Retour à la réalité…
- Allo Mr Gallo?
- Oui, Maître Rangon.
- Excusez-moi de vous déranger, je sais que vous n’êtes pas dans la région, mais j’ai enfin reçu des nouvelles du tribunal. Le procès est avancé au mois prochain, le 18 septembre.
- Enfin!!! Il était temps…
- Comme vous le dites. On pourra compter sur votre témoignage?
- J’aurais aimé vous répondre ‘avec plaisir’ mais je pense pas que ce sera plaisant… Mais j’y serais, soyez-en sûr.
- Parfait… J’ai déjà prévenu Mme Maillard, et Mlle Gaillardon, ce serait bien qu’on puisse se revoir d’ici là, dès que vous rentrez?
- Pas de soucis, on rentre le 30, je reprends les cours le 6, votre jour sera le mien.
- Le 2, ce sera parfait. 14h30 au cabinet?
- Pas de soucis, je note.
- Vous allez recevoir la convocation officielle du tribunal, mais j’ai préféré vous avertir moi-même.
- Merci de votre appel et pour la bonne nouvelle, à bientôt.
- A bientôt Louis.
Voilà, il me reste moins d'un mois pour me blinder contre ce que je redoute depuis plusieurs mois, pour trouver le moyen de ne pas foutre en l’air ces douze mois de travail sur moi-même, pour comprendre comment arriver à encaisser ce que je vais entendre sans m’effondrer.
- Mon bébé? Tu vas bien?
- Pas vraiment… L’avocat a appelé cet après-midi… Ils avancent le procès… C’est pour mi-septembre…
- Et t’es pas content?
- Si… Mais j’ai peur…
- De quoi? Tu risques rien toi…
- Si… Je risque de m’écrouler encore une fois, de tout bousiller… J’ai pas envie de revivre tout ça encore une fois…
- Mais je serai là moi… Avec toi… Pour te soutenir… T’es fort maintenant bébé… T’as les armes pour te battre…
- Merci ma puce… Je sais pas comment je vais réagir… Comment je vais arriver à encaisser tout ça…
- Tu vas gérer ça comme t’as géré les douze derniers mois… Tu vas te battre, encaisser, et continuer… Et si t'as besoin, je serai là...
- J’aime ta confiance en moi…
- On est ensemble, pour le meilleur, pour le pire, pour se soutenir, s’aider et avancer ensemble…
C’est fou comme elle arrive systématiquement à trouver les mots pour me remonter le moral quand je vacille, cette force qu’elle arrive à me donner rien qu’avec ses mots et son regard.
Je passe les soirées suivantes avec Magali, Patrick, ou Charlène, pour préparer les jours terribles qui s’annoncent, ils me donnent leurs conseils, leurs astuces pour arriver à vivre ce procès du mieux possible, sans perdre pied, sans craquer.
Les vacances se terminent dans une ambiance moins joyeuse, moins détendue que nous ne l'espérions, même si je donne le change au boulot, mes nuits sont de nouveau peuplées de cauchemars, ou blanches, et malgré toutes les sorties sportives, je sens que mon moral a du mal à se maintenir au niveau.
Le retour à Aix est une véritable purge pour moi, j’aurais besoin de solitude, de calme et de grands espaces, et je me retrouve coincé entre les quatre murs d’un appartement, dans une ville encore envahie de touristes que je fuis, bercé par le bruit des moteurs et des klaxons.
Le jour convenu, nous nous rendons au rendez-vous fixé par notre avocat, et je me rends compte que je ne suis pas le seul à souffrir et à redouter les jours de procès, Hélène semble totalement absente, Thaïs, malgré la présence de mon frère à ses côtés, a encore les yeux rougis. Après des embrassades émues, nous entrons tous les cinq, retrouver celui qui défend notre cause depuis le début, et qui, nous l’espérons, saura convaincre les jurés et la cour de la nécessité d'une peine exemplaire.
Il nous explique donc le déroulement du procès en correctionnelle, après les modalités habituelles, la lecture de l’acte d’accusation, le président procèdera à l’interrogatoire de l’accusé, et à l’audition des témoins, des experts, des victimes et parties civiles. Ensuite ce sera à son tour de plaider, en prenant en compte l'interrogatoire de l’accusé, puis viendra le tour de l’avocat adverse de plaider pour la défense de l’accusé, sachant qu’il a avoué, ce sera une simple formalité, simplement pour essayer d’alléger la peine qu’il encourt, enfin, la cour rendra son verdict, peine de prison, amende et dommage et intérêts à verser à Hélène et son ex-mari pour la perte de leur fille, ainsi qu'à Thaïs et moi pour nous être constitué partie civile. Non pas que je veuille toucher de l’argent sur le dos de ce drame, mais nous voulions simplement associer nos voix à celle d’Hélène et être présents à ses côtés.
Il nous confirme que le père de Cécilia n’a pas souhaité être présent et qu’il le représentera, et enfin qu’il est très confiant pour le verdict final, l’accusé ayant avoué, le procès ne servira qu'à évaluer la gravité des faits reprochés, et à prononcer une peine adéquate.
- Bon les jeunes, ça va aller? Vous allez tenir le coup?
- Il va falloir, on a pas trop le choix… Et toi?
- C’est qu'un mauvais moment à passer, le dernier… J’espère…
- Merci de garder le moral… C’est toi qui va nous soutenir maintenant…
- T’en as tellement fait pour moi depuis qu’on s’est retrouvé... Chacun son tour…
- On est là pour ça…
- Allez, je file… Bonne rentrée les enfants, on se voit bientôt.
- A bientôt Hélène.
- Vous faites quoi? On va boire un coup sur le cours?
- Chou?
- Si vous voulez…
Nous nous sommes installés à la terrasse de la Belle Époque, pour siroter une bière tous les quatres, histoire de nous changer les idées en discutant de nos vacances, de la rentrée qui arrive à grands pas, et de nos projets pour la suite. En fait ils en ont surtout profité pour nous expliquer pas mal de choses à leur sujet.
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