Chapitre 19 : Découverte et Métamorphose

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Pendant que les filles parlaient chiffons, les empreintes sonores de Caïn, timides et hésitantes, contrastaient avec la démarche assurée et noble d’Enlil. Ils arpentaient les couloirs du Palais Palladium, passant sous les vitraux colorés qui narraient l'épopée des Darck. Le visiteur lançait des coups d'œil discrets vers son guide, dont la stature, mise en évidence par les reflets colorés des vitraux, imposait le respect. Tout à coup, Enlil lâcha :

— Tu ne seras jamais à la hauteur de mon art.

Caïn, piqué au vif, répliqua avec fermeté :

— Peut-être, mais ce n’est pas pour autant que je vais me dérober.

D’ordinaire sculpté dans une confiance inébranlable, Son Altesse se perdit un instant dans une introspection. Ses yeux d’or, si pénétrants, se voilèrent.

— Nous allons faire un détour, déclara-t-il, d’une gravité qui fit angoissa son obligé.

Sans attendre de réponse, l’Imperator ouvrit une porte dérobée. Derrière, un désert s’étendait, étrangement familier au Vampyr. Avant qu’il n’ait pu articuler sa surprise, un tapis volant surgit de nulle part, se glissant sous leurs pieds.

Le dos droit, l’attention fixée sur l’horizon, Enlil s’installa en tailleur. Une boule d’anxiété logée dans l’estomac, Caïn l’imita maladroitement. De l’index, Enlil propulsa le tapis à une vitesse vertigineuse. Le vent fouettait les visages, ébouriffait les cheveux.

L’atterrissage accomplit, le novice trébucha légèrement, son soulagement visible.

— J’aurais préféré parcourir la distance en planant que de monter sur cette chose contre nature !

Enlil éclata d’un rire si plein de vie qu’il en devint presque intimidant. Après des minutes d’hilarités, il retrouva son sérieux :

— Impossible ! Le protocole de sécurité de Warren t’aurait transformé en brume écarlate. Mais rassure-toi, le retour sera moins turbulent.

Son compagnon déglutit à l’idée de chevaucher cet artefact endiablé.

L’hôte se dirigea vers une dune proche et planta fermement ses pieds dans le sablistales. Ses bras s’étendirent – une vague de chakra mordorée s’échappa de ses paumes, engendrant une tempête de poussière éphémère. Alors des profondeurs surgit un colossal cube lisse, d’onyx.

Un spectre apparut – un vieux sorcier. Il les jaugea, puis transperça l’une des faces formant une brèche.

En la franchissant, ils pénétrèrent dans une sorte de sanctuaire. Des vitrines de marbre blanc s’étalaient du sol au plafond – remplies de ressources inimaginables : gemmes aux couleurs chatoyantes, artefacts scintillants aux formes étranges, et parchemins enroulés dont les sceaux respirait. Au cœur de cette caverne d’Ali Baba, exposé tel les pièces maîtresse de cette collection hétéroclite, des capuchons flottaient en apesanteur, enveloppés d’une halo émeraude.

Un frisson d’excitation traversa le Vampyr. Il avait l’impression que la salle était en communion avec des forces cachées qui transcendaient le temps et l’espace. Enlil, debout au milieu de ses trésors, paraissait en être l’élément maître de ce tableau ensorcelant. Son regard parcourait les étagères avec une assurance qui frisait l’arrogance.

— Tu ressens ça, Caïn ? C’est le pouls de l’univers. Chaque objet ici est un fragment d’un tout plus grand, une pièce d’un puzzle cosmique que nous tentons de résoudre.

Davantage ébahi, il acquiesça, se sentant petit, presque insignifiant, surtout à côté de la majesté de ce Seigneur qui s’approchait des capuchons en lévitation :

— Le rouge est le mien, commença-t-il. Le vert appartient à Warren, le bleu à Kieran, l’or à ma nièce Kayna, et le voile est la prérogative de ma mère. Les trois autres n’ont pas encore trouvé d’acquéreur. Je suppose que Lya héritera du Rose, quant au blanc aucune idée.

Il fixa intensément son champion :

— Mais mon intuition prophétique me dit que le noir t’est destiné. 

Pris au dépourvu Caïn chercha ses mots :

— Pour moi ? 

Son Altesse mêla à la fois amusement et sérieux :

— Tu as le choix : le revêtir et tenter ta chance. Mais sois averti, si je me trompe et que tu n’es pas son propriétaire légitime, la Faucheuse sera ta seule compagne. Sinon, abstiens-toi et prépare-toi à subir une humiliation sans précédent lors de notre entraînement. 

— Pourquoi de tels procédés ? 

— Je suppose que c’est pour éviter que n’importe qui s’en empare. Ces capuchons détiennent d’immenses pouvoirs. 

— Tu supposes ? 

Enlil haussa les épaules :

— Ces trésors existaient déjà avant que ma mère ne devienne la Créatrice des Univers. Nous en sommes les gardiens, mais pas les concepteurs. Pour certains, nous n’en connaissons pas l’usage et pour d’autres nous ne disposons pas de la force suffisante à leur maîtrise.

—Alors a qui appartenaient-il ?

— Il est encore trop tôt pour ces révélations. Fais ton choix !

Caïn sentit le poids de sa destinée l’affliger. Il aurait volontiers refuser, le pouvoir l’exécrait, mais ses doigts effleurèrent le tissu, conscient de son devoir envers le Royaume de sa femme. Alors, une explosion quiet jaillit ; une nuée ébène l’encercla. Ses paupières se fermèrent involontairement, et une vision s’imposa à lui : il se vit, plus vieux, plus sage, tenant un sceptre et portant une barbe blanche. Indubitablement le poids des siècles reposait sur ses épaules.

Une ombre de doute fit tressaillir l’Imperator, une fissure dans son armure d’assurance. Si jamais son champion venait à accéder à ces souvenirs, le moindre effluve de vérité pourrait faire basculer l’ensemble du plan dans le chaos absolu. Puis, l’Élu l’enfila. À cet instant, un brouillard enténébré émana de la soie, engloutissant la salle. Il tomba à genoux – l’Obscur s’insinuaient en lui, parcourant ses veines et abreuvant son âme. Ses ongles se plantèrent dans ses paumes, et ses iris phosphorèrent – son feu intérieur s’allumait. Enlil, bien que ravi, demeurait soucieux à l’idée que de nouvelles réminiscences imprègnent ses invitées. Caïn se releva, couver d’un halo sombre.

Il se sentait puissant et terrifiant. Les ombres l’entourant attendaient, prêtes à obéir son commandements. En conséquence, il brandit le poing et l’opacité fut absorbée, redonnant prérogative aux flambeaux et candélabres enchantés. Enlil, nullement indisposée par son manque de franchise le toisa avec satisfaction, car en effet, ce cadeau empoisonné fut porté Jadis par le Fondateur.

— Désormais, tu es un gardien de la Création. Black Hood sera ton nom de guerre. Utilise ce privilège à bon escient. Tu peux invoquer l’artefact à volonté. Il te suffit de le vouloir. 

Après avoir d’une simple pensée renvoyé son bien sous le halo, ils quittèrent la salle au trésor et débarquèrent non pas dans le désert, mais au sein du Palais Palladium. Au bout de quelques mètres, ils croisèrent Lyana et Ëlara. Caïn fut frappé par la beauté amplifiée de sa dulcinée – il s’en approcha et l’embrassa passionnément.

— Tu es à couper le souffle. Cette tenue me donne envie de te déshabiller ici même. 

Enlil éclata de rire :

— D’abord, nous avons un duel à régler. Ensuite, tu pourras batifoler. 

Ëlara, ses joues s’éclairant d’un rose délicat, lança :

— Je croyais que vous étiez déjà en train de vous battre ? 

— Nous avons fait un petit détour,  répondit Enlil, énigmatique. Mais nous y allons maintenant. Alors, mesdames, aimeriez-vous voir ses nouvelles prérogatives ? 

— D’autres pouvoirs ? s’étonna Dame Nature.

Échangeant une accolade complice, les deux hommes se mirent en marche. Derrière eux, le claquement des talons se fit entendre, amplifiant le suspense.

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