Le père et la fille entrèrent dans le monoprix et se dirigèrent vers le rayon frais. Baptiste s’occupait des yaourts, pendant que Romane allait chercher du jambon.

-Excusez-moi Monsieur, dit une voix, pourriez-vous s’il-vous-plaît, me donner ces pots de yaourts tout en haut ?

Cette voix. Il l’aurait reconnue entre mille. C’était elle. Elle n’avait pas changé. Toujours aussi brune, belle et séduisante. « Vite, Baptiste, réagis. Fais comme-ci tu ne la connaissais pas et donne-lui ce foutu yaourt ! »

-Oui, bien sûr, répondit Baptiste, fébrile. Tenez.

-Oh ! Baptiste ? Baptiste Villemin ?

« Merde, elle m’a reconnu. Bon, changement de tactique. Réponds-lui calmement et gentiment »

-Marie-Laure Teillard ? Terminale B ?

« Oui, c’est bien ça. Bravo Baptiste ! Allez, on continue »

-Oui ! Ça alors, ça fait quoi… 15 ans qu’on ne s’est pas vu ! Et on se croise là, au Monoprix !, reprit Marie-Laure.

- Ha ha, oui, dit comme ça, c’est drôle !

-Alors, qu’est-ce que tu deviens ?

-Après l’ENAC, j’ai intégré le BEA, spécialité acoustique. Et toi ?

-Woah, incroyable, j’étais sûre que tu y arriverais ! Moi, après toutes ces années d’études de médecine, je suis enfin anesthésiste. Je travaille à la Pitié-Salpêtrière. Et alors, tu as une compagne ou des enfants ?

« Aïe, la question que je redoutais. Bon, on reste concis, on ne détaille pas trop »

-Eh bien, je me suis marié et j’ai une fille, Romane. Elle a 9 ans. Et toi ?

-Pareil, je me suis mariée et j’ai un fils, Julien et une fille, Margaux. Ils ont 10 et 7 ans.

Puis, plus rien. Baptiste et Marie-Laure restèrent plantés pendant quelques secondes, ne sachant plus quoi se dire. Heureusement, c’est à ce moment-là que Romane choisit de faire son entrée.

-Papa, sayez, j’ai récupéré le jambon. Je peux avoir du chocolat, s’il-te-plaît ?? Papa…

Baptiste ne quittait pas Marie-Laure des yeux. Il y avait comme une force qui l’empêchait de bouger la tête.

-Très bien, ma chérie, on rentre à la maison, dit-il sans quitter des yeux Marie-Laure.

-Mais ! Du chocol-

-Attendez !, dit Marie-Laure, alors qu’on se retournait. C’était top de se retrouver après toutes ses années. Ça te dit qu’on se revoit un jour ? Un dîner, par exemple ?

-Ah. Oui, pourquoi pas.

-Super, écris-moi ton numéro et je t’appelle. A plus !

Et sur ce, Marie-Laure partit. Baptiste la regarda marcher et se rendre aux caisses automatiques. Il n’y avait pas à dire. Marie-Laure était une bombe. À chaque pas qu'elle faisait, ses cheveux bruns dansaient légèrement, portés par une brise invisible et ses fesses se balançaient d’un côté à un autre. Elle tourna une dernière fois la tête pour lui adresser un sourire chaleureux, puis elle disparut au coin de l'allée. Le cœur de Baptiste se serra douloureusement alors qu'il regarda la porte se refermer derrière elle. Il entendait déjà ses amis du travail dans sa tête « Ouiiiii, allez champion !! Allezzzz, vas-y !! Va la rejoindre !! » Il eut un petit rictus en y pensant. Mais Marie-Laure était mariée et mère de famille, qui plus est, tout comme lui, père de Romane.

-C’était qui la dame, Papa ?

-Une ancienne amie du lycée. Allez, viens on rentre.