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Une pluie fine tombait sur la mégalopole qui s’éveillait doucement. L’aube traçait des sillons incarnats dans le ciel ocre, où s’attardaient encore quelques étoiles.

Depuis le bureau de l’officier de police qui l’auditionnait, Gaëlla pouvait entendre le charivari de la circulation à l’extérieur du commissariat. Un bandage autour du genou, esquinté dans sa chute lors de son évasion, la jeune fille relatait ses péripéties au policier avec le plus de détails possibles.

L’émotion l’envahissait chaque fois qu’elle se rappelait sa victoire sur l’adversité : son calvaire était terminé, elle allait rentrer chez elle.

En longeant la route sur laquelle elle était tombée dans sa fuite, plus tôt dans la nuit, elle avait pu intercepter une voiture et rejoindre le centre-ville. Sous le choc, elle s’était trouvée incapable d’expliquer sa situation à la conductrice, qui l’avait alors déposée aux urgences en constatant son état déplorable. Là-bas, la jeune fille avait reçu des soins superficiels et avalé un sandwich, avant d’être en mesure de parler.

Lorsqu’elle était enfin parvenue à témoigner, révélant qu’elle avait été victime d’un kidnapping par l’un des membres du groupe des Ediles de l’Ombre, elle avait été escortée jusqu’au commissariat le plus proche, où elle n’avait pas eu à attendre plus d’une minute pour être écoutée.

– Ce terroriste, commença l’officier alors qu’elle achevait son récit, vous pouvez le décrire ? Vous seriez capable d’indiquer la localisation de cette décharge ?

Gaëlla hocha la tête. Un léger tournis la saisit. Romickéo allait payer, il serait arrêté et jeté en prison, ce n’était qu’une question d’heures.

– Oui, je pense que je saurais la situer, répondit-elle dans un souffle. Romi… Mon ravisseur a les cheveux châtains, les yeux verts. Taille moyenne, la vingtaine… Vous le verrez sur la caméra de surveillance du bar où il m’a enlevée.

Dès qu’elle parvint à identifier la zone où elle estimait qu’était placée la décharge de Romickéo, des ordres fusèrent par appel, et des équipes d’intervention furent envoyées sur les lieux. On guida Gaëlla jusqu’à une autre salle, où un panel de policiers lui posa toutes sortes de questions.

– Vous dites que c’est dans la messagerie du terroriste que vous avez découvert son implication dans les attentats qui ont frappé le pays. Pourquoi et comment y avez-vous eu accès ?

– Qu’est-ce qui vous a mené à vous rapprocher ? Vous fréquentiez cet individu depuis longtemps ?

La jeune fille bredouillait ses réponses du bout des lèvres, tout en omettant d’évoquer les échanges complotistes qu’elle avait eus avec Romickéo avant son kidnapping. Elle ne souhaitait pas qu’ils la cataloguent comme une potentielle menace et ne l’interrogent davantage sur ses activités.

Après un temps indéfini, une sonnerie interrompit le question-réponse auquel Gaëlla était soumise, et le silence se fit lorsque l’officier le plus gradé appuya sur son poignet pour décrocher l’appel.

– Inexploitable ? tonna-t-il au bout d’une poignée de secondes. Aucun moyen, c’est sûr ?

Gaëlla, soudain inquiète, lança un regard inquisiteur au policier, qui raccrocha et se tourna vers ses collègues, la mine sombre.

– Impossible d’identifier l’intéressé, sur la vidéo de la caméra du bar. Il n’a sûrement pas de puce, donc aucune trace, zéro fichier.

Pas d’identité, un fantôme dans la nature…, songea Gaëlla, qui avait redouté cette éventualité. Elle n’avait pas parlé de cette particularité de Romickéo aux enquêteurs au cours de son témoignage. Quelque part, elle n’avait pas envie de partager son histoire, d’exposer son passé.

Attends, je ne suis quand même pas en train de le protéger, là ? réalisa-t-elle, soudain furieuse contre elle-même.

Tandis que les officiers s’activaient autour d’elle sans lui prêter la moindre attention, la jeune fille tenta de se convaincre qu’elle souhaitait voir son ravisseur derrière les barreaux pour le restant de ses jours. Pourtant, quelque part au fond d’elle, cette perspective ne la réjouissait pas autant qu’elle l’imaginait.

Qu’est-ce qui m’est arrivé, depuis que je ne rêvais que de le faire souffrir et de le descendre ? s’interrogea-t-elle, perturbée. Il m’a séquestrée, menacée avec une arme, et fait partie des Ediles de l’Ombre… Je le hais plus que tout, il est à l’origine de toute ma souffrance !

Tout à coup, un nouvel appel coupa court à l’agitation qui régnait dans la salle et aux réflexions de la jeune fille.

Après un bref échange, le policier le plus gradé jura et mit fin à la communication.

Sa déclaration, qui tomba comme un couperet, provoqua un mélange d’émotions contradictoires chez Gaëlla :

– Les équipes ont trouvé le refuge du terroriste et ont retourné toute la forêt sans le trouver : il a déjà fui depuis longtemps et emporté son EC.

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