Chapitre 67 : En Avalon
Dans le Solarium, le bruit des pas de Lynéxia, Phoebus, Nérisse et Andromède rythmait l’espace, réverbérant contre les dalles anciennes. Ils tournaient en rond, leurs mouvements dictant le tempo dans la pièce dominée par un sablier d’obsidienne.
Lynéxia s’arrêta brusquement :
— Le temps s’écoule si lentement. Croyez-vous... qu’ils réapparaîtront ? laissa-t-elle échapper, sa préoccupation manifeste dans l’hésitation de ses mots.
Phoebus, se dirigeant vers une tapisserie exposant la situation sur Terre, effleura du bout des doigts l’image de la Scythie.
— Ils reviendront, assura-t-il avec incertitude. Ce sont les plus vaillants parmi nous.
Nérisse, se tenant droite, opinait du chef.
— Tout combat porte en lui son lot de danger, mais ils savent ce qui est en jeu. Ils rentreront, pour notre cause, pour nous tous.
Sa tentative de paraître confiante était évidente, cherchant à apaiser l’inquiétude. Andromède, quant à elle, fixait les tentures avant de se tourner vers la fenêtre, scrutant l’horizon.
— Je ne les ressens plus, ils ont dû infiltrer l’antre du Dieu.
Ils se regroupèrent de nouveau autour du sablier, observant les derniers grains tomber. Chacun d’entre eux, égaré dans ses pensées, partageait un sentiment mêlant optimisme et appréhension.
Phoebus s’embrasa, projetant des étincelles à chaque mouvement. Englobé par un brasier, il rayonnait d’un rouge infernal, ses rugissements déchirant le calme ambiant. Le supplice, aigu et omniprésent, lacérait son épiderme. En courant, il agitait frénétiquement ses bras, essayant en vain de repousser les flammes, la chaleur pénétrant son être.
— Kaëlle ! Kaëlle !
Respirer le torturait, brûlait ses poumons. Sa peau craquait, chaque effleurement apportant une nouvelle vague de tourment insupportable. Il sentait sa chair crépiter, envahi par une sensation de cuisson. Dans cette agonie, il n’existait que souffrance, peur, et supplique. Pris dans l’incendie, son corps ne trouvait aucun répit. Nérisse, saisie d’effroi, étendit une main vacillante, libérant un jet d’eau timide. Cette tentative, face à l’intensité dévorante qui se déchaînait, se révéla aussitôt vaine. Son action, chargée de désespoir, s’évaporait dans l’assaut infernal.
— Restez en arrière ! rugit Andromède, écartant ses camarades du foyer.
Ses paumes s’élevèrent, et, avec elles, une incantation résonna. Autour de sa silhouette, un halo vibrant apparut, battant au rythme des mots. Les ardeurs, captivées par son attraction, se mirent à danser. Sous son commandement impérieux, elles convergèrent en une sphère étincelante. Avec maestria, elle les mêla harmonieusement à son spectre étouffant. Dévoilant les vestiges de leur furie, un détail sinistre émergeait des cendres encore tièdes : les ossements calcinés de Phoebus. Ce tableau macabre resterait gravé dans la mémoire de ceux qui l’avaient contemplé.
Initialement vague et informe, l’aspect sculptural d’Andromède se détachait progressivement de l’éclat flamboyant. Brièvement masqués par la ferveur des flammes, ses traits parfaits se révélaient empreints d’une tranquillité digne de la royauté. Derrière elle, ses cheveux noirs comme la nuit gambillaient en ondes fluides. Les pupilles d’Andromède, incandescentes, reprirent la nuance or, distinctive de ceux de son clan.
Ses compagnes, stupéfaites, scrutaient ce spectacle morbidement fascinant. Le feu destructeur était désormais maîtrisé. Andromède, vivante, se tenait fièrement. D’une pensée, elle revêtit une robe de dentelle sombre, coiffée d’un diadème brillant. L’odeur âcre de la chair brûlée imbibait la pièce, mêlée à celle du bois et des tissus consumés. Soudain, la Vampyr laissa échapper un cri strident :
— Phoebus est mort ! Et Kaëlle... Elle... Elle n’est plus !
Un tourbillon doré se dessina, d’où émergea une entité scintillante, teintée de rouge rubis, forçant le trio à se couvrir face à son rayonnement aveuglant.
— La Créatrice intervient, murmura la mère porteuse, alors que l’âme se rapprochait de son ventre.
L’aura s’infusa en Lynéxia, qui, touchée, posa doucement la main sur son ventre :
— Je suis son écrin….
Nérisse, les prunelles grand ouvertes, partagea un moment de stupeur avec Andromède.
— C’est un miracle, articula-t-elle, ébranlée par l’admiration.
L’atmosphère, naguère alourdie de tristesse, était à présent chargée d’un bonheur en demi-teinte.
— Cela redéfinit notre combat, affirma Andromède. Sa fille illuminera ta voie.
Rassemblées dans un élan de solidarité, elles formèrent un cercle autour de l’unique parent restant à cette bambine pas encore née.
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