La poupée

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" Phobie :Crainte angoissante et injustifiée d'une situation, d'un objet ou de l'accomplissement d'une action."

Depuis sa plus tendre enfance Alyce détestait les poupées. Elle préférait de loin les peluches en forme d'animaux. Son préféré était un lapin blanc. Elle l'avait d'ailleurs affectueusement surnommé pompon. Alyce aimait beaucoup l'apporter avec elle quand elle allait chez ce terrible docteur. Cet homme étrange entièrement vêtu de blanc armé d'un bloc-note Obligée de se rendre dans son cabinet une fois par semaine à cause d'une malencontreuse crise d'angoisse, Alyce le détestait. Il la forçait à raconter ses rêves plusieurs fois, même quand ceux-ci s'apparentaient à des cauchemars.

Personne, pas même ses parents n'avaient compris que la crise réusltait d'une peur, d'une phobie qu'elle avait. Et c'était à cause de cette phobie, que la crise s'était déclenchée, avait atteint son paroxysme. Pourquoi Lila avait-elle décidé de lui offrir une poupée pour son anniversaire ?

Alyce se rappelait clairement ce jour infernal. Malheureusement pour elle, son anniversaire étant en fin d'année, elle était souvent victime d'un regroupement de cadeaux. Vexée de voir que ses autres frères et soeurs avaient un cadeau à leur anniversaire et à Noël, elle osa, à dix ans, pour la première fois, crier à l'injustice. Ses parents, quoique surpris, firent preuve d'indulgence et organisèrent une petite fête pour leur fille.

Toutes les amies d'Alyces se présentèrent à la tea party. La table réservée aux présents se remplissait très vite. Des milliers de paquets aux couleurs chatoyantes scintillaient sous la lumière des guirlandes de Noël. La vaisselle de fête attendait sagement d'être utilisée, les tasses de thé avaient sorti leurs plus belles parures pour parfaire le décor.

On dansa, on chanta, on devisa, on philosopha, on but du thé, on mangea du délicieux gâteau. Puis vint enfin l'heure des cadeaux. Alyce, drapée dans sa belle robe blanche en dentelle de Calais, fut invitée à se placer derrière la table et à ouvrir ses paquets un à un. La découverte des présents fut un moment magique pour Alyce. Dans l'atmosphère boudoir de la maison, une musique classique chuchotait un air de valse, rendut inaudible par les exclamations des adultes.

Avant d'ouvrir la dernière boîte, Alyce remercia élégamment l'assemblée face à elle. Elle se replaça derrière la petite table ronde, et dénoua soigneusement le noeud rouge qui ornait la boîte dragée.

Elle retira précautionneusement le papier de soie blanc. À ce moment, son visage se déforma; son sourire s'effaça, remplacé par une mine d'effroi. Elle ouvrit légèrement la bouche, puis hurla. De peur, elle jeta la poupée et alla réfugier dans un recoin de la pièce mains sur les oreilles, genoux repliés. Elle commença à se balancer de l'avant vers l'arrière et entonna une curieuse mélodie. D'ordinaire c'était comme ça qu'elle calmait les crises. Devant ses yeux dansaient lugubrement des images de poupées, un sourire cruel imprimé sur leurs bouches carmin.

Elle sentit quelqu'un s'approcher d'elle, c'était Lila, la petite fille qui lui avait offert le poupon pensant lui faire plaisir. Elle se baissa vers elle et déposa une main qu'elle voulait rassurante sur son épaule. Il n'en fut rien. Dans sa folie, Alyce, en proie à de fortes hallucinations, se jeta sur elle, l'allongea et serra sa gorge. La demoiselle tenta de récupérer un peu d'air, en vain. Ce ne fut que quand un adulte l'attrapa de force et l'éloigna qu'elle put enfin respirer. Or, la folie d'Alyce ne s'arrêta pas là. Elle se dégagea de l'étau des bras adultes et repartit vers la jeune fille qui, effrayée, tremblait et cherchait sa maman.

Elle n'eut pas le temps de la trouver qu'Alyce se jeta de nouveau sur elle et la griffa au visage.

Du sang coula, formant des sillons écarlates, Lila hurla et supplia. Elle tenta de se débattre, de faire cesser cette folie, mais elle ne réussit pas. Fatiguée, elle s'évanouit, tomba au sol...

Alyce reprit enfin constance et c'est les doigts maculés de sang qu'elle regarda l'assemblée. Abattue par sa propre folie, elle s'agenouilla, psalmodia des excuses...Cependant, c'était trop tard, le mal était fait, sa folie découverte...

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