Jamais elle n'avait été aussi mal. C'était une véritable torture de se sentir si faible et insignifiante. Prisonnière d'un simple bocal rond, elle voyait le monde sombre qui l'entourait de façon totalement déformée. Cela avait un côté tellement terrifiant qu'elle aurait préféré vivre sans pouvoir contempler ce qui l'attendait si elle arrivait un jour à s'enfuir de cette zone dont elle ne pouvait s'échapper.

Elle avait l'impression d'être complètement comprimée. Elle ne pouvait qu'à peine se tourner et se retourner sur elle-même. Chaque seconde semblait plus douloureuse que la précédente, ajoutant de la pénibilité à son fardeau.

Le pire était sûrement lorsque d'innombrables paires d'yeux se posaint sur elle avant que des doigts boudinés et élargis par la forme de son bocal ne viennent créer d'assourdissantes vibrations en tapant à son carreau courbé

Whamarine était une créature née de l'eau. Elle était l'eau. Et sa curiosité pour le monde des bipèdes l'avait emmené à devenir un simple monstre de foire… Elle n'aurait su dire depuis combien de temps qu'elle était enfermé dans ce cirque glauque… Des semaines ? Des mois ? Des années ? Elle ne faisait que survivre difficilement, elle n'arrivait pas à suivre la trame du temps.

Lorsqu'elle arrivait à sombrer le plus profondément possible dans ses méditations afin d'éloigner ce sentiment de misère, elle replongeait dans ses souvenirs. Ces souvenirs avaient un gout de liberté.

Elle se revoyait encore clairement au fin fond de sa clairière, à sauter le long du ruisseau qui serpentait entre les arbres et descendait entre deux collines sauvages. Son domaine s'étirait sur plusieurs longs kilomètres et elle mettait quelques heures à le parcourir du début des cascades dans les montagnes, à sa fin, l'embranchement d'une rivière plus large mais qui n'était plus son territoire.

Repenser à ce ruisseau d'eau fraiche et claire, à ses rapides et ses angles caillouteux l'empêchait sûrement de devenir folle… Cependant, même si elle s’en souvenait avec force, elle ne pouvait changer la réalité, et lorsqu'elle ouvrait les yeux, son cauchemar reprenait vie, à chaque fois…