Chapitre 15 - Appartement vide
Chaque retour à la réalité est de plus en plus brutal, l’appartement semble devenir chaque fois plus exempt de vie.
Un effluve de renfermé.
Pourtant, seule la pièce parentale empeste cette odeur de temps arrêté.
Le noir profond de l’heure avancée de la nuit n’arrange rien. Tout est sombre, comme la chambre de sa mère.
Un relent de mort.
Une succession de frissons frigorifie son corps frêle. La rouquine se change aussi vite que possible, engourdie par le froid qui fait vibrer la moindre parcelle de sa peau. Elle s’emmitoufle dans son pilou-pilou puis se pelotonne sous la couette.
Le sommeil tarde à la cueillir, mais il s’invite enfin alors qu’elle se focalise sur la sensation des caresses de Romain dans ses cheveux et du goût de ses lèvres.
Le lendemain matin, Maéline s’affale sur son lit après avoir commandé les courses et étendu une machine.
Profond soupir.
Sa main se tend vers son téléphone. L’excitation la gagne à l’idée des mots doux de son petit ami dès le réveil. Le nom d’Emma s’affiche sur l’écran de veille. Le doigt glisse sur le smartphone avant qu’elle ne lise :
-Salut sis’, on se fait une soirée film et pizza ?
-Là, pas là ?
-Ciao ma belle, désolée je viens de voir ton message. J’ai passé la soirée (et une partie de la nuit) chez Romain. On se fait ça mardi soir ? T’as qu’à venir à la maison. C’est toujours aussi calme ici.
-Coucou Maé, faudra que tu me racontes ! Ses parents étaient ok pour que tu passes déjà la nuit chez eux ? Comment tu fais ? Y’en a qui ont de la chance. J’aimerais que les parents de Tom soit aussi ouverts, c’est la galère ! Trop hâte que tu me dises tout mardi !!! Tu passes commande et je récupère les pizzas en venant chez toi. Kiss kiss !
-Tu vas encore me soûler que j’aurais dû prendre l’offre du moment et pas la poulet-curry ou inversement. Allez, vendu ! T’en es où de ton code ?
-… T’es sûre de vouloir savoir ?
-Demain, on se fait quelques séries et on s’envoie les scores.
-J’espère que ça va nous booster, marre de ce bourrage de crâne !
Cet échange lui redonne le moral et Maéline se motive à terminer deux séries de questions. À peine ses révisions terminées, l’adolescente ressent de nouveau le manque. Sa main se tend vers le téléphone, de façon automatique. Elle glisse son doigt, ouvre sa messagerie et commence à taper un sms à Romain.
-Salut ! J’espère que tu as fait de doux rêves ce matin. Ici, c’était révisions du code. On se revoit quand ? Tu me manques déjà. Bon dimanche. Ta belle.
Elle imagine déjà son petit ami remettre ses lunettes en place pour lire le message et lui répondre dans la foulée. Déçue de ne pas avoir de retour immédiat et contrariée de ce sentiment absurde car il doit sûrement dormir encore à cette heure-là, Maéline met à jour quelques papiers, porte une collation à sa mère et fait la poussière dans le salon. Lorsqu’elle pose les chiffons dans le bac à linges sales, sa main se dirige de nouveau vers le smartphone. Aucune réponse. L’amertume grandit. Comme elle aimerait déjà se sentir choyée par les mots de son amant ! Elle soupire. Autant s’occuper avant de pouvoir à nouveau compter les jours les séparant du prochain rendez-vous.
Elle s’offre le plaisir d’un brunch avec œufs brouillés, café au lait et tartine de beurre et miel tout en profitant de la rediffusion des épisodes de la série NCIS. La jeune fille enchaîne dans le milieu d’après-midi avec les réseaux sociaux et les derniers tutos maquillage postés par les instagrameuses qu’elle suit. Romain n’est jamais loin dans son esprit, elle se demande ce qu’il peut bien faire au même moment, s’il pense à elle, s’il la trouvera toujours aussi belle la prochaine fois…
Puis c’est le moment de préparer le dîner, Maéline s’installe devant une émission de société pour préparer les légumes en vue de cuisiner une ratatouille. Le thème aborde les adolescentes-mères qui doivent assumer études et maternage en parallèle, avec pour certaines les conflits parentaux par-dessus.
Lorsque la ratatouille est presque prête, la jeune fille fait cuire de la semoule puis sert un plateau qu’elle porte dans la chambre où sa mère dort. Elle n’a pas le courage de la réveiller. Maéline pose son chargement, regarde le plateau du midi presque vide et décide de la laisser dormir. Il est rare que Brigitte mange autant, elle n’aura donc probablement pas faim avant un moment. Elle fait l’échange avant de refermer doucement la porte et de débarrasser les restes et de s’installer dans le sofa avec son plateau pour manger en finissant de regarder son émission.
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