3.3
Dans mon esprit, j’étais resté sur cette nuit épouvantable. Je voulais savoir s’il s’en souvenait, mais je ne savais comment aborder la question. Je m’allongeais dans le lit, l’écoutant me raconter ses camarades. Il évitait soigneusement de parler de son été. Intéressant !
Obnubilé par ce passé, j’attaquais doucement :
— Tu sais, Alex, ça ne fait pas longtemps que l’on se connait, mais je tiens beaucoup à toi !
— Oui, moi aussi. Heureusement que vous étiez là avec Manon quand papa est tombé malade. Je crois que je n’aurais pas su quoi faire !
— Oui, je comprends ! Tu te souviens des premières fois que nous nous sommes rencontrés ?
— Je préfère ne pas en parler ! Je n’étais pas très bien dans ma tête alors !
— Je sais ! Pourtant, tu sais, la première fois que je t’ai vu avec les vêtements de ta mère, tu m’as fait grande impression !
— Comment ça ?
— Tu étais beau, ou belle, avec beaucoup de grâce et de charme…
— Je ne savais plus qui j’étais… Maman me manque tellement… Mais être dans ces vêtements, ce n’était pas la retrouver…
— Tu étais complètement perdu, c’est normal ! Tu te souviens de ce que tu nous as raconté à Manon et à moi, quand tu étais perdu ?
— Non, pas trop ! Qu’est-ce que je vous ai dit ?
— Ton enfance dans cet hôtel que tu aimais bien te déguiser, que tu étais la mascotte de tous les clients…
— Ah, oui ! Cette période était super ! Mais à un moment, je n’ai plus eu envie et tout ça me faisait horreur.
— Quand tu as changé, que tu as commencé ta puberté ! C’est normal, c’était plutôt bien que tu ais arrêté. Tu sais, j’en ai parlé avec ton père. Il parait que des clients t’embêtaient un peu trop…
— Oui. Je n’aimais pas quand il me caressait entre les jambes, ou dans les fesses. Mais ça ne durait pas longtemps. Je savais me défendre et j’appelais mes parents. Tu sais, il ne s’est jamais rien passé de grave.
— Je te crois ! C’est bien. N’empêche que cela ne se fait pas sur un enfant ! Mais, dis-moi, tu étais intéressé par ce qui se passait dans les chambres !
— Oui, drôlement ! Ça m’amusait de voir les gens faire ces drôles de choses ! Je sais que je n’avais pas le droit, mais cela m’intéressait. J’avais envie d’être grand pour faire comme eux. J’en avais parlé une fois au collège ! Là, j’ai compris que je ne vivais pas comme les autres, que je n’étais pas comme eux. Alors j’ai décidé d’apprendre, ici, à l’hôtel ! Par exemple, j’ai vite compris qu’il n’y avait pas de différences entre les hommes et les femmes !
— Ah bon !
— Ben oui, chacun fait avec un autre qu’il soit un homme ou une femme !
— Vu comme ça, tu as raison ! Pour le sexe, seul le plaisir compte ! Mais tu n’es jamais rentré ? Tu faisais que regarder ?
— Oui, bien sûr ! C’est toi qui m’as fait entrer pour la première fois ! Ce jour-là, j’ai décidé de te prendre comme grand frère !
— Hmm ! Ce n’est pas ce que j’ai fait de mieux !
— Pourquoi ?
— Parce que tu étais un ado et nous des adultes ! Tes expériences, tu dois les faire avec des gens de ton âge.
— Mais tu étais gentil, Manon aussi, les autres aussi !
— Tu sais, tu nous caressais et il ne s’est rien passé, c’était mieux comme ça ! Tu te souviens quand ton père est venu ?
— Oui, vaguement. Je le vois entré, puis, après, je ne me souviens de rien. Il s’est passé quelque chose ? J’ai été avec vous ?
— Non ! Tu es resté à regarder !
Charles nous avait fait avaler des comprimés. J’avais été le seul à ne pas en prendre, mais Alex en avait avalé un. Pour ce geste, j’avais retiré mon estime à Charles. Pas à son fils. J’avais constaté sur mes partenaires une relative amnésie le lendemain. Pour Alex, elle semblait plus forte. Tant mieux ! Il ne savait même pas qu’il n’était plus puceau, plus du tout, pour tout ! J’étais rassuré. Ma seule crainte est que ce souvenir soit simplement refoulé et revienne le tourmenter par la suite… Pour l’instant, il semble préoccupé par autre chose.
Je ne suis pas psy et je n’y connais rien ! Mais j’avais quand même une responsabilité vis-à-vis d’Alex, il me semble.
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