Confessions

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Le lendemain matin, une fois totalement réveillée, je me levai pour pouvoir changer de tenue. J’enfilai aussi rapidement que possible une tenue confortable, c’est-à-dire une tenue généralement portée pour monter à cheval. Au moment de mettre ma chemise, je me stoppai et, dans le miroir, j’analysai les cicatrices qui striaient mon dos. Elles ne ressemblaient à aucune cicatrice qu’aurait causée une blessure normale. Non, malgré toutes ces années qui étaient passées, elles n’étaient pas devenues blanches ou plus fines, elles étaient restées noires, épaisses et n’étaient pas lisses. Une quelconque personne pourrait dire que leur matière ressemblait à de l’écorce d’arbre, désagréable au toucher. Je passai lentement mes doigts dessus, là où je pouvais les atteindre, et frissonnai de dégoût. Je décidai de ne pas accorder plus de temps à mon passé pour le moment, j’enfilai ma chemise, mis mon corset et enfilai mes bottes. Je passai un coup de brosse dans mes cheveux rosés sans prêter beaucoup d’attention à mes gestes. Je me dirigeai ensuite vers ma porte, l’ouvrit et m’arrêtai une nouvelle fois. Je ne savais toujours pas me repérer dans ces lieux et ne savais même pas où je devais me rendre précisément.

Je soufflai, comme beaucoup ces derniers temps, et décidai de suivre mon instinct, avec un peu de chance je tomberais sur une personne à qui je pourrais demander de m’emmener là où se trouvait Owein, ou du moins là où il était censé être. Je m’aventurais donc dans les dédales du Sanctuaire et, n’étant pas pressée, je pris le temps d’admirer ce qui se trouvait sur mon passage. Il y avait des tapisseries, des tableaux et même des statues plus ou moins imposantes mais les plus petites avaient autant de détails que les géantes ! J’étais bouche-bée, comment l’artiste pouvait-il autant détailler une statue qui faisait tout juste une vingtaine de centimètres ? Je continuai mon chemin lorsqu’une personne sortit d’une pièce avant de m’apercevoir. Cette personne se tourna dans ma direction et je pus reconnaître Enfys, la Gardienne qui nous avait mené jusqu’à EÒghan lorsque Owein et moi sommes arrivés ici, au Sanctuaire de Khyal. Enfys s’avança vers moi, sans une once d’hésitation et une fois arrivée à ma hauteur me demanda :

-Avez-vous besoin d’aide pour aller quelque part ?

- Oui s'il-vous-plaît, je ne sais pas où je dois me rendre, et ne sais de toute manière pas me repérer. Lui expliquai-je avec une grimace.

- Suivez-moi, votre ami et les autres Gardiens sont sûrement encore à table pour le petit-déjeuner. Cela se passe dans la salle principale, elle se trouve à votre droite lorsque vous entrez dans le Sanctuaire, m’informa-t-elle.

Je me remémorai donc notre arrivée pour repérer cette salle. Une fois cela fait, je me concentrai sur le chemin qu’empruntait Enfys pour essayer de le mémoriser. Nous ne mîmes que peu de temps avant d’atteindre la salle principale. De plus, je pensais avoir plutôt bien retenu le chemin pour m’y rendre. Nous entrâmes sans réelle discrétion, ainsi toutes les têtes se tournèrent vers nous. Enfys n’eut aucune réaction, quant à moi je sentis mes joues chauffer. Je baissai instinctivement le regard et avançai d’un pas rapide pour rejoindre la place qui était restée vide à côté d’Owein, en évitant tout contact visuel.

Je me laissai tomber sans grâce sur la chaise et me saisis d’un verre dans lequel je me servis du jus d’un fruit efeilliade : le liorée. Je portai le breuvage à ma bouche tout en écoutant les conversations qui avaient repris de plus belle. Je ne comprenais pas tous les sujets puisque certains portaient sur les capacités de tel ou tel Gardien ou encore sur le décès de ma mère et la succession du pouvoir. Par conséquent, Selwyn était évoqué, il arrivait que l’on pose des questions à Owein sur son père, ses projets en tant que régent et sa recherche d’une prochaine Reine. Personne ne prêtait attention à ce que je pouvais penser de cette histoire. Une seule personne semblait se soucier de moi, et ce n’était pas Owein, non, c’était Lume. Elle était seule au bout de sa rangée. Je me décidais donc à aller la voir, pour parler de tout sauf de notre défunte Reine. Elle m’accueillit avec un tendre sourire qui me fit chaud au cœur. Je lui rendis son sourire, puis pris place à ses côtés, et avant même d’avoir pu lui dire quoi que ce soit elle m’attira à elle comme pour me confesser quelque chose. Seulement, je n’avais pas l’habitude d’une telle proximité, et elle dut le voir, car elle s’éloigna un petit peu de moi avant de commencer une discussion.

- J’ose espérer que vous avez passé une agréable nuit.

- C’est le cas merci, et je t’en prie tutoie moi, après ce que tu as fait pour moi hier c’est le moins que je puisse faire.

- Avec plaisir, même si je pense avoir encore un peu de mal avant de réussir à te tutoyer sans avoir à me concentrer. Dit-elle avec un petit rire. Que comptes-tu faire aujourd’hui ?

- Je ne sais pas ce qu’il y a à faire ici ou dans les alentours…Alors je suppose que je vais rester ici, peut-être que je pourrais trouver une bibliothèque.

-Peut-être pourriez-vous-

- Lume, qu’est-ce que je viens de te dire ? La réprimandai-je avec un sourire.

- Oh ! Désolée, ce n’est vraiment pas dans mes habitudes de tutoyer qui que ce soit alors, notre Reine légitime…

- Je ne suis pas la Reine légitime. Et ce, depuis longtemps maintenant. Et ce n’est pas grave, je suppose que tu finiras par t’habituer au tutoiement.

- Oui c’est certain mais pas dans l’heure qui suit. Répliqua-t-elle gentiment. Je disais donc, que tu pourrais m’accompagner, je compte sortir faire une balade à cheval. Je pourrais même t’apprendre à sceller ton cheval, si cela te va bien entendu. ajouta-t-elle rapidement, sûrement de peur de m’avoir vexée.

Je répondis par un hochement de tête, toujours accompagné d’un sourire timide. Nous continuâmes de parler tout en grignotant des petits gâteaux. J’appréciais ce moment bien plus que je ne l’aurais cru, cela faisait un bien fou d’être entourée de personnes.

Je pensais que désormais je pouvais considérer Lume comme une bonne camarade, peut-être pas encore une amie mais si notre relation continuait d’évoluer je me doutais qu’elle serait une excellente amie pour moi. J’écoutai avec attention tout ce qu’elle me disait, elle était captivante. Parfois je riai de bon cœur et d’autre fois seul un petit rire s’échappait de ma bouche. Je ne voyais pas le temps passer, et finalement je me disais que cela n’avait aucune importance, je ne voulais pas arrêter ce moment plein de sérénité et de bonne humeur. Pourtant vint le moment où nous devions nous séparer car Lume devait aller se changer si nous voulions faire un peu d’équitation. C’est donc à contre cœur que je rejoignis ma chambre en attendant qu’elle se prépare. Je fus malgré tout ravie de constater que j’avais, en effet, retenu le chemin entre la salle et ma chambre. Je devais avouer que j’avais tout de même dû faire des pauses pour réfléchir à la direction que je devais prendre à certains moments.

Je me dirigeai sans hésitation vers ma fenêtre pour admirer le Soleil qui se trouvait déjà haut dans le ciel. J’ouvris ma fenêtre pour en ressentir l’étonnante chaleur de fin Fajrodo, qui caressait ma peau délicatement. Je profitais pleinement de cette sensation de bonheur et de calme lorsque quelques coups se firent entendre contre ma porte. J’allai pour ouvrir mais la personne semblait impatiente puisqu’elle se permit de rentrer sans que je ne l’y invite. J’aurais pu être agacée mais lorsque je vis que c’était Lume je me détendis. Mais je m’arrêtais. Que faisait-elle déjà là ?

- Tu as été rapide ! M’exclamais-je

- Non, pas spécialement. Répondit-elle, confuse.

- Je n’ai peut-être tout simplement pas vu le temps passer.

- Oui peut-être. Maintenant on peut y aller ! S’extasia-t-elle.

J’acquiesçai tout en prenant une veste que Loraevere avait mis dans mes bagages. Je marchai à côté de Lume puisqu’une nouvelle discussion rythmait notre avancée. Le chemin jusqu’aux écuries fut très court. Nous nous dirigeâmes chacune vers notre cheval. Une fois encore je devais attendre que Lume vienne m’aider mais cette fois elle m’expliquerait seulement comment faire. J’allais donc apprendre à sceller mon compagnon de route sans personne pour le faire à ma place. Cela me serait fort utile. Lume prit son temps pour être précise dans ses explications et après trois ou quatre ratés de ma part je réussis enfin à préparer mon cheval toute seule en quelque sorte. J’en fus très fière, et affichai un sourire radieux qui illuminait mon visage.

*****

Nous étions partis depuis un petit moment et je m’en rendis compte lorsque je sentis mon ventre gargouiller. Cela me fit lever la tête vers le ciel pour y voir un soleil resplendissant, qui provoquait un sentiment de bien-être. Je fermai les yeux pour en profiter pleinement et le rire cristallin de Lume que j’entendais derrière n’était que bonheur et plaisir. J’ouvris les yeux pour l’observer. Son sourire était contagieux tout comme sa bonne humeur. Je ne détournai le regard que lorsque je sentis une présence pas très loin de nous. Et là, je le revis, le loup. Je le reconnus, même si je ne savais pas d’où me venait cette certitude. Mais c’était bien lui ou elle, je ne savais toujours pas. Cette créature leva ses yeux vers moi. Des yeux d’ambre, je ne pouvais pas détourner le regard, j’étais subjuguée et rien ne pouvait briser ce moment intense. Cette fois je n’hésitais pas. Je me penchai vers ce loup après avoir pris mon courage à deux main et lui donnai une caresse derrière l’oreille . Cela ne sembla pas le déranger puisque lorsque je me redressai sur ma selle, le loup me regarda comme pour me supplier de recommencer. J’émis un petit rire et recommençai ma caresse. Le loup émis un petit jappement de contentement et sans crier gare tourna sa tête pour me lécher affectueusement la main. Je tournai mon regard vers Lume et la vit m’observer mais sans une once de crainte.

- Crois-tu que moi aussi je pourrais le caresser ?

- Je ne sais pas. Avouai-je. Il faut essayer pour savoir.

- Certes. Comment fais-tu pour ne pas avoir peur. Je veux dire, je n’ai rien contre les Celeanos, seulement je ne sais pas si je serais aussi confiante en leur présence. On raconte tellement de choses horribles à leur sujet que je ne saurais décider si tout ça est vrai ou pur spéculations.

- Qu'est-ce qu’un Celeano? Demandai-je intriguée par ce terme.

- C’est un animal, il aurait quatres formes différentes selon les dernières informations que les Gardiens ont pu récolter. Ces animaux sont plus gros que leurs compagnons "normaux" si je puis dire. Ils sont aussi beaucoup plus féroce et attaquent souvent les êtres humains. M’expliqua-t-elle.

- Je vois merci. Et honnêtement je ne sais pas, ce loup-ci m'inspire confiance. J’ai l’impression qu’il ne me fera rien. Et je suppose que le fait de ne pas être au courant de sa nature m’aide à ne pas avoir trop peur et donc d’être assez détendue pour qu’il accepte de s’approcher de moi. Répondis-je.

- Oui… Répondit-elle hésitante. Comment le vis-tu?

- Peux-tu préciser ?

- Bien sûr, comment vis-tu le fait de ne pas être au courant de ceci alors que cela ravage une partie des Gardiens?

- Et bien il y a des jours où je m’en fiche au plus haut point et d’autres où j’haïe ma mère pour ce choix qu’elle a fait. A cause d’elle j’ai manqué tellement de choses sur mon pays. Comme tu le dis, je ne suis même pas au courant des maux qui courent et qui détruisent le peuple.

- Je suis désolée, bien sûr ce n’est pas ça qui te ramènera à ton enfance avant l’incident mais je suis sincère. Je ne sais pas si j’aurais pu accepter cette vie.

- Je pense, au contraire, que tout le monde aurait pu s’y accommoder, du moins comme moi : avec le temps. Vois-tu il y a des jours où je suis en colère car on m’a retiré tous mes droits et mes titres et d’autres où j’en suis heureuse car c’est une si grande responsabilité…Là je suis libre en quelque sorte de faire ce qu’il me chante puisque personne ne sait que je suis toujours de ce monde, je n’ai pas à avoir peur de sortir. Même si c’est le cas en ce moment, je sais que si je prends de la hauteur sur cette situation, en toute logique, je n’ai rien à craindre.

Lume me sourit et acquiesça lentement.

- Tu es une personne forte Achlys, sache-le.

- Merci Lume mais je n’en suis pas si sûre…

- Est-ce que je peux t’avouer quelque chose ?

- Bien sûr ! Je t’écoute.

- Lume n’est que mon surnom, celui que les autres Gardiens de feu me donnent.

- Attends, la coupai-je, tu n’es pas une Gardienne de Vent ?

- Non pas du tout, seulement, je suis en repos, du moins quelque chose qui y ressemble. C’est pourquoi je suis là, près de ma famille et donc à côté du sanctuaire. Mais non, je suis Gardienne de Feu et je me prénomme Isla Hardhell.

- Isla ? J’aime beaucoup même si je pense que je vais continuer à t’appeler Lume. Mais pourquoi ne pas m’avoir dit cela lors de notre rencontre? Voulais-tu me le cacher volontairement ? A cause de mon passé ? La questionnai-je, devenant à nouveau méfiante envers elle et ses intentions.

- Et bien, je ne sais pas, non ce n’est certainement pas à cause de ton passé. Seulement je ne pensais pas cela important. Comme je l’ai dit, tout le monde m’appelle Lume, personne n’emploie mon prénom excepté mes parents. Je ne voulais pas te le cacher, je t’assure.

- Puis-je moi aussi te confier quelque chose dans ce cas?

- Je t’écoute avec plaisir Achlys. Dit-elle un sourire chaleureux scotché au visage.

- Je t’apprécie beaucoup, et je me sens bien avec toi. Tu n’as pas peur d’être en ma présence et c’est agréable. Bien sûr c’est le cas aussi pour Owein mais ce n’est pas la même chose. Lui il me connait depuis la naissance, il me connaissait avant l’accident. Avant le premier SjØdrak 4169. Expliquai-je les yeux dans le vide.

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