Lorsque Josette ouvrit les yeux, elle vit trois beaux gaillards et s’interrogea : était-elle au paradis ?

 En pleine forme, elle se redressa brusquement pour se lever, mais le plus jeune des types l’en empêcha et déclara :

— Restez sur le lit madame !

 En observant les lieux, Josette constata qu’elle était dans sa chambre. Après avoir croisé le regard de son amie Monique, heureuse, elle s’exclama :

— Je suis vivante !

 D’un coup, la vieille dame se figea. Les souvenirs de son agression affluaient : cette violence, les coups de poings dévastateurs, ses os qui craquaient, les chocs, la douleur, atroce, ce sentiment de solitude.

 Josette regarda ses mains et ses vêtements souillées de sang séchés, elle ne comprenait pas.

 Pourquoi n’était-elle pas morte ?

 Elle se rappela d’un gars qui l’avait portée dans ses bras. Son corps était doux et chaud. À son contact, sa douleur s’était estompée. En la déposant dans son lit, d’une voix douce, il avait soufflé :

— Josette, le Grand Canard te remercie, et par sa puissance tu seras guérie. Repose-toi…

***

 En remontant au volant du camion, Jimmy était perdu dans ses pensées. En dix ans de service, il n’avait jamais vu une telle chose. Cette petite vieille maculée de sang, qui était enfermée à double tour dans sa maison, n’avait pas une égratignure. Comment l’expliquer ?

 Face à l’étonnement général, durant quelques secondes, Josette s’était mise à délirer en parlant de puissance et de Grand Canard, mais elle s’était vite ressaisie. Avec son sourire, sa mobilité, sa répartie, sa tension de jeune fille et son rythme cardiaque parfaitement régulier, elle avait su convaincre les pompiers.

 Rodrigue et Max s’installèrent dans leur siège. Sur le perron, éclairé par des spots, Monique et Josette les saluèrent énergiquement. Étonné par l’énergie que dégageaient ces vieilles dames, en retour, ils levèrent leurs mains.