2.7

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J’arrive chez Doron. Je lui tombe dans les bras. Ce qui se passe avec Pierri ne change rien à mon amour pour mon mec. Avant l’arrivée d’Arnaud et de Louise, je lui raconte ma semaine, ce qui s’est passé, dans quel état je suis. Il me regarde :

— C’est vrai, il se passe quelque chose. Tu es plus beau, plus grand, mais en même temps je vois un peu de détresse.

— Oui, c’est ça !

Nous sommes interrompus par nos invités. Arnaud reste mon premier amour. Louise est toujours amusée par nos effusions de gamins. Que ça me fait chaud au cœur de le voir, de les voir !

La conversation part sur cette putain d’épidémie qui nous bouffe la tête avant de nous tuer. Puis chacun raconte son confinement. Avec Doron, nous éludons les détails, indiquant simplement que nous l’avons passé avec des amis. Je bous ! Je ne peux pas attaquer directement sur ma préoccupation majeure.

Enfin, je suis invité à parler de ce nouveau projet, qui va durer au moins cinq ans, d’une importance primordiale pour évaluer les changements de végétation dus au réchauffement climatique. La discussion est sérieuse, quand, enfin, j’entends Arnaud dire :

— Et avec Pierri, comment ça se passe ?

Je décoche un coup de pied à Doron pour qu’il se taise. Il me fait un petit signe de l’œil. Je l’adore !

— Bien, très bien. Vraiment un mec sympa !

— Tu sais que je le connais ?

— Oui, il me l’a dit. Comment tu le connais ?

— Facilement. C’est un cousin éloigné généalogiquement, mais proche. Enfants, nous avons passé plusieurs vacances ensemble. Il est un peu spécial, non ?

— Comment ça ?

— Quand on ne le connait pas, il ne parle pas. Jamais il n’abordera un inconnu. Ce n’est pas de la timidité. Moi, je le trouve super mignon. Toi, il a dû te faire craquer. Mais même les gens « normaux » (un clin d’œil, bien inutile, remplace les guillemets) sont attirés par lui et cherchent sa sympathie. Il a horreur de ça ! Par contre, dès qu’il connait la personne, il est très ouvert, très dynamique. Aussi, par moments, on a l’impression qu’il est malheureux, qu’il lui manque quelque chose. Il rit, blague, joue et soudain plonge dans la tristesse.

— Il est bipolaire ?

— Non, pas du tout. Je crois qu’au siècle dernier, il aurait été un aventurier, un explorateur. Ou missionnaire, car il est super catho !

— Intégriste ?

— Non. Très croyant. Il a été scout, très longtemps, jusqu’à son intégration à l’école.

Pierri en scout ! Avec un short, comme je l’aime ! Je dois me calmer.

Doron et Louise se taisent, écoutent. Ils sentent que cette conversation est le clou de cette soirée, sa raison, sans savoir pourquoi.

— Tu veux dire qu’il cherche quelque chose ?

— C’est l’impression que j’ai. Je l’adore. Il est gai, naturel. Tout est facile avec lui, jamais un reproche, un remords.

— C’est vrai ! Tout est facile avec lui, c’est ça ! Tu lui avais parlé de moi ?

— Oui ! J’ai été surpris quand il m’a cité ton nom. Le monde est vraiment petit !

— Notre monde et notre spécialité ne sont pas très grands, ce n’est pas si étonnant.

— Quand même. Mon meilleur ami et mon meilleur cousin qui se retrouvent à travailler ensemble. Et à vivre ensemble.

— C’est vrai que la semaine, on ne se quitte pas ! Qu’est-ce que tu lui as raconté sur moi ?

— Usem ! Ce que je pense de toi ! Du bien, beaucoup de bien. Mon amitié pour toi. Rien de spécial !

— Tu lui as dit que j’étais gay ?

— Sans doute ! C’est quand même une de tes caractéristiques principales et tu ne t’en caches pas ! En plus, comme vous allez vivre deux mois ensemble et qu’il est dans tes gouts, si je me souviens bien, autant l’avertir pour qu’il se protège !

— T’es con !

La conversation diverge ensuite, relâchant ma tension.

La nuit, je suis insatiable. Doron me laisse faire, heureux de cet acharnement. Au matin, il me dira :

— Usem, cette nuit, c’est avec moi que tu as baisé ?

— Quelle question ! Bien sûr ! J’avais juste une faim de loup, après une semaine de jeûne.

— Et d’excitation ?

— Oui, c’est vrai. Mais tu sais, quoi qu’il arrive, tu resteras toujours mon mec !

— Je sais ! Tu me sembles quand même un peu chaviré !

— Oui, comme quand j’avais quatorze ans !

— C’est beau de rester jeune !

Le samedi, je passe à l’ActiveX pour voir Alex. Son accueil est éclatant de chaleur, de plaisir. J’ai un petit frère, ou un filleul. J’aime que cette relation soit apparue, j’aime ce garçon.

Mabula et Charles semblent bien fonctionner ensemble, au moins pour l’hôtellerie. Je ne cherche pas à en savoir plus.

Le dimanche, je vais déjeuner avec mes parents. Surprise, Manon est là. Mon plaisir est double. Décidément, cette fille me plait. Le sentiment est partagé avec douceur. Mes parents ont trouvé une fille, semble-t-il, comme moi un frère ! Je suis presque jaloux de l’empressement qu’ils montrent à Manon. Ils ne tarissent pas d’éloges à son égard, sur sa gentillesse, sa créativité. Elle semble heureuse. Je me rends compte que je ne sais pas grand-chose sur elle, son enfance, ses parents. J’ai l’intuition qu’elle trouve une chaleur auprès de mes parents qui lui a manqué.

Dernière nuit avec Doron. Sa présence me fait du bien, me calme. Il me susurre :

— Impatient de retrouver ton ange ? Ou ton dieu ?

Je ne peux le nier.

Tu comprends que j’étais piégé ! Le destin était tracé.

J’étais une victime tellement consentante !

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