Retour en marche… (Suite)
La nuit fut reposante, le calme inhabituel de la montagne aidant au repos, mais le soleil n’est pas encore levé lorsque je suis réveillé par un torrent de baisers.
« -Mon cœur ! Allez, debout ! On va louper le lever de soleil… Prend ton appareil !!!
- Fais chier le soleil…. Il peut pas attendre ?
- Bouge-toi !
- Ouais… C’est bon… »
Je m’extirpe péniblement de mon sac de couchage, la fraîcheur me saisit, et vu le réveil, je pense que la journée va être horrible. J’enfile veste et pantalon, prends mon appareil photo, et file hors de la tente rejoindre Charlène, assise sur un rocher au bord de l’eau, juste à temps pour capter les premiers rayons de soleil, la lumière est magnifique, irréelle, les premiers reflets sur l’eau limpide donnent une impression de rêve, révèlent une légère brume qui s’élève de la surface.
Une nouvelle fois, l'atmosphère fabuleuse qui règne ici me fait me demander si nous sommes bien à quelques kilomètres de la civilisation, si proches des villes et des voitures, si nous sommes véritablement sur terre. Nous profitons en silence du spectacle que nous offre, une nouvelle fois, la nature, un spectacle si beau et si apaisant que je me demande si j’ai vraiment envie de quitter cet endroit.
« - Chou, lève-toi, prend la pause.
- T’es sérieux ?
- Oui, j’ai envie de te photographier ici, sur ce rocher.
- Fait chier, je déteste ça…
- M’en fout ! Bouge ! »
Suivant mes indications, elle joue le jeu et je dois dire que certains clichés me plaisent vraiment, debout sur le rocher à contre-jour dans la brume, cambrée de profil dans la lumière du soleil levant, assise me tournant le dos, on ne distingue que sa silhouette mais cela donne des photos magnifiques.
« - Tu veux pas que je me foute à poil aussi ?
- Même pas cap’ !
- Tu parles… »
Même s’il fait presque froid, elle me prend au mot et commence son effeuillage, et je dois dire que le dernier cliché où elle est de dos, à contre-jour, debout sur son rocher, les bras levés et les jambes légèrement écartées, les cheveux tombant sur ses épaules, est un des plus beau que j’ai pu réaliser.
« - Merci mon amour, t’es magnifique.
- Fais voir.
- On matte ça devant un petit café ?
- Oh que oui, merci de la proposition. Tu t’en occupe ?
- Avec plaisir, rhabille-toi avant de choper la crève. »
Devant nos cafés brûlants, nous regardons ensemble les photos, je dois dire que sa réaction me surprend, elle adore, et je suis aux anges.
« - Alors ?
- J’adore, elles sont magnifiques, et on me reconnaît pas dessus. Bravo mon chéri.
- Merci, je sais que t’aime pas ça alors j’ai fait en sorte qu’on ne distingue pas ton visage. Je dois dire que j’ai réussi exactement ce que je voulais faire grâce à toi.
- Ça reste entre nous ?
- Heureusement, je vais pas partager ça…
- T’as intérêt…
- Bon on remballe ?
- On se lave avant ?
- Si tu y tiens… Je pense pas que l’eau soit à la bonne température pour un bain…
- Regarde. »
Elle se déshabille de nouveau, un gant de toilette dans la main, et se frictionne vigoureusement avec l’eau du lac, je la rejoins avec beaucoup de réticence, l’imite sans réfléchir, et nous plongeons sous la tente pour nous réchauffer avant de nous habiller.
Une fois notre campement démonté, nous rechargeons nos sacs et prenons le chemin du retour, j’ai les jambes lourdes, mais après quelques minutes je suis son rythme sans ciller. Nous rejoignons les lacs Escurs, entre lesquels passe le sentier, puis après un dernier passage assez raide nous atteignons le collet de Peyron, point culminant de notre périple. Ici le panorama est époustouflant dans toutes les directions, vues sur les alpages, les lacs, la vallée de la Durance et les sommets enneigés au loin.
S'ensuit une descente toute aussi raide dans un pierrier, avant d’atteindre le fond du vallon qui nous reconduit en direction de la forêt en passant par de nouveaux alpages ou nous rencontrons un nouveau troupeau.
Il n’est même pas dix heures, quand nous retrouvons l’ombre des arbres et sa fraîcheur avec plaisir, après avoir rejoint le hameau des Giets. Nous replongeons dans les bois où la descente régulière, quoiqu’assez pentue, nous rapproche de l’arrivée. Au loin le ruissellement des torrents accompagne notre chemin, et après avoir suivi une piste sur un kilomètre nous retrouvons sentier et torrent, ou nous nous accordons une pose trempette de quelques minutes pour nous rafraîchir et grignoter un morceau avant de reprendre notre route.
Il est tout juste 13h passées lorsque nous rejoignons la voiture, où nous jetons les sacs à dos, pour nous asseoir, bien entamés par ces deux jours intensifs.
« - Bouclée en moins de 10h30… Bravo mon amour, je pensais pas qu’on y arriverait en moins de 12h…
- J’en ai pour une semaine à récupérer…
- Mais non… On rentre, une bonne douche, on mange vite un morceau, et piscine, tu vas voir, demain t’auras même pas mal aux jambes.
- Tu veux ma mort toi ??? Je préfère une bonne sieste pour récupérer…
- Je t'accorde une demi-heure…
- Je prends… Après on fait ce que tu veux… »
La fin d’après-midi à la piscine est très agréable, et très efficace, les jets massant, bains bouillonnants, le jacuzzi permettent de délasser tous nos muscles. Il ne manque qu’une petite séance de massage pour conclure le tout, mais ce n’est pas prévu au programme.
La soirée se poursuit comme à notre habitude, une bonne bière sur nos transats et débriefing du week end, devant une bonne pizza.
« - Encore merci ma puce pour ce super weekend… C’était génial, magnifique, le bain hier soir j’ai adoré, le calme, le lever de soleil ce matin, les paysages… Trop bien… Je m’en croyais pas capable, mais j’y suis arrivé.
- A vrai dire, j’y croyais pas, moi non plus, je pensais qu’on serait obligé de faire demi-tour hier après-midi, ou que je devrais finir seule et prendre la voiture pour venir te chercher aux Giets. Mais t’as réussi comme un grand… La prochaine…
- Non, pas de prochaine, j’adore randonner avec toi, me baigner nu dans les lacs ou les torrents, dormir sous la tente et tout, mais là…
- T’as pas le choix… On a fait un hameau tranquille, un lac avec nuit sous la tente, la prochaine c’est glacier avec nuit en refuge… Si tu me suis pas, c’est pour rentrer chez toi…
- Tu me fais du chantage ?
- Non… En fait si…
- C’est pas très joli tout ça Mademoiselle Rivière, je vais en toucher deux mots à votre directeur…
- Tu parles… Je suis sa fifille adorée… Ne l'oublie pas…
- Bon, j’accepte… Sa fifille adorée ? T’es fille unique ?
- Ben on peut le voir comme ça… Mon grand frère, Maxime… Il a jamais été très proche de moi… Mes parents l’ont envoyé en Italie quand il a commencé à faire le con au collège… Depuis c’est tendu avec eux… Et moi… Je l’ai jamais vraiment connu… On a dix ans d’écart… J’avais quatre ans quand il est parti… Depuis je l’ai à peine vu quand il venait pour les fêtes, ou les vacances, il préférait retrouver ses potes… Et ça fait des années qu’il est plus venu, il a une gonzesse là-bas…
- Pas cool… Mais t’as pas envie de le voir ?
- Bien sûr que oui, mais je le connais pas en fait, et je sais pas comment faire… Pour le recontacter…
- T’as un numéro pour le joindre ?
- Ouais, mais bon… ‘ Allô… Salut Max, je sais pas si tu te rappelles de moi. Je suis Charlène, ta sœur. Tu viens quand me voir ?’
- Et alors, t’as quoi à perdre ?
- Pas grand-chose… On verra plus tard… »
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