Chapitre 8-2

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8-2

— Alric ? fis-je, en pointant d’un doigt tremblant l’endroit où s’était tenu le Maudit. L’homme de... d’hier, il était là. Il...il a disparu.

— Quoi ? Je ne l’ai pas senti ! Je…

Il fut interrompu par l'apparition de plusieurs miroirs flottants dans l’air, d’où sortirent des hommes portant la même armure qu’Alric, montés sur des...destriers ? ainsi qu’une femme et un autre homme impressionnant, lui aussi en tenue de combat. Alric fit un signe aux soldats - ne sachant pas comment les nommer autrement - qui firent faire demi-tour à leur monture et se dirigèrent vers les bois au galop.

— Aaron !

La femme courut vers nous. Un instinct de possession et de protection puissant me fit me pencher sur Aaron en foudroyant la nouvelle venue du regard. Elle ralentit et m’observa avec curiosité.

— Ne t’inquiète pas, je veux juste le soigner. Je suis la Guérisseuse, Sandra, me dit-elle en avançant prudemment.

Mais qu’est-ce qui me prenait ? honteuse, je pris sur moi et me redressai, laissant le champ libre à la femme. Elle s'agenouilla, ôta le t-shirt imbibé de sang et posa ses mains sur les blessures. Je guettais le moindre de ses gestes. Sous mes yeux émerveillés, les profondes coupures se refermèrent. Il n’en resta bientôt plus que des cicatrices fines et rosées.

— Voilà, ses blessures sont guéries, bientôt il n’y aura plus rien, mais il doit se reposer.

Je relevai la tête - maintenant que ses mains ne le touchaient plus - et vis Alric qui me regardait d’un air goguenard; Tobias avec un sourire plein de tendresse et l’homme que je présumais être le Meneur me dévisageait avec curiosité.

Je me raclai la gorge, confuse, et dit à Alric d’un ton plus sec que je ne l’aurais voulu.

— Transporte-le dans la chambre d’amis. Je vais t’aider avec Tobias.

Alric et le Meneur haussèrent les sourcils en me fixant du regard. Alric inclina le buste d’un air moqueur et le Meneur éclata d’un rire tonitruant. Je me sentis rougir jusqu’à la racine des cheveux. Je venais de donner un ordre au chef des Protecteurs. Tobias, quant à lui, me regardait avec admiration et la guérisseuse était bouche bée.

— Pardon, fis-je ne sachant plus où me mettre, je ne voulais pas te manquer de respect.

— Ne t’inquiète pas, me rassura le Meneur, voir quelqu’un d’autre que moi lui donner un ordre, est quelque chose que je n’aurais voulu manquer pour rien au monde, fit-il en donnant une claque dans le dos d’Alric. Celui-ci se renfrogna et lui lança un regard noir. Je vais le porter, reprit-il en reprenant son sérieux. Alric, montre moi le chemin.

Il souleva Aaron, toujours à moitié dans mes bras, comme s’il ne pesait rien, remarquant en même temps son changement de physionomie. Son regard inquiet changea en quelque chose de tendre, puis en fierté.

Je me levai à mon tour, et d’un coup, repris conscience de mon environnement. J’étais tellement focalisée sur Aaron que j’avais oblitéré le reste. Je regardai mes mains, puis la zone de combat. Il y avait du sang partout. Les cadavres de nos assaillants gisaient autour de la voiture. Lorsque je vis ce qu’il en restait, mon estomac se révulsa et je courus vers les bois, mais me penchai en avant pour vomir avant de les atteindre.

Une main douce et tiède se posa sur mon front, et mes nausées se calmèrent instantanément.

— Respirez doucement, me dit la voix douce de la Guérisseuse. Cela va passer.

J'inspirai et expirai profondément jusqu’à ce que le calme revienne en moi. Je me tournai vers elle.

— Merci, et je suis désolée pour mon accueil, je ne sais pas ce qui m’a pris.

— Ne vous inquiétez pas, répondit-elle avec un sourire énigmatique. Rejoignons les autres.

— Mais et les...les..

— Les Protecteurs vont s’en occuper, me dit-elle, devinant de quoi je voulais parler. Il n’en restera aucune trace.

Soulagée mais légèrement dubitative, je l’accompagnai dans le chalet. Je me précipitai dans la chambre d’amis. Aaron était allongé sur le lit, torse nu, Tobias lui passant un linge humide pour enlever le sang. Je m’approchai doucement de lui en déglutissant péniblement.

— Comment va-t-il ? demandai-je.

— Il va bien, il se repose, je pense qu’il va dormir quelques heures, m’expliqua le Meneur. Vous devriez vous doucher et vous changer, Lola. Vous pourrez revenir après vous être reposée un peu, la descente d’adrénaline va vous laisser épuisée.

Je baissai les yeux sur mes mains pleines de sang et hochai la tête. Je fis demi-tour et me dirigeai vers ma chambre prendre des vêtements propres puis m'enfermai dans la salle d’eau. Une fois dans la douche, je me frottai la peau avec frénésie, l'eau qui s'écoulait était rouge, je restai sous le jet brûlant jusqu'à ce qu’elle redevienne claire. Je me laissai glisser au sol, puis permettai à mes larmes de couler.

AARON

Je me réveillai, battant des paupières, ébloui par la lumière. J'allai bouger, mais senti quelque chose peser sur ma poitrine. Tournant la tête, je me retrouvai face au visage de Lola, endormie. Mon cœur se gonfla de bien-être, je ne bougeai plus d’un poil. Son expression s’adoucissai dans le sommeil, elle avait l’air tellement sereine et tranquille, je laissai mes yeux s’imprégner de ses traits. Comme je haïssais cette chose qui voulait lui faire du mal. Les souvenirs de ce qu'il s’était passé me revinrent en mémoire. Mon corps se raidit au fait qu’on s’en était pris à elle. Lorsque j’avais vu ce Maudit arracher la portière de la voiture et tenter d’en extirper Lola, la fureur m’avait submergé, j’étais devenu comme fou. Mon regard remonta vers ses yeux et je croisais son regard gris-vert. Elle les écarquilla et tenta de se redresser, mais je l’en empêchai en maintenant son bras contre ma poitrine. Nous nous fixames un long moment avant que je ne la libère. Elle se détacha doucement et s'assit au bord du lit.

— Comment tu te sens, me demanda-t-elle, ses joues prenant une jolie teinte rosée.

Je m’auto-évaluai en lui souriant d’un air moqueur et répondit.

— Bien, je me sens bien, je me redressai comme un ressort. Mais c’est quoi cette voix ?

— S’il n’y avait que ta voix, reprit-elle en pouffant et me lorgnant de haut en bas.

— Quoi ? je baissai les yeux sur moi et ...Nom de Dieu ! criais-je en me ruant vers la salle d’eau.

Me mettant devant le miroir, je regardai bouche bée l’homme qui s’y reflétait. C’était moi, mais je n'étais plus le jeune homme un peu dégingandé d’hier. J'avais fini mon évolution physique. Je ne me sens pas différent . Le soulagement que je ressentis me revigora. J’avisai les vêtements posés près du lavabo et devinai qu’ils m’étaient destinés. Je regardai mes cheveux raidis par le sang séché et grimaça de dégoût. Une douche était obligatoire.

Lorsque je sortis, j’entendis les voix de plusieurs personnes dans le salon. Je retournai dans la chambre pour y trouver Lola toujours assise sur le bord du lit.

— Pourquoi reste-tu là ? lui demandai-je, étonné. Tu vas bien ?

— Oui, ça va, je profitai encore un peu du calme avant de retourner en enfer, murmura-t-elle.

Mon cœur se serra. Je soupirai, m'approchai d’elle et pris son visage en coupe.

— Je comprends que tout ça soit dur pour toi, et crois-moi, si nous pouvions tout arranger sans que tu ne sois obligée de t'impliquer, nous le ferions, mais ce n'est pas le cas. Ta vie a définitivement changé, et plus tôt tu l’accepteras, plus tôt nous pourrons nous battre. Ensemble.

Son regard plongea dans le mien. Au bout d’un moment, ses épaules se redressèrent, et là je sus, je sus qu’elle acceptait son destin. Je me penchai vers elle et posai mes lèvres sur les siennes en un baiser doux et plein de promesse, elle n’était plus seule, et moi non plus.

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