Souvenir de ruines submergées
« Pour le moment, tout va bien » se dit-elle, ses jumelles à longue portée vissées sur ses yeux, elle observait le site avec circonspection, elle pensa qu’il ne pouvait y avoir de meilleur moment que maintenant, c’était au plus fort de midi, sous un soleil éblouissant, il fallait bouger.
D’après les informations, la réunion devait commencer sous peu. Surprise par le peu de mouvement dans le secteur, elle se décida à inspecter ses environs.
Une odeur de brûlé flottait dans l’air, elle se laissa guider par son instinct et se dit qu’après tout, elle n’avait rien à perdre, qu’elle avait fait tout ce qu’il fallait pour rester discrète, compte tenu des circonstances.
Cette odeur persistante l’incita à accélérer le pas, c’est alors qu’au détour du chemin, en arrivant au théâtre antique, elle les vit, fidèles à l'image qu'elle en avait gardée, seules les colonnes des ruines étaient apparentes.
Tout autour le paysage avait changé, à tel point que les rails du tramway apparaissaient çà et là, entre les mottes de terre rouge que soulevaient les taupes ou autres mammifères souterrains, tout du moins c’est ce qu’elle supposait.
Que s’était-il passé depuis son dernier séjour ?
Elle avait beau fouiller dans les méandres de sa mémoire, aussi loin qu’elle puisse remonter, elle ne se souvenait pas que le colonel lui ait mentionné quoi que ce soit au sujet de ruines submergées.
Elle devait bien se rendre à l’évidence, le site, qui avait servi de base à la dernière mission, était vide, pourtant ce qu’elle avait sous ses yeux, n’avait rien à voir avec les informations mises à sa disposition, via le canal habituel.
Aucune trace de combat, aucun objet ne jonchait le sol, aucun véhicule abandonné, aucune trace de bivouac, tout portait à croire qu’ils avaient été dématérialisés, mais comment ? Par qui ? Et surtout pourquoi ?
Elle pensa que la température étouffante et la fatigue du voyage avaient dû altérer la perception de la situation, malgré son impatience, il lui fallait se reposer absolument et surtout trouver un moyen de communiquer avec le reste de l’équipe.
Son canal de communication désespérément vide, aucun signe de vie, aussi bien sur la planète que dans l’espace.
Pourtant la réunion de tous ces dirigeants était bien annoncée en ces lieux mais où étaient-ils donc passés et ce maudit Président entouré de son mystérieux escadron ?
Tout cela n’avait plus aucun sens, elle aurait dû être rejointe par son équipe, tout avait été chronométré minutieusement et le coup d’État était imparable, les forces alliées lunaires attendaient le signal pour débarquer et prêter main-forte aux insurgés.
Normalement la résistance devrait reprendre le pouvoir et jeter tout ce beau monde aux oubliettes.
C’était l’affaire de quelques heures, une fois les grosses têtes au tapis, le reste de la troupe aurait déposé les armes et la démocratie reprendrait ses droits. Mais que c’était-il passé ?
Les informations étaient pourtant claires, le jour, l’heure, le lieu, tout concordait et pourtant il n’y avait pas âme qui vive ;
Y aurait-il eu une erreur de programmation lors du transfert ? Aurait-elle sauté dans le temps ? La réunion aurait-elle été reportée ? Le Président Cortez aurait-il été informé par une taupe ?
Toutes ces questions se bousculaient dans sa tête, elle devait absolument faire le point.
Elle trouva un petit abri, partiellement à l’ombre, s’assit pour y réfléchir, tout près d’elle, sur le calcaire éblouissant, un adorable petit caméléon la méprisait de toute sa grandeur. D’où sortait-il ?
Un animal de cette espèce n’avait pas sa place en ces lieux.
Tout cela devenait de plus en plus curieux !
Qu’allait-elle encore découvrir ?
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