Des soirs
Je suis plus beau
avec les bras
ensanglantés
mes yeux humides
et mes seins tirés
aplatis par le tape
je vaux mieux
quand ma chair
est tiraillée
par les plaies
les dissensions
et la haine
plus l’on voit mes os
plus je gagne des points
plus le poids est bas
plus je suis à la hauteur
peut-être que les cicatrices
une à une
sur ma peau
sont le nombre de ma valeur
plus il y en a
mieux je suis
elles grattent
elles crient
elles sont rouges
du sang
que je veux à tout prix
sortir
lâcher cette putride
essence
qui me rappelle la vie
et mon existence
je veux l’arracher
cette peau imparfaite
je veux des lames
qui coupent
jusqu’aux organes
aux muscles
et aux tendons
une lame
qui glisse le long de mes membres
et qui arrache
déchire
écarte
je veux une lame
qui brise tout avec elle
surtout moi
seulement moi
qui s’enfonce si fort
que mes cicatrices
s’érigent comme des murailles
aux bords acérés
je veux une lame
qui me coupe
en continu
qu’elle coupe
chaque parcelle de peau
que je ne sois plus
que sang, plaies, ouvertures et dégâts
je veux une lame
qui fasse tomber ma poitrine
qui rapetisse mes hanches
mon ventre
et mes cuisses
et le bleu de mes yeux
se noie dans mes pupilles
mes cils submergés de pluie
mes iris éteints
faussement satisfaits
de mon dégoût
jeté contre mon corps
mes épaules
dévoilent mes os
donnez-moi l’opportunité
de les briser
à coups de marteau
à coups de pieds ou
de poings
je veux craquer la squelettique
de mon corps
les fondations sur lesquelles
il s’est construit
que je le déconstruise
pour son raté
sa malexistence
pourquoi ne peut-on pas
serrer dans ses mains
la tendresse lisse
des os
avant de les tordre en deux
comme un vulgaire déchet
je suis ma propre poubelle
mes seins me le crient
sensation des bandes
que j’accroche à ma chair
pour mieux les faire
taire
je veux me fondre
dans le déni
de ces bosses inconnues
qui parsèment mon torse
tirer encore plus fort
la peau
qui tente de se remettre
des bandes de la fois d’avant
le tape comme des pansements
que l’on applique
comme des calmants
légèreté ou raideur
dans mes mouvements
sentir sous mon T-shirt
la moindre bosse
d’une poitrine
désertée
comment peut-on comprendre
une chose aussi détestée
et abominable
sur son corps
qu’elle s’en aille
qu’elle sente le poids de ma rancœur
face à sa rondeur
tirer et abîmer la peau
hydrater, hydrater, hydrater
faire attention à ne rien arracher
ou au contraire
arracher
arracher
arracher
et peut-être que la non-binarité
partira avec
il y a des soirs
où je ne suis rien d’autre
qu’une lame
et des bras en sang
un torse dénudé
et son tape exposé
un visage lassé
et ses yeux abandonnés
il y a des soirs
où je veux
juste
cesser d’exister.
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