Nous avons passé la semaine à travailler, à parler, à nous caresser, à faire l’amour. Cela était bizarre, car nous étions hors de tout, dans notre monde. Chaque seconde était une plénitude. Le temps était distendu et empressé. Le vendredi est arrivé, si vite, après une semaine si intense.

Sur le quai de la gare, nous nous sommes embrassés, intensément, indifférents aux voyageurs pressés de prendre leur métro. En nous disant simplement

— À demain soir !

Mes retrouvailles avec Doron furent magnifiques. Il comprit dès le premier regard que nous avions franchi le cap avec Pierri. Il aurait pu en être jaloux, il en était aussi joyeux que moi. Doron, le magnifique ! Faire la connaissance de Pierri fut acceptée avec joie : il voulait connaitre cette personne qui rendait son amour si heureux. La suite passa beaucoup plus mal : l’annonce du diner à quatre ne l’enthousiasmait absolument pas ! Il n’avait pas envie de tenir la chandelle avec Clarisse, à regarder les deux tourtereaux se manger le bec ! Il me fallut user et abuser de mon charme et de ma connaissance de son caractère pour le faire céder, lui expliquer le besoin de construire à quatre nos relations croisées. Il n’était pas question que je le quitte et je voulais continuer à vivre pleinement ma relation avec Pierri.

Il me fit remarquer que c’était toujours la demande de celui qui allait quitter l’autre pour son nouvel amour ! Oui, c’était un lieu commun, mais pas pour moi ! C’était tellement différent de ce qu’avait vécu le reste de l’humanité…

De toute façon, il n’était pas question de sexe : Clarisse n’était certainement pas au courant de ce qui se passait ! Il savait d’expérience qu’il n’aurait pas la victoire. Il céda pour laisser la place à nos retrouvailles physiques. C’était tellement différent de ce que j’avais vécu avec Pierri. Les deux étaient formidables !

Le samedi soir, nous nous sommes pointés chez Clarisse et Pierri, endimanchés, bien comme il faut. L’accueil de Clarisse est chaleureux. Pierri serre Doron dans ses bras, lui murmure quelque chose à l’oreille. Doron rougit de plaisir en me regardant. Comment ce diable de Pierri a-t-il obtenu un tel résultat en deux secondes ? Il ne faudrait quand même pas qu’ils se mettent ensemble en me laissant dans le fossé ! Leurs regards réciproques vers moi me rassurent et me font grimper le cœur.

Le diner est agréable. C’est Pierri qui a cuisiné. Quel don lui manque-t-il ? La conversation est ardue, surtout entre Pierri et Doron, sur des questions de biologie végétale puis de virologie très pointues. C’est ce que j’aime avec ces individus, la profondeur de leurs conversations et leur hauteur de vue, la somme de leurs savoirs.

Ils se font face, ce qui m’évite d’être ébloui par mon soleil et de contempler Clarisse. Elle n’a pas le charme de Manon ni la fraicheur de Charlotte, mais elle est bien plaisante à regarder. Pendant que nos hommes débattent (j’ai failli écrire s’ébattent, mais finalement, il y a de ça !), j’aide Clarisse à débarrasser.