Chapitre 29 : Projet Chiméria

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Trois semaines s’écoulèrent tel un murmure dans les brises de Khalarie, alors que, dans la dimension d’Ëlara et Caïn, trois siècles défilèrent. Le couple se trouvait captivé par les délices et les épreuves de la parentalité, dévoilant des merveilles insoupçonnées. Nasëem, Kaëlle, Gaïa et Aëgir se révélaient des prodiges, exhibant des talents élémentaires qui les épataient constamment.

Un jour, alors qu’ils nourrissaient les petits, Lya se matérialisa dans la nurserie, comme à son habitude. Avant que quiconque ne puisse réagir, elle éclata de rire et fit léviter des jouets avec une ondulation de la main. Fasciné, le quatuor se désintéressa de la bouillie et se joignit à ce jeu enchanté. Au bout de quelques minutes, elle se dématérialisa. Ils suivirent son exemple.

Alertée instantanément par Alexa, qui veillait au grain, Kayna se transposa sans délai dans la chambre de sa sœur, où les bambins l’avaient retrouvée. Magistrale, elle les renvoya d’où ils venaient. Pragmatique l’Intelligence Magificielle établie des charmes de restrictions autour des quartiers réservés aux invités.

Pendant ce temps, Kelly demeurait introuvable, laissant un vide tangible dans le palais. Des rumeurs circulaient, et, grâce à leur indiscrétion, les parents apprirent qu’une confrontation avait eu lieu entre elle et Lucifer. Ce n’était pas la seule révélation qui parvint à leurs oreilles. Un matin, alors qu’ils s’octroyaient une ballade en amoureux, dans l’ombre d’un couloir, ils entendirent une conversation entre Darrius et Kayna.

« Le Diable a réussi. Il exerce une influence considérable sur les humains. Notre plan avance, confia Darrius. »

« Excellent. Tout se met en place. Bientôt, nous pourrons passer à la phase suivante, répondit la princesse, d’une assurance glaciale. »

Ëlara et Caïn échangèrent une œillade inquiète.

— Nous devons en savoir plus, proposa-t-elle, la gravité de la situation pesant lourdement sur ses épaules.

— Je suis d’accord.

Ils décidèrent de se rendre dans la bibliothèque du palais, un lieu rempli de grimoires magiques. Là, ils espéraient trouver des informations qui les aideraient à comprendre les enjeux en cours et les dangers qui les menaçaient.

Après avoir parcouru plusieurs étagères, Caïn tomba sur un livre intitulé « Les Prophéties de Loi : Acte I – Les Rois sorcier » : une œuvre de mon frère, le scribe de Clarté. Intrigué, il l’ouvrit. Les pages révélèrent des secrets sur la suprématie de leurs hôtes, la manière dont ils manipulaient le Continuum dans leur propre intérêt, et ce, sous couvert de bonnes intentions.

— Regarde ça. Cela pourrait expliquer ce qu’ils préparent. 

Ëlara lut :

« Quand les étoiles s’alignent dans l’obscur voile de la nuit, les démons dénichent la piste de notre monde. Leurs souffles empoisonnés distillent le chaos dans les esprits humains, insufflant des pensées impies et des désirs inavouables. Mais attention, car ce ne sont pas les infernaux qui changent la nature de l’homme ; ils se contentent de libérer les ténèbres cachées en eux. »

— C’est inquiétant. Nous devons en parler à l’Imperator. 

Ils refermèrent le livre et se dirigèrent vers le Miroir d’onyx. En chemin, ils croisèrent Lya, qui jouait dans le couloir. Pétillante de malice la princesse les contempla puis disparut dans un éclat d’azur.

— Nos enfants ont vraiment un modèle fascinant, sourit Ëlara.

— Oui, mais j’espère qu’ils n’utiliseront pas leurs pouvoirs pour nous rendre chèvre.

Arrivés devant le reflet, ils prirent une grande inspiration et traversèrent. Face à cette irruption, le souverain assis sur son trône chassa ses conseillers sans même esquisser un mouvement.

— Approchez, dit Enlil, faussement avenant. Je devine que vous venez avec des questions importantes. 

Ils joignirent leurs mains, puis sentirent leur courage déguerpir. C’était le moment de découvrir la vérité, de protéger leur famille et peut-être même de sauver un monde en péril. Alors ils ne se dégonflèrent pas. Rassemblant toute l’autorité dont un Vampyr pouvait faire preuve, le père le recadra :

— Nous avons des responsabilités envers nos enfants et notre peuple. Pouvez-vous nous assurer que ce que vous faites ici est sans danger pour eux ?

il quitta son trône :

— Vous êtes dans ma dimension, sous mon toit ! En aucun cas, vous ne pouvez me demander des comptes. Vous vous plierez à mes règles, ou vous en subirez les conséquences, rugit Enlil, sa colère atteignant un point de non-retour.

La tension était à son comble. Caïn leva la main et le piano qui ornait la terrasse disparut, réapparaissant au-dessus de Sa Majestée.

— Vous osez ! gronda l’Imperator, dématérialisant l’instrument avant qu’il ne s’écrase.

Voulant intervenir, Ëlara fit un pas en avant, mais une pensée de sa moitié l’arrêta net. C’était à lui de défendre ses enfants, de prendre position. Enlil, débordé par sa propre noirceur, canalisa un orbe contenant la mort subite, prêt à ourdir l’irréparable. C’est alors qu’un maelstrom s’ouvrit. De sa démarche féline, la Créatrice en émergea. D’une œillade cinglante, elle calma instantanément la fureur de son fils. Le silence retomba, lourd et indiscutable.

— Ce n’est pas nécessaire de t’emporter, mon bébé, statua-t-elle. D’ailleurs, votre présence ici est opportune. Je m’apprêtais à vous convoquer. 

Caïn et Ëlara se tenaient là, un peu déconcertés, mais soulagés.

— Où sont les enfants ?

— Sous la surveillance des prêtresses de l’Ordre Trinital, répliqua la mère, espérant que cela suffirait pour apaiser toute inquiétude.

— Très bien. 

La Créatrice se perdit momentanément dans ses pensées, et en un instant, Warren, Lyana, Kieran et Darrius apparurent dans la pièce.

— Vous m’avez manqué mes petits.

Elle se tourna ensuite vers Lyana :

— Tu es ravissante dans cette tenue, ma chère. 

Finalement, elle conclut en embrassant Darrius, son époux, d’un baiser empli d’amour et de tendresse.

— J’en déduis que ton séjour en enfer a été fructueux.

— Il n’aurait pu en être autrement, le rabroua-t-elle.

Avant que quiconque ne puisse réaliser ce qui se passait, ils se retrouvèrent tous dans le laboratoire de Nick.

Enlil ausculta l’endroit, cherchant le maître des lieux, avant de se remémorer que son mari vivait actuellement sur la planète Paramisse, occupé à concevoir une nouvelle espèce humanoïde. Warren, d’un claquement de doigts, fit apparaître des trônes pour chacun. Le cercle aux complets, Kelly carillonna ses bracelets et invoqua les chérubins qui se matérialisèrent dans un flash doré au sein de leur berceau floral.

Cette vision heurta Caïn et Ëlara avec une intensité inattendue, un rappel brutal de leur insignifiance dans le vaste schéma cosmique. Prêts à s’insurger, ils furent immobilisés par un toisement tranchant d’Enlil.

L’échec se peignit. Ce n’était pas la peur qui les rongeait, ni même le désespoir, mais une acceptation amère d’impuissance face à des forces dépassant largement leur entendement. Marqués par cet instant, ils demeurèrent frissonnants, confrontés à l’interrogation perpétuelle du libre arbitre de ces petits êtres.

Sous l’admiration visible des membres de son clan, Warren s’agita. Élégant, il bougea les berceaux floraux et matérialisa le globe de Diamonite central dans lequel se trouvait Mammon.

— L’essence démoniaque nourrira le système, expliqua-t-il, empreint d’une assurance tranquille.

Alors, du plafond, des cocons de Karistal descendirent, reliés par des filaments à un mécanisme complexe. Ils vinrent entourer l’Infernal emprisonné.

Sous l’impulsion de la Créatrice, les bambins quittèrent les pistils en lévitant pour être délicatement disposés dans les caissons de maturation. Les obturateurs se refermèrent avec un doux cliquetis, cloîtrant les petits. Caïn et Ëlara, en revanche, paniquèrent.

— Pourquoi devons-nous faire ça ? Qu’est-ce qui se passe ? hurla la mère, rouge de colère.

Le père s’en mêla, son ire s’associant au sien dans une cacophonie d’indignation.

En un éclair, Enlil et Kieran récitèrent un puissant sortilège, plongeant les hystériques dans l’inconscience, tandis qu’on les allongeait dans les cocons. À l’exception de la matriarche et Warren, qui se maintinrent debout impassibles – le reste de la bande s’installa également.

— C’est à toi de les mettre en fonction, mon fils. 

Ses pas résonnèrent sur le marbre. Il s’arrêta devant les cuves d’évolution, mesurés et précis. Des symboles tracés dans le vide activaient les Karistaux enchâssés dans les parois. L’émeraude émana des cristaux, et un bourdonnement doux remplit la salle.

Sa mère s’approcha du globe contenant Mammon. Avec une élégance presque théâtrale, elle posa son index diamanté sur le verre. Des filins s’embrasèrent, émettant un courant doré qui valsa sur les murs. Un à un, les membres de la compagnie sombrèrent dans une expérience onirique commune – enveloppés dans un état de quiétude qui défiait les lois universelles. Le monde extérieur s’estompa, laissant place à une réalité alternative où rien n’a de sens.

— Chérubins, abandonnez-vous à ce sommeil abyssal. Vous entamerez une odyssée sans pareille à travers le royaume des songes, susurra Warren, fier de son prodige.

Elle s’arrêta devant un hologramme en forme d’œil :

— Alexa, active la Résolution Chiméria. 

— Sa marche, Darling !

Les cristaux incrustés dans les parois s’éveillèrent, projetant des étincelles. Les chambres de maturation sorcelike pulsèrent, tandis que les cocons de stase émettaient une chaleur apaisante. Une onde se propagea, tissant l’Eterna chimérique.

— Le rituel est lancé, murmura-t-il.

Comblé, le benjamin de la trinité rejoignit le cercle ; s’assoupit, puis son esprit fusionna avec le collectif spirituel.

Dans ce monde irréel en constante mutation, une épopée exceptionnelle naissait. Les chérubins évoluaient, et un quintet d’heures s’écoula, scellant leur quintième anniversaire. Ils obtinrent de leur guide la mémoire de leur savoir, qu’ils se virent contraints à maîtriser, ensuite le maniement des duels, des élixirs, des stratégies, du théâtre, et de l’illusion. Imprégnés d’une opalescence, ils s’initièrent à la sorcellerie sous la houlette de leurs géniteurs et des Darck.

Les holoécran et Ensorcetab révélaient une fable inédite, tissée de victoires et d’obstacles, de passion et de camaraderie. Kelly s’émerveillait à l’idée d’observer ses poulains changer, s’appréhender individuellement, et déployer leur capacité dans ce milieu fantasque.

Les heures s’égrainèrent au rythme des tacs-tac des talons de la Créatrice scrutant la transformation physique des protégés. Ils grandissaient, gagnaient en sagesse et en puissance, nourris des enseignements de leurs mentors et la tendresse de leur foyer rêvasser. À travers les tribulations et l’acquisition de savoir, elle perçut une fierté intense. La croissance était manifeste, et les ajustements visibles à l’œil nu : silhouettes s’étirant, traits se précisant, crinières s’étoffant. La Créatrice consulta Alexa :

— Quel est l’âge du quatuor maintenant ? 

— Vingt heures se sont écoulées depuis leur entrée dans le système, soit à vingt années 

En accord avec les recommandations de Warren, elle déposa sa main impeccablement manucurée sur le bocal renfermant Mammon, interrompant le processus. L’instant tant attendu approchait...

Les cocons s’ouvrirent, libérant Ëlara, Caïn et les Darck, quelque peu étourdis par l’expérience. Ce retour à la réalité après tant de temps les laissa lourds, enchaînés à la liberté. Les chambres de maturation décompressèrent, faisant trembler légèrement le laboratoire. Une brume jaunâtre s’échappa du globe central alors que l’énergie se dissipait progressivement.

Les couvercles se levèrent doucement, dévoilant des minois sereins des êtres nouvellement formés et préparés à vaincre. D’abord, Nasëem, le Druide, l’incarnation du vent du printemps, fit son apparition, ses cheveux châtains flottants, porté par une brise vernale. Ses prunelles, d’un blanc intense, reflétaient la splendeur de la nature.

Puis, une rousse s’éveilla, ses mèches rougeoyantes. Kaëlle, la Sorcière du feu estival. Des étincelles crépitèrent dans son regard, témoins du pouvoir qui l’habitait. Des spirales de flammes s’élevaient délicatement de sa peau, sans la consumer, créant une ambiance de chaleur réconfortante.

Le suivant à émerger fut Aëgir, le Mage de l’eau hivernale, à la tignasse d’un bleu rappelant l’océan en furie. À l’ouverture de ses yeux, de petites gouttes d’écume scintillantes jaillirent. Son être était empreint d’une fraîcheur glaciale. Une sensation de pureté et de clarté en émanait – capable de calmer les tempêtes les plus violentes.

Finalement, Gaïa, la Pythie de la terre d’automne, à la crinière couleur d’écorce, se réveilla. Des pétales et des feuilles l’encerclèrent, tel un manteau de nature en mouvement.

Ils se contemplèrent, se sentant à présent prêts à braver la réalité. D’un claquement de doigts, les demoiselles se sapèrent de magnifique robe cintrée, tandis que les messieurs revêtirent des costumes élégants aux teintes de leurs éléments. Ils dégageaient l’assurance témoignant de leurs compétences.

La chambre de Maturation avait rempli son rôle, accélérant leur évolution pour les préparer aux défis futurs. Kelly comprenait l’importance de cette phase pour leur destinée, mais elle était également attristée de les voir croître si vite. Mais c’était nécessaire, car sa dimension avait besoin de leur force, et elle n’aurait pu priver Ëlara et Caïn du bonheur de les élever. Mais grâce à Warren et à son génie, cela put être évité. Silencieusement, elle le remercia.

— Vous êtes des êtres d’une grande beauté, déclara Kelly.

Dame Nature articula sa gratitude abyssale envers la Créatrice :

— Que ce soit il y a vingt heures ou il y a vingt ans, j’éprouvais des doutes à votre sujet. Cependant, désormais, ma loyauté indéfectible et absolue vous est entièrement acquise.

— Pareil pour moi, ajouta le Vampyr.

Avec une maîtrise éblouissante, elle avait composé la symphonie de cette aventure hors du commun. Au fil de ce retrait du monde, les ressources avaient été cultivées, la connaissance enrichie. Lyana, devenue une sœur de cœur, avait dévoilé les nuances de la situation, les rôles décisifs de ses acteurs, et le destin commun suspendu à l’échec improbable des projets de Kelly. Et pourtant, les liens tissés dans ce monde onirique transcendaient le temps et l’espace, fondant une connexion puissante entre les Darck, Dame Nature, le Vampire et le Quatuor. Mais pour parfaire les plans, une ultime épreuve les attendait.

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