Chapitre 21 : Le Poids De La Faute
Le silence régnait.
Pour la première fois depuis longtemps, Max ne sentait plus la présence suffocante de l’entité. Pas de voix murmurée dans son esprit. Pas d’ombres dans les coins de son regard. Pas de pièges. Juste… le vent. Léger. Froid. Et ce corps inerte dans ses bras.
L’homme ne bougeait plus. Son souffle était faible, mais présent. Max le serrait contre lui, une main derrière son dos, l’autre sous ses jambes, comme on porterait un frère blessé. Il n’osait plus parler, même pas penser. Tout ce qui tournait en boucle dans sa tête, c’était : « Je l’ai attaqué. C’est moi. C’est ma faute. »
Il reprit la route. Boitillant à cause de ses propres blessures, trébuchant parfois sur les racines ou les rochers, mais il ne s’arrêta pas. Pas avant d’apercevoir sa cabane au loin, camouflée dans la forêt sombre comme une pensée enfouie dans un coin du cœur.
Quand il franchit enfin le seuil, il poussa la porte du pied et déposa doucement l’homme inconnu sur son lit de fortune. Le sol craqua. L’air était glacé, mais à l’intérieur, une étrange chaleur flottait. Pas physique. Pas magique. Juste… humaine.
Max attrapa un vieux chiffon et un peu d’eau d’un seau qu’il avait laissé. Il essuya les traces de sang sur le front de l’homme, nettoya chaque plaie avec un soin maladroit mais sincère. Puis il enveloppa les épaules de l’inconnu dans une vieille couverture, trop rêche pour être confortable, mais mieux que rien.
Il s’assit au sol, adossé au mur. Le silence était si lourd qu’il avait l’impression qu’il allait se briser s’il osait prononcer un mot.
— Je suis désolé, murmura-t-il finalement. Même si tu peux pas m’entendre… Je suis désolé.
Ses yeux glissaient vers le visage de l’inconnu. Ses traits, bien que marqués par la fatigue et les blessures, étaient calmes. Humains. Il ne comprenait pas comment il avait pu ne pas voir, ne pas comprendre… trop aveuglé par la peur, la paranoïa, la douleur.
Il resta ainsi pendant des heures. Ou des minutes ? Il avait perdu la notion du temps. La nuit était tombée. Le monde semblait s’être arrêté, comme si même le ciel retenait son souffle. Pas de cauchemars. Pas de menaces. Juste lui… et l’homme inconscient sur son lit.
Un moment, il crut que l’homme bougeait. Mais ce n’était qu’un frisson. Une réaction involontaire. Il n’ouvrit pas les yeux.
Max serra les genoux contre sa poitrine. Il se sentait si petit, si coupable. Il voulait qu’il se réveille. Pas pour qu’il lui pardonne. Juste pour savoir qu’il allait bien.
— T’as pas le droit de mourir… chuchota-t-il. Pas maintenant. Pas ici. Pas comme ça.
Un bruit au loin, dans la forêt. Une branche qui craque.
Max se tendit.
Mais rien ne suivit. Aucune silhouette. Aucun rire démoniaque. Rien.
C’était peut-être ça le pire. Le calme. Le vrai calme. Celui qu’on n’attendait plus. Celui qui laissait la place à la culpabilité.
Il se leva, s’approcha du lit, et posa sa main doucement sur le front du blessé. Il était tiède. C’était bon signe… non ?
— J’te jure… si tu te réveilles, je réparerai tout ça. Tout.
Il s’écarta lentement, reprit sa place dans un coin de la pièce, en silence, les yeux rivés sur lui. Attendant. Redoutant. Espérant.
Et dehors, quelque part dans les ténèbres, l’entité… souriait.
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