À l’éclat tamisé des bougies vacillantes, les sorciers de Sodome se réunirent en un sinistre cénacle pour accomplir le maléfice proscrit. Les flammes dansantes projetaient des lueurs sur leurs visages anxieux, créant une atmosphère oppressante, propice à l’émergence du surnaturel.

— Que les forces obscures nous entendent ! clama le chef du cérémonial en tremblant. Nous sommes prêts à agir selon nos besoins pour transformer notre destinée !

Ses confrères se joignirent à lui, donnant vie aux mots interdits dans un chœur discordant d’appels et de murmures.

À l’apogée du rituel, une nuée noire surgit du sol pour envelopper le cercle. Tel un serpent ondulant, elle s’enroula autour des participants, répandant son pouvoir néfaste dans leurs esprits.

Soudain, une silhouette apparut dans la brume, dévoilant une beauté terrifiante. Son rictus pervers reflétait la luxure et la cruauté. Vêtue d’une robe grise flottante, elle dégagea une impression sadique, lorsqu’elle susurra :

— Qui ose invoquer la Reine des enfers ?

Le meneur s’avança, tremblant, mais résolu.

— Nous, les habitants de Sodome, avons mandé votre puissance pour altérer notre malheur. Nous sommes prêts à tout pour atteindre la richesse et la prospérité qui nous ont échappé si longtemps.

Lilith s’esclaffa :

— Ainsi, vous avez choisi la voie de la tentation et de l’obscurité. Soit, je réponds à votre appel. Mais sachez que les conséquences seront terribles.

— Nous sommes parés à affronter tout cela, répliqua le Maître de cérémonie.

La démone fixa les portes de la ville. Elle leva les bras, traçant des symboles dans l’air. Son maléfice l’enveloppa, tourbillonnant et crépitant. Les battants trembler.

Peu à peu, ils s’entrouvrirent. Lilith rayonnait de satisfaction. Sous son impériosité mentale, les Sodomites les passèrent sept fois pour s’unir aux actes impies. Leur soif de réussite brûlait intensément, les poussant à jurer de transgresser les péchés capitaux édictés par Dieu. Ils immolaient leur prétendue vertu sur le piédestal du désir. Désormais, tout mortel franchissant ce portail serait à jamais enchaîné à la perversion de Sodome. Ce pacte avec la Diablesse représentait l’ultime espoir de briser l’ère de la pauvreté.

L’instant où Lilith disparut, une inexplicable euphorie conquit des habitants. Les journées qui suivirent devinrent alors un théâtre de débauche et d’excès - un voile d’insouciance s’était abattu sur la cité. Les pêcheurs se laissèrent aller aux plaisirs des sens, s’abandonnant aux fantasmes les plus sombres. Les rues résonnaient de rires malsains, de festins interminables et de jouissances libidinales sans limites.

Alors que les cycles quotidiens défilèrent, d’étranges phénomènes se manifesterent. Les terres arides qui entouraient Sodome se couvrirent de fleurs, des rivières jaillirent de sources invisibles et les récoltes abondèrent.

Au huitième jour, une atmosphère oppressante s’empara des vendus. Dans une salle lugubre du temple de Dieu, désormais à sa gloire, Lucifer, surgis dans un éclat de flammes. Sa présence mêlait magnificence et terreur, ses pupilles rougeoyantes les pétrifièrent.

— Abraams, porte-parole de tes semblables, votre souhait a été exaucé. Mais le prix doit être payé ? J’exige un dernier acte de dévotion pour sceller notre pacte à jamais. Acceptez-vous cette offre ?

Après tergiversations, Abraams rassembla assez de bravoure pour articuler :

— Quelle sera notre tâche ? Quel est cet ultime acte de ferveur que tu réclames ?

Le seigneur de l’enfer sourit :

— Rien d’extravagant, vous devrez orchestrer un rituel sombre où vous présenterez un sacrifice en mon honneur.

Lucifer requit la vie du fils d’Abraams, le plongeant dans un abîme de désespoir et de dilemmes moraux. L’atmosphère morne accentuait le diabolisme qui l’entourait, contrastant avec les apparences fallacieuses.

Alors que le crépuscule enveloppait Sodome d’une lueur malsaine, le Malin s’avança, sa silhouette imposante éclairée par les torches.

— De par ton mutisme, je considère que tu rejettes ma légitime revendication.

Abraams, consumé par la douleur et le chagrin, se débattait intérieurement. Son cœur de papa s’interdisait de le condamner à une fin tragique. Mais ce démon exerçait une emprise puissante, et l’idée de tout gâcher devenait insoutenable.

Le géant écarlate se focalisa sur le peuple. Glacial, il clama :

— Écoutez, habitants de Sodome ! Abraams refuse de sacrifier son fils. Tout a un coût. Si vous ne me livrez pas sa progéniture, je reprendrai ce que je vous ai octroyé.

Un soupir d’effroi se propagea dans la foule. Après un moment suspendu dans le temps, quelques-uns, le visage crispé par l’angoisse, se détachèrent de la masse pour s’en saisir, leurs mains avides le maintenaient fermement. Pendant ce temps, un groupe se précipita à son logis et en ressortit rapidement, tenant le fiston dans les bras.

Le bout-chou fut introduit auprès de Lucifer. Sa voisine, mère de sa camarade de jeu, dont les pupilles écarquillées reflétaient une folie sinistre, s’empara d’une machette et, sans la moindre hésitation, trancha la gorge de l’enfant. Le sang se répandit, créant un spectacle horrifiant devant le père dévasté par le chagrin, impuissant face à cette terrible épreuve.

Satisfait de son triomphe, le Diable savoura la souffrance et l’agonie du petit. Un sourire sournois se dessina sur ses lèvres avant qu’il ne disparaisse dans les ombres, laissant derrière lui une scène de désolation.

Dans l’accalmie oppressante qui suivit, les pervertis se confrontèrent à la réalité engendrée par ce choix. Ce sacrifice barbare marqua un tournant dans l’histoire de Sodome, plongeant les habitants dans une spirale de culpabilité autodestructrice. Ils comprirent alors que cette quête les conduisit à la déchéance. La cité, autrefois bouillonnante d’ambition, se trouva submergée par les ténèbres.