pouvoirs et baiser

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J’avais envie de hurler de terreur, mais aucun son ne sortait de ma gorge. J’étais pétrifiée...L’idée de me mettre à l’abri n’atteignit même pas mon cerveau, je restais là, à regarder dans les yeux cette chose sans pouvoir bouger un seul membre. J’entendis un son étouffé venant de mes amis et des Gardiens mais rien de clair. Les yeux de la créature m'envoutaient, je ne discernais plus rien autour de moi pourtant cette bête je la voyais aussi nettement qu’il était possible. L’animal grogna et dévoila ses crocs pointus juste après ce son guttural. Ce dernier me fit frémir. De terreur? D’excitation? Je ne saurais dire entre les deux lequel prenait le plus de place dans tout mon être. Je continuais mon observation de cette créature qui était d’une taille irréelle, ses long crocs qui me faisaient face et qui pourraient me déchiqueter à n’importe quel moment. Pourtant, lui aussi restait là, sans bouger mais toujours un minime son guttural venait de lui, cela sonnait comme un avertissement. Mais à qui était-il adressé?

Mes pensées furent interrompues lorsque je sentis l’air devenir plus glacial que les pays nordique des contes de fées que je lisais enfant. Cela ne pouvait pas être causé par cette créature car le vent venait de derrière moi, ce devait donc venir d’un des quatre Gardiens de Vent qui m’accompagnaient. Mais une fois encore, j’étais incapable de vérifier puisque mon corps semblait s’être changé en statue de marbre. Cependant je pouvais désormais bouger les yeux et donc cesser de fixer les yeux de cet animal qui semblait à peine être à quelques centimètres de moi, sans que je n’aie pu le voir s’avancer encore et encore de moi. Pourtant j’avais cette impression que l’être devant moi avait rapetissé. Je pouvais donc désormais dire que la créature était un Celeano, plus précisément un loup… C’en fut trop pour moi, je perdis connaissance.

Lorsque j’ouvris les yeux ce fut pour voir notre petit groupe en plein combat contre le loup. Encore dans les vappes, mes paroles n’atteignirent personne, ils étaient trop loin, trop dans le feu de l’action pour ne serait-ce que tourner leur regard vers moi. J'essayais tant bien que mal de me relever sur les coudes mais quelque chose atterrit sur moi. Non, quelqu’un. Cette personne était Seimon. Il s'apprêtait à retourner se battre mais je lui agrippais la jambe, c’était à ce moment que son regard se posa enfin sur moi. Il s’agenouilla en vitesse pour me demander si tout allait bien, ce à quoi je répondis que ma tête me lançait mais ça allait en soit. Il tenta de se relever mais je l’en empêchai en le tenant fermement, il émit un soupir et me demanda ce qu’il m’arrivait.

- Vous ne devez pas le blesser, s’il avait voulu nous attaquer il l’aurait fait dès le début au lieu de rester planté là ! Je t’en prie, Seimon écoute moi. Ne lui faîtes rien, laissez-moi m’en occuper, j’ai cette impression de le connaître. Je pense qu’il est celui qui m’a attaqué il y a douze ans. Laisse-moi m’approcher de lui, je t’en prie Seimon...

- Nous ne pouvons pas décemment le laisser en vie Achlys, je suis désolé mais nous allons l’éliminer surtout si tu penses qu’il est celui qui nous a privé de Princesse et maintenant de Reine. Avec ou sans ton consentement nous tuerons cette horrible créature. L’as-tu seulement bien regardé? Il te dévorerait avant même que tu puisses faire quoi que ce soit alors cesse d’être ridiculement sentimentale et laisse les professionnels gérer cette situation.

Et il repartit au combat, sans demander son reste. Je sentais la colère affluer dans mon corps après avoir assimilé la façon dont il venait de me traiter. Il devait et allait m’écouter ! Et si lui et les autres refusaient alors ils en paieraient le prix fort. Je me levais avec détermination, lorsque je vis Connor voler et s'écraser contre un arbre. Bien fait pour lui, je pensai, c’était la seule chose qu’il méritait pour le moment. Je fis un pas incertain et lorsque je fus sûre d’avoir retrouvé un bon équilibre je fis un autre pas plus certain. Et un autre, puis un autre, encore un, et encore jusqu’à me retrouver entre le loup et les Gardiens. La colère avait fait place à quelque chose de plus fort encore. Une rage intense me submergeait à présent, et celle-ci se dirigeait vers l’extrémité de mon corps. Je la sentais dans les veines de mes mains, je sentais mon sang y pulser. Je ne tentais même pas de contrôler ce qu’il se passait en moi, je le vivais pleinement et tout simplement. Mes bras se levèrent d’eux-mêmes et je sentis toute ma rage se déverser devant moi, sur mes deux amis, et les leurs. Je laissais faire, j’explosais de rage contre ces personnes qui n’avaient pas même posé les yeux sur moi, contre Seimon qui avait balayé ma supplication d’un revers de main. Je laissais cette chose en moi prendre le dessus, tant et si bien que je sentis mes pieds se décoller du sol, me laissant léviter à peine quelques centimètres au-dessus de l’herbe noircie par le feu de Lume. Je sentais mes yeux se révulser et pourtant cela ne m'effrayait pas, non je me sentais pleinement vivante.

Je venais d’envoyer valser le groupe contre les arbres aux alentours, mais mon pouvoir ne s’arrêtait pas là. Non une sorte de brume d’une couleur rouge semblait les maintenir collés à ces arbres. C’était un ordre qui venait des tréfonds de mon âme. Je sentais cette chose en moi s’extasier devant ce spectacle, s’en délecter. Mais après quelque temps, cela ne suffit plus à cette chose qui prenait possession de moi, elle voulait les voir souffrir, alors c’est ce que je fis. De ma main droite, je resserrais ma prise sur un cou invisible, et là tous commencèrent à suffoquer. Un ricanement sorti de ma gorge. Un ricanement bien trop rauque pour qu’il m’appartienne. Ce n’était pas moi et pourtant je sentais que cela venait de quelque part en moi, c’était une sensation des plus étranges mais des plus satisfaisantes si j’étais totalement honnête avec moi-même. Le sang n’affluait plus aussi bien dans leur cerveau, cela se voyait au rouge qui colorait leur tête. Mais je ne ressentais que de la satisfaction à la vue de ce massacre. Ce n’est que lorsqu’Owein me regarda avec des larmes qui perlaient au coin des yeux que je pris conscience de ce que j’étais en train de faire. J’allais les tuer si je n’arrêtais pas tout de suite cette chose qui me contrôlait.

Je pris une grande inspiration et expirai lentement, je répétais ceci encore jusqu’à sentir à nouveau le sol sous mes pieds. Maintenant je devais desserrer mon emprise sur eux, mais avec douceur si je ne voulais pas qu’ils s’écrasent trop violemment au sol. Mais le souvenir d’eux en train de se battre contre le loup situé derrière moi et la façon dont Seimon s’était comporté avec moi me revinrent à l’esprit, je desserrai donc mon emprise sans bienveillance mais tentai tant bien que mal de reposer doucement Owein et Lume. Mes bras se relâchèrent et retrouvèrent leur place le long de mon corps.

Je n’eus le temps de rien car mes jambes cédèrent sous mon poids, je me retrouvai donc à genoux sur ce sol carbonisé. Je relevai mes yeux vers eux et y lut de l’incrédulité pour certains et de l’effroi pour d'autres. Les Gardiens et Connor avaient une respiration sifflante. Quelques-uns toussaient, d’autres prenaient de grandes goulées d’air. Ils tentaient de retrouver une respiration normale après la strangulation que cette chose en moi leur avait fait subir. Mais une seule personne m’importait…Owein. Je cherchais à créer un contact visuel mais mon ami était allongé sur le dos, suffocant, crachant du sang. Et j’en étais la cause. J’émis un son étouffé lorsque je tentai de ramper jusqu’à lui. Mon corps me faisait souffrir mais je devais faire passer cette douleur au second plan, le plus important était de rejoindre Owein.

Je rampai difficilement à cause de mes membres engourdis mais je réussis finalement à atteindre mon ami. Une fois à sa hauteur, et après qu’il me vit, il semblait tout de même calme. Il n’était pas horrifié par ma présence. Dans ses yeux je pus en comprendre la raison. Owein connaissait les effets qu’avait une crise sur moi, il savait que ce n’était pas moi qui contrôlait mon corps dans ces moments là. C’est pourquoi il ne semblait pas m’en vouloir d’avoir failli le tuer.

Je l’aidai autant que possible à se mettre sur le côté pour ne pas qu’il s’étouffe avec tout ce sang qu’il crachait. Je lui caressais le dos, lui chuchotais à quel point j’étais désolée mais que j’avais dû le faire. Je savais qu’il comprenait mais je voulais tout de même m’expliquer. J’éclaircis les évènements en disant que c’était une impulsion, comme primitive, que je n'avais pu refouler. Que ce n’était pas vraiment moi. Qu’aucun d’eux ne m'avait laissé le choix, j’avais dû agir avant que le loup ne soit tué. Je ne cessais de m’excuser de ma voix pleine de sanglots. Je pleurais, ma tête collé à son dos trempé de sueur et désormais de mes larmes. Je déversais plus de larmes que dans ma vie toute entière ce jour-là. J’aurais pu le tuer si je ne l’avais pas regardé… Je m’effrayais moi-même, pourtant quand Owein fini de tousser il se retourna lui aussi vers moi et sans crier gare il posa ses lèvres sur les miennes.

Ce premier baiser avait le goût salé de mes larmes, mais aussi ce goût mentholé qui était propre à Owein. Je savourais l’instant présent, je passai mes mains dans ses cheveux, les lui tirai légèrement. Il posa sa main droite sur ma joue et sa main gauche sur ma taille. Puis il m’attira un peu plus à lui tandis que sa main trouvait sa place au creux de mes reins. Ce baiser était rempli de tristesse, de rage et de quelque chose qui ressemblait à de l’affection, une affection grandissante de minute en minute. Nous dûmes nous arrêter par manque d’oxygène. Nous nous regardions dans les yeux et nous nous souriions, heureux et désorientés. Rien ne venait nous interrompre, seul notre bonheur personnel était présent. Par excès de confiance, sûrement, je déposai une nouvelle fois mes lèvres sur les siennes juste pour le plaisir d’y goûter encore et encore.

Tandis qu’Owein et moi étions dans cette bulle solitaire, les autres se remettaient de mon attaque. Connor avait fini par s’évanouir, pendant que les Gardiens, plus robustes grâce à leur don, s’étaient assis après avoir retrouvé leur souffle.

Mais bien sûr cela ne dura pas, le loup nous interrompit tous en hurlant, peut-être à d’autres loups qui pouvaient être dans les parages. Aucun de nous n’aurait pu dire pourquoi le loup poussait ce hurlement, nous savions juste qu’il l’avait fait avant de disparaître de là où il était arrivé.

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