PROLOGUE

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Assise près des baies vitrées, mâchonnant le bout de son stylo bleu, Willow observait les sombres nuages duveteux se former peu à peu dans le ciel. Les oiseaux qui planaient librement jusque-là, s'affolaient et se dispersaient dans tous les sens, à la recherche d’un abri contre l'orage qui se préparait. Le vent, qui caressait doucement le feuillage des arbres, se mit à souffler violemment, emportant dans sa valse les feuilles et herbes qui jonchaient la cour de l'école. Au premier éclair qui fendit le ciel, la jeune fille sursauta légèrement, se rappelant à quel point l'établissement était loin de chez elle. Pour rentrer, il lui faudrait traverser une vingtaine de rues avant de retrouver le confort de son appartement.

Jetant un coup d'œil à l'horloge accrochée au-dessus du tableau, affichant dix-sept heures trente-neuf, elle laissa échapper un gros soupir, ce qui n’échappa pas au professeur, le nez plongé dans un livre. Celui-ci esquissa un sourire narquois avant de replonger dans sa lecture.

S'adossant sa chaise, Willow maudit ce crétin avec qui elle s'était battue plus tôt. Cet idiot qui lui avait volé son dessert au réfectoire était la cause de ces deux heures de colle. Heureusement, il ne s'en était pas sorti indemne : elle lui avait laissé une belle entaille sur l'épaule avec sa fourchette. À chaque fois qu'il se regarderait dans un miroir, il se souviendrait que toutes les filles ne sont pas de petites lapines effrayées et qu'elles savent aussi sortir les griffes quand il le faut.

« Ah ! Bon sang… », pensa-t-elle. Si seulement elle n'avait pas été en retenue, elle serait vautrée dans le canapé, en train de siroter du chocolat chaud tout en regardant sa série préférée avec sa mère.

Un terrible grondement de tonnerre la fit sursauter, et elle bascula de sa chaise pour se retrouver par terre.

_ Vous pouvez rentrer, mademoiselle Willow, lui dit le professeur. Mais la prochaine fois, je ne serai pas aussi indulgent.

Willow hocha la tête, rangea ses affaires à toute vitesse et quitta la salle. Seule dans le couloir du lycée, elle pressa le pas, craignant que la pluie ne la surprenne en chemin. À peine avait-elle mis un pied dehors qu'un vent froid vint caresser sa peau métissée, la faisant frissonner. Elle descendit précipitamment les marches et récupéra son vélo garé dans le parking de l'école. Elle enfourcha sa monture et pédala aussi vite qu'elle le put, manquant à plusieurs reprises de se faire renverser par des voitures. S'il y avait bien une chose qu'elle aimait et détestait à la fois, c'était la pluie. Elle détestait être mouillée et adorait l'atmosphère qu'elle créait.

Après avoir parcouru une vingtaine de rues à tout allure dans les rues de Paris, elle arriva enfin dans son quartier et souffla, soulagée d'avoir devancé cette fichue pluie qui menaçait. À quelques pâtés de maisons de son immeuble, elle aperçut deux voitures de police et une ambulance garées devant le bâtiment où elle vivait. Aussitôt, son cœur fit un bond. Que se passait-il ici ? Elle n'eut pas le temps d'atteindre l'immeuble qu'il se mit à pleuvoir à verse. La pluie soudaine qui s'écrasait sur l'asphalte dispersa la foule de curieux rassemblée devant le bâtiment. Seuls les policiers et quelques habitants de l'immeuble restaient sous l’averse. Arrivée à leur niveau, elle sauta de son vélo, inquiète de ne pas voir sa mère parmi les résidents. Peut-être n’était-elle pas encore rentrée du travail ? Oui, ça devait être ça, se rassura-t-elle.

Mais lorsque l’un des policiers sortit avec un objet taché de sang qui leur appartenait, son cœur se déchira, et des larmes commencèrent à perler le long de ses joues. Un vide immense s’installa dans sa poitrine, et elle se rua vers l'entrée du bâtiment, enjambant la bande de scène de crime. Le policier qui gardait la porte tenta de l’arrêter, mais elle fut plus rapide et s’engouffra dans les escaliers. À chaque pas, elle imaginait l'horreur qui avait dû se dérouler chez elle. Une fois dans le couloir sombre de son appartement, éclairé par intermittence par les éclairs qui zébraient le ciel, elle fut saisie de panique à la vue des taches de sang et des griffures qui maculaient le sol et les murs.

Marchant à pas de loup, les lèvres tremblantes, les yeux remplis de larmes et le cœur battant à tout rompre, elle entra chez elle et découvrit un spectacle des plus effroyables. Tout avait été saccagé. Les meubles étaient brisés, les murs tachés de sang et troués, les canapés déchirés et des éclats de verre recouvraient le sol. Sans attendre, elle se précipita vers la chambre de sa mère en hurlant son nom, mais elle vit deux hommes en sortir avec un brancard sur lequel reposait un corps recouvert d’un drap blanc.

Hurlant de toutes ses forces, elle courut vers eux, mais un homme d'une cinquantaine d’années l'arrêta et la serra dans ses bras pour l’empêcher de touche le corps.

_ Calmez-vous, mademoiselle, dit-il tandis qu'elle se débattait.

Après trois longues minutes de lutte, elle finir par se calmer, essoufflée, et l'homme la relâcha. Les jambes en coton, elle s'affaissa sur le sol et enfouit son visage dans ses mains, pleurant de toutes ses forces.

_ Je suis désolée, petite, dit l'homme, visiblement peiné par son chagrin. Avez-vous de la famille que nous pourrions contacter ?

À ces mots, son visage s'assombrit, et elle cracha par terre, le regard empli de dégoûts et de mépris.

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