Et j'imagine
Et j’imagine
que l’on va me courir après
dévaler les escaliers à ma suite
marcher derrière moi pour me rattraper
Et j’imagine
qu’on me rattrape
qu’on ne m’oublie pas
qu’on sèche mes larmes
et me dise que j’en vaux la peine
Et j’imagine
qu’on attend derrière ma porte
pour me retenir
qu’on m’envoie un message
à peine les mots « pas possible » dits
qu’on ne me laisse pas partir
Et j’imagine
être à la hauteur
assez
est-ce continuellement
de ma faute
Et j’imagine
que les relations soient simples
mes pensées positives
que mon corps sache se mouvoir
et mes mots se dire
je suis une rature relationnelle
Et je sais que c’est pour ça
qu’on ne me retient pas
ne me court pas après
que ma porte reste close
et les conversations silencieuses
Et je sais que c’est pour ça
parce que je ne sais
ni rassurer
ni communiquer
je répète les lettres
dans ma tête
comme si elles allaient jaillir
je ne sais pas dire
que ça va aller
que je vais rester
qu’on va prendre le temps
qu’il ne faut pas s’inquiéter
à la place
je reste
muet
sur le canapé
le cœur trop plein ou trop vide
je ne sais plus
à attendre que quelque chose
me remplisse
ou me vide
les yeux perdus
dissociation comme seule survie
je marche
devant les gens
les larmes sur le bord des yeux
et du cœur
et du corps
les veines rentrées, hibernées
pleurer pleurer pleurer
sans jamais mordre
sans jamais en vouloir
comment pourrai-je
détester
les autres cœurs
qui ont mal peur pleurent
et les voitures ne daignent pas m’emporter
j’attends sagement le feu vert
pour traverser
quitter sa rue
ou la nôtre finalement
laisser derrière mes eaux
l’océan de notre peut-être amour
j’avais si peur
et toi aussi
mais j’ai voulu
et pas toi
et c’est pour nous protéger
tous les deux
mais ça fait mal
ta protection
je me suis senti si vide
si froid
si dur
j’ai souhaité que mon cœur
devienne rocher
en quittant
notre rue
retour à ma misère
la vie m’a semble si pâle
si rien
si inutile
et j’ai encore les larmes qui coulent
je voulais que tu m’aimes
je voulais que tu essayes
je voulais que tu te rates
et tu te rattrapes
ou que tu te rattrapes
et tu te rates
peu importe
je voulais
de nous
qu’on existe
un peu
je voulais que tu y crois
que tu penses que ça en vaut la peine
et coup d’œil sur le téléphone
j’attends toujours un message
ou tes doigts sur ma sonnette
Et j’imagine
que je ne m’attache pas trop vite
que je ne place pas trop d’espoir
que j’attends patiemment
et que je sache quand ça va faire mal
la poitrine égratignée
je reste désolé
désolé que ça ne puisse pas fonctionner
qu’on soit un peu trop brisés
pour savoir s’aimer
désolé de ne pas être
pour qu’on veuille de moi
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