6. Conversation entre collègues
Nous grimpâmes les escaliers lentement. À intervalles réguliers, J. J. Dujardin tournait la tête dans ma direction et m’adressait un clin d’œil plein de concupiscence. J’y répondais par un sourire neutre du style : « OK, j’te suis mais t’attends pas à ce que je te turlute ».
À l’étage, l’acteur me pelota fiévreusement, attardant ses mains sur mes fesses et mes mamelles. Je laissai faire.
À côté de nous, un autre couple se bouffait le visage avec de forts bruits de succion. Deux viandes stone et en manque. Dans pas longtemps, l’une pomperait l’autre indifférente aux va et vient des gens. Puis d’autres dans le même état se mêleraient à elles, les sexes humides et durs. Les nichons jailliraient de leurs bonnets et les toisons pubiennes exhiberaient leurs frisotis. Un enchevêtrement obscène se formerait, constitué de couilles et de trous du cul. Et de cette créature informe, huileuse et spasmodique s’élèveraient des râles et des couinements spongieux.
Une main étreignit ma hanche que J. J. Dujardin claqua violemment.
- Qu’est-ce que tu fais ? gueula-t-il à son propriétaire, l’homme du couple emmêlé.
- Ben, je pensais que…, bredouilla le vicelard, confus.
- Tu penses mal !, vociféra l’acteur. T’avises pas de retoucher à ma femme sinon je te pète la gueule !
- Désolé, fit l’autre dans une posture de soumission.
J. J. Dujardin rangea son poing vengeur, prit ma main puis s’enfonça dans le couloir. Quand nous fûmes assez loin des deux partouzeurs, il éclata de rires :
- Non mais t’as vu la tête du mec que j’ai menacé ! J’ai cru qu’il allait se pisser dessus ! Pas dit qu’il regagne de la vigueur !
Son rire redoubla puis, prenant un air agressif, il me pointa du doigt :
- Ne t’avises pas de retoucher à ma femme ou je te casse la gueule !
Nouvelle poilade. Manifestement, il ne fallait pas grand-chose pour le rendre heureux. À moins que cette sensibilité extrême ne provienne de sourire en toc. Comme une conséquence de sa greffe, un effet incontrôlable. Sourire qui dans ce couloir sombre m’inquiétait un peu.
- Allons baiser au calme !, s’écria-t-il en ouvrant une porte.
Son visage s’illumina à la vue d’un blond en train de tendre son manche aux bouches alléchées de deux jeunettes.
- Matt ! Qu’est-ce que tu fous là ? On m’avait dit que tu t’étais barré à Hawaï pour deux semaines !
- Eh Jean ! fit Matt Damon en agrippant les tignasses à hauteur de ses boules et en les aidant à vaincre leur timidité. Ça fait plaise ! Ben non, tu vois, je suis parti. Après the Monuments Men, on m’a proposé un autre taf dans la foulée. J’ai décidé de reporter mes vacances au soleil.
- Ouah super ! Chuis trop content pour toi ! Et c’est quoi ?
- Tu comprendras que je ne peux pas t’en parler en détails mais c’est un gros, gros projet, sourit-il, les yeux sur son braque sucé en long, en large et en profondeur.
- T’inquiète, je comprends, approuva J. J. Dujardin. On ne sait jamais ce qui peut se passer. Et si ça foire, tu trouveras un autre gros, gros projet. Je ne me fais pas de souci pour toi.
- Et toi ? Où t’en es ? lui lança dans un soupir languide l’acteur amerloque.
- Oh moi, tu sais, je suis en stand by. Je me questionne : est-ce que je poursuis ma carrière ici ? Et si oui, est-ce que je me spécialise dans le film indép’ ou le blockbuster ?
- Si tu veux mon avis mais ce n’est que mon humble avis…
- Oh, je t’en prie, Matt, vu ton immense carrière, tes conseils valent de l’or.
À cet instant-là, l’autre se raidit.
- Eh fais gaffe ! Tu as failli m’arracher un bout de zeube !, vitupéra-t-il à l’adresse d’une des avaleuses.
Puis il reprit :
- Ouais, où j’en étais ?
En cherchant dans sa mémoire, son regard bifurqua vers moi et m’examina avec intérêt :
- Dites-donc, émit-il d’une voix à la confiture de framboise. Ça vous dirait de vous joindre à nous ? Une partie à cinq entre gens de bonne compagnie ?
- Non merci, déclina Jean Jérôme, pas partageur. Hasta luego, mon pote !
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