et reprit. Après être passé chez moi. Le Protecteur se débrouillera.
— Moi je peux me transformer et dormir au pied de ton lit ? me demanda Tobias avec un grand sourire.
— Hors de question ! lui aboya Aaron. C’est moi qui dormirai dans sa chambre, c’est clair ?
— Quoi ? mais ça va pas la tête ? lui criais-je, outrée.
Son visage se décomposa, Thomas ricana et Tobias le regarda les yeux écarquillés. Il passa la main dans ses cheveux en bredouillant.
— Pardon...ce...ce n’est pas ce que tu crois, en me transformant, j’aurais une meilleure ouïe, même si elle est déjà très bonne, mais si quelqu’un vient roder, je serais plus apte à te défendre.
Ma mâchoire tomba, il peut se transformer ? puis en repensant à Tobias et au chat, “ ouais, si lui le fait pourquoi pas Aaron”.
— D’aaaacord, Ok. Tout à coup une brume bleue se matérialisa au milieu du salon, un miroir apparut et quelque chose le traversa et se solidifia. Je criai et me précipitai derrière Aaron. C'EST QUOI CA ? ? croassais-je.
— Salut tout le monde.
— T’es cinglé d’arriver comme ça ! aboya Aaron. Ce n’est rien Lola, c’est le Protecteur que Loric nous a envoyé, m'expliqua-t-il.
Là, c’était trop. Je me jetai sur le nouvel arrivant et lui collai une gifle magistrale. Me rendant compte de ce que je venais de faire, et en voyant la marque de mes doigts sur sa joue, je le regardais d'un air horrifié, les mains sur la bouche et les yeux ronds. En croisant son regard glacial, je me dis que mon impulsion avait été une mauvaise idée. Il fit un pas vers moi et je reculai d'autant. Aaron, grognant et montrant les dents, se rapprochait les poings serrés.
— Aaron ? Aaron ! ! calme toi. Il tourna le regard vers moi et s’arrêta. Ses yeux étaient passés de bleu pâle à électrique. Je m'approchai de lui et lui pris les mains. Aaron ? il inspira fortement, ferma les yeux et expira lentement. Lorsqu'il les rouvrit, ils étaient redevenus normaux et ses muscles se détendirent.
— Hum… Lola, je vous présente Alric. C’est le chef des Protecteurs. Vous avez de la chance, vous avez droit au nec plus ultra des guerriers de notre défense, fit Thomas nous observant l'un après l'autre.
— Je...Je suis désolée, mais vous m'avez foutue une trouille bleue, me justifiais-je.
— Pourquoi c’est toi qu'on a envoyé, t’as pas des trucs mieux à faire ? demanda hargneusement Aaron au nouveau venu.
Celui-ci haussa un sourcil en le dévisageant.
— Parce que je dois évaluer la situation, ça fait partie de mon boulot. Il se retourna vers moi et me jaugea de haut en bas en se frottant la joue. Quand nos regards se croisèrent, le sien était passé de glacial à étonné et chaleureux. Je suis désolé de vous avoir fait peur, ce n’était pas mon but, fit-il en s’inclinant légèrement.
— Et moi je suis désolée de vous avoir accueillis ainsi. Mais mes nerfs sont un peu à fleur de peau là. “ Ce type est intimidant, le terme guerrier lui va comme un gant. “ Mais ce n'était pas mon genre, les hommes gonflés à la testostérone, très peu pour moi.
Il regarda Thomas et Tobias, un sourire narquois se dessinant sur ses lèvres.
— Je ne préfère pas vous demander pourquoi vous êtes habillés avec des serviettes. Tobias rougit et Thomas lui jeta un regard noir.
— Bon, moi il faut que j’y aille, grommela Thomas. Lola, on se reverra bientôt. Les garçons, prenez bien soin d’elle, je vous laisse la voiture. Il fit un signe de tête au Protecteur, leva la main en soufflant dessus et disparut à travers le miroir qu’il avait créé.
Un silence pesant s’installa. J’étais émerveillé par leur manière de se déplacer. Pas de feu rouge, pas de bouchon, pas de pannes, je soupirai. Quelle chance. Je me secouai.
— Bon, je ne sais pas pour vous, mais moi je vais me coucher. Euh...Aaron ? tu peux me montrer ta transformation ? mais que ce soit clair, lui dis-je en plissant les yeux, personne ne dort dans ma chambre, c’est clair ?
— Mais...commença Aaron.
— Non ! si tu as pu m’entendre faire un cauchemar l’autre jour, tu l’entendras aussi hors de ma chambre, non ? il bougonna mais acquiesça.
— Bien, dit Alric, moi, de toute façon je vais faire des rondes à l’extérieur, dit-il. Salut.
Je me tournai vers Aaron et attendis, les bras croisés. Il avait l’air d’hésiter, puis son regard se teinta de résignation. Comme pour Tobias, une lueur bleuté l’entoura, un flash m’obligea à cligner des yeux, et je me retrouvai face à un magnifique chien noir ressemblant à un Berger Allemand. Il me fixait avec les mêmes yeux bleu pâle qu’Aaron, et devait m’arriver à mi-cuisse. Son pelage était brillant avec des poils longs.
Il leva le museau et renifla. Il s’avança vers moi d’une démarche gracieuse et frotta sa tête contre ma main en demande de caresses. Je m’agenouillai et lui donnai ce qu’il me demandait. Il couina et commença à vouloir jouer. J’éclatais de rire et jouai avec lui. Je jetais un coup d'œil à Tobias qui nous observait et vis son regard plein de tendresse sur Aaron. “ Je crois que tu as un véritable ami Aaron, j’espère que tu le sais, garde le précieusement ” pensais-je.
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