065 - La conscience
Pendant que Willem est au travail à la mairie, je fais mes exercices de méditation et de yoga. Je prends conscience de mon corps et de mon environnement. Ensuite je fais les tests de Q.I. Ils sont stables. Tel est mon esprit aujourd’hui. Mon humeur. Mon âme. Je vois tous les événements de ma vie sous un autre angle. Et quand j’envisage mon existence aujourd’hui, je me sens accomplie, détendue, sereine, sans aucun mauvais sentiment. Je sens ce confort dans le creux de mes reins, je sens cette vie qui grandit dans mon ventre et on va être heureux ici à Sylvania, dans notre jolie petite maison du centre-ville à écrire notre histoire simple. J’ai la sensation d’avoir déjà vécu ça. Sur Terre. À Dijon. Avec Jean-Paul. Rue Saint-Honoré. Le Saint Patron des pâtissiers. Valentin ? Que vient-il faire dans mes pensées ? Je laisse glisser, je n’ai plus de mystère ou d’intrigue à résoudre. Il est juste le fils de Thomas, le sous-préfet, mon mari que j’ai perdu. Où est-ce qu’il est passé ? Je crois qu’il est au Port de l’Est, avec mes enfants, Noël, Pauline et les autres dans d’autres vies que les nôtres. Je me concentre sur moi et aujourd’hui. Aline. Future maman d’Émeline. Ma fille de mon Willem à moi, au-delà des conventions, au-delà de la génétique, l’Amour Absolu. Et notre nid que j’aménage, à l’intérieur avec des meubles qui respirent le bien-être, à l’extérieur avec du jardinage zen. Et alors que je me démène dans ma salopette et dans mes bottes à répartir les petits cailloux blancs de l’allée autour des galets gris et noir, sous la pluie et dans le froid, Marielle passe par là pour rentrer chez elle et elle s’arrête, admirative :
- Aline, c’est magnifique.
Je lève la tête et je la regarde. Il n’en faut pas plus pour devenir amies pour la vie. Elle lâche tout et elle vient m’aider. Ensuite on rentre boire le thé. Et elle me parle. Et je l’écoute. Ça lui fait un bien fou. Elle se comprend mieux elle-même. Pourtant je n’ai rien expliqué, j’en suis incapable, j’ai juste réagi instinctivement aux bons moments avec quelques mots essentiels que je lui sors pour résumer ses propos, comme un miroir lui renvoie ses solutions vues d’un autre angle. À la fin elle pleure et je la serre dans mes bras. Il n’en faut pas moins. Énola vient me remercier :
- Je croyais que c’était moi qui avait des pouvoirs. Mais toi, Aline, toi qui a tout perdu, je pense que tu as bien plus que nous toutes. Bien plus à nous donner. Merci.
Elle me fait un gros câlin et elle m’embrasse sur la joue. Sa chaleur entre en moi.
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