Chapitre 4

9 minutes de lecture

Date : 28 octobre 2024

Heure : 19h45

Le moment était enfin arrivé. Après des heures de contractions de plus en plus intenses, Mariana sentait que son corps était prêt à donner la vie. Allongée sur la table d'accouchement, elle respirait profondément, essayant de puiser la force nécessaire pour l'effort ultime. La pièce autour d'elle était silencieuse, si ce n’était pour les bips réguliers des moniteurs qui suivaient le rythme de son cœur et celui de son bébé. Les lumières blanches des néons éclairaient crûment chaque détail, amplifiant l’urgence du moment.

« Mariana, à la prochaine contraction, pousse aussi fort que tu le peux, » murmura le médecin en chef, sa voix douce mais autoritaire.

Mariana hocha faiblement la tête, le visage marqué par la fatigue et la douleur, mais aussi par une détermination farouche. Une vague de chaleur envahit son corps alors que la contraction montait en intensité. Elle serra les dents, rassemblant toute l'énergie qui lui restait. Quand la contraction atteignit son apogée, elle poussa de toutes ses forces, un cri de douleur et de puissance s'échappant de sa gorge.

Le monde autour d’elle sembla se réduire à cet instant précis, à cet effort colossal pour faire naître son enfant. Tout devint flou, hormis la sensation brûlante dans son bas-ventre, le poids de l’enfant qui descendait, et les voix du personnel médical qui l’encourageaient doucement.

Puis, soudainement, la pression se relâcha. Un cri perçant, minuscule mais rempli de vie, résonna dans la salle, brisant le silence oppressant. Mariana s'effondra sur la table, ses muscles relâchés, tremblante mais soulagée. Elle entendit les murmures excités des médecins, sentit les mains habiles des infirmières qui s’affairaient autour d’elle, mais tout ce qu’elle pouvait faire était de fixer le plafond, les yeux embués de larmes.

« C’est une petite fille, » annonça l'infirmière, sa voix tremblante d'émotion.

Mariana tourna faiblement la tête, et à cet instant, on lui déposa le bébé contre sa poitrine. La chaleur douce du corps minuscule de sa fille, combinée au battement rapide de son petit cœur, la ramena à la réalité. Elle baissa les yeux sur son enfant, ses mains tremblantes caressant délicatement la peau douce et étrange, teintée de ce violet pâle.

Elle sourit, les larmes roulant sur ses joues, et murmura, presque incrédule :

« Ma fille… »

L’enfant, blottie contre elle, ouvrit lentement les yeux, révélant des prunelles d’un bleu profond et intense, presque surnaturel. Ce regard, aussi minuscule soit-il, semblait contenir des siècles d’histoire et de mystère. Mariana sut alors que ce n’était pas une naissance ordinaire, et que leur vie venait de basculer dans quelque chose de bien plus grand et mystérieux.

Date : 30 octobre 2024

Heure : 14h00

Après l'accouchement, marqué par l'étrange teinte violette de sa fille et les phénomènes inexplicables à l'hôpital, Mariana et Arnold avaient enfin pu ramener leur bébé à la maison. Bien que les médecins n’aient trouvé aucune raison médicale pour retenir la petite fille, l’ombre de l’étrangeté de sa naissance planait toujours au-dessus d’eux.

La maison, qui d’ordinaire était un havre de paix, semblait ce jour-là particulièrement silencieuse, comme si elle retenait son souffle en attendant l’arrivée de ce nouveau membre de la famille. Les rideaux épais filtraient la lumière extérieure, plongeant les pièces dans une douce pénombre. Le crépitement discret de la cheminée ajoutait une chaleur bienvenue à l'atmosphère déjà confortable.

Arnold portait précautionneusement le siège auto contenant leur fille, tandis que Mariana, encore épuisée mais apaisée, le suivait de près. En franchissant la porte d'entrée, une odeur familière de bois et de cannelle, issue des bougies qu’elle aimait allumer, les accueillit, apportant un sentiment de réconfort après les événements étranges des derniers jours.

« Enfin chez nous, » murmura Mariana en regardant autour d’elle, sa voix trahissant à la fois un soulagement et une appréhension.

Arnold hocha la tête, déplaçant délicatement le siège auto vers le salon, où ils avaient préparé un espace spécial pour leur fille. Un berceau en bois blanc, entouré de douces couvertures pastel, les attendait près de la fenêtre, offrant une vue sur le jardin où les arbres, parés de leurs couleurs automnales, se balançaient doucement sous la brise.

Ils s’arrêtèrent un moment pour observer leur petite fille. Elle dormait paisiblement, sa respiration régulière émettant de petits sifflements à peine audibles. La teinte violette de sa peau, bien que toujours présente, semblait s’estomper légèrement sous la lumière naturelle qui traversait les rideaux. Mariana tendit la main et caressa doucement la joue de l’enfant, un sourire tendre éclairant son visage fatigué.

« Elle est si belle, » murmura-t-elle.

Arnold, qui n’avait pas quitté des yeux leur fille, répondit d’une voix émue :

« Oui, elle l’est. Et tellement unique… »

Mariana hocha la tête, perdue dans ses pensées. Elle savait que cette teinte étrange, cette couleur que sa fille portait, n’était pas naturelle. Mais pour l’instant, tout ce qu’elle ressentait, c’était un amour profond et inconditionnel. Elle voulait simplement profiter de ce moment, loin des angoisses et des incertitudes.

Le premier soir, la maison semblait particulièrement tranquille. Le silence n’était brisé que par les crépitements du feu dans la cheminée et le faible ronronnement de l’horloge murale. Mariana avait préparé une soupe légère pour eux deux, mais ni elle ni Arnold n’avaient vraiment faim. L’épuisement des derniers jours les avait vidés de leur énergie.

Après avoir dîné en silence, ils montèrent à l’étage pour coucher leur fille dans la chambre qu’ils avaient préparée avec tant de soin. La chambre de la petite était peinte dans des tons apaisants de lavande, une couleur qu’ils avaient choisie bien avant de savoir à quel point elle serait symbolique. Des mobiles délicats pendaient au-dessus du berceau, tournant lentement sous le souffle d’un ventilateur discret.

« Je vais rester un moment avec elle, » dit Mariana, installant leur fille dans son berceau. « Tu devrais te reposer, Arnold. »

Arnold acquiesça, même s’il était réticent à la laisser seule.

« Appelle-moi si tu as besoin de quoi que ce soit. »

Mariana hocha la tête, et Arnold déposa un baiser sur son front avant de quitter la pièce. Elle resta un long moment assise à côté du berceau, regardant leur fille dormir, écoutant les bruits familiers de la maison. Pourtant, quelque chose en elle restait sur ses gardes. L’atmosphère de la chambre, si paisible, semblait cacher quelque chose d’autre, une attente sourde, un présage qu’elle ne pouvait ignorer.

Cette nuit-là, Mariana dormit d’un sommeil léger, perturbé par de brefs réveils où elle se surprenait à écouter les bruits de la maison, guettant le moindre signe d’irrégularité. Pourtant, rien ne vint. La maison resta tranquille, les seuls sons étant ceux de la respiration paisible de sa fille et le léger craquement des meubles sous la contraction du bois.

Le lendemain matin, Mariana se réveilla avant l’aube, une habitude prise depuis que les contractions avaient commencé à rythmer ses nuits. Elle se leva doucement, pour ne pas réveiller Arnold, et descendit au rez-de-chaussée. La maison, encore plongée dans l’obscurité, était calme, presque trop calme.

Elle alla directement vérifier sa fille. La petite dormait toujours paisiblement, ses petits poings serrés près de son visage, les couvertures légèrement déplacées par ses mouvements nocturnes. Mariana réajusta les couvertures avec tendresse, ses doigts effleurant la peau douce de l’enfant, cette teinte violette qui lui rappelait constamment l’étrangeté de leur situation.

Elle se rendit ensuite à la cuisine pour préparer un café. L’odeur familière des grains fraîchement moulus emplit la pièce, apportant un semblant de normalité à cette matinée. Alors qu’elle portait la tasse à ses lèvres, elle sentit une légère brise froide traverser la pièce, bien que les fenêtres soient toutes fermées. Mariana frissonna, un sentiment de malaise grimpant en elle. Elle posa la tasse et se dirigea instinctivement vers le salon.

Là, elle vit quelque chose qui la figea sur place. Le collier qu’elle avait acheté dans la boutique, celui avec la fleur de lavande emprisonnée dans une pierre, flottait doucement dans l’air au-dessus de la table basse. Il tourna lentement sur lui-même, comme poussé par une force invisible. Mariana cligna des yeux, espérant que sa vision était faussée par la fatigue, mais le collier continuait de léviter, suspendu dans l’air comme un fantôme d’un autre monde.

« Non, c’est… c’est impossible, » murmura-t-elle, sa voix à peine plus qu’un souffle.

Elle s’approcha prudemment, mais avant qu’elle ne puisse atteindre le collier, celui-ci retomba brusquement sur la table, comme si le phénomène n’avait jamais eu lieu. Mariana resta immobile, son cœur battant à tout rompre. Elle s’efforça de reprendre son calme, mais la peur s’était installée dans son esprit.

Elle se tourna vers la chambre de sa fille, la gorge serrée. « Est-ce que tout ça est réel ? » pensa-t-elle, déchirée entre l’instinct maternel qui la poussait à protéger son enfant et la terreur face à ce qu’elle ne comprenait pas.

Lorsque Arnold descendit peu après, il trouva Mariana assise dans le salon, les yeux fixés sur le collier.

« Qu’est-ce qui ne va pas ? » demanda-t-il, remarquant son expression tendue.

Mariana secoua la tête, essayant de chasser le malaise.

« Rien… enfin, je ne sais pas. Ce collier… il a bougé tout seul. Je l’ai vu, Arnold, il lévitait. »

Arnold fronça les sourcils, jetant un coup d’œil au bijou inerte sur la table.

« C’était peut-être juste… je ne sais pas, un rêve éveillé ? Tu es épuisée, Mariana. »

« Je sais ce que j’ai vu, » répliqua-t-elle doucement, sa voix trahissant sa confusion. « Et ça n’a rien d’un rêve. »

Arnold ne savait pas quoi dire. Il s’approcha d’elle, posant une main rassurante sur son épaule.

« Peut-être que c’est juste… du stress. Ce que tu as vécu ces derniers jours… tout cela doit peser sur toi. »

Mariana hocha la tête, mais elle n’était pas convaincue. Le reste de la journée se passa dans une tension sous-jacente. Chaque petit bruit, chaque mouvement d’air semblait amplifier la paranoïa croissante de Mariana. Elle ne dit rien de plus à Arnold, préférant garder ses craintes pour elle-même, mais la peur était là, tapie juste sous la surface.

La deuxième nuit fut encore plus difficile que la première. Mariana se réveilla plusieurs fois, chaque bruit de la maison amplifié par l'obscurité. À chaque réveil, elle allait vérifier sa fille, s'assurant qu'elle dormait bien, que la couleur de sa peau ne s'était pas intensifiée.

À un moment, dans le silence total de la nuit, elle crut entendre un chuchotement, une voix douce et indistincte qui semblait flotter dans l'air. Elle tendit l'oreille, mais le son disparut aussi vite qu'il était apparu. Elle n’osa pas en parler à Arnold, se convainquant que ce n’était que le fruit de son imagination.

Cependant, lorsqu'elle retourna dans sa chambre, elle sentit à nouveau cette brise froide, comme une présence éthérée qui la suivait partout. Cette fois, Mariana se retourna brusquement, mais il n’y avait rien, seulement l’obscurité et le silence.

Elle passa le reste de la nuit à veiller sur sa fille, le cœur serré, son esprit en proie à des questions sans réponse. Chaque battement de son cœur résonnait dans ses tempes, chaque ombre semblait contenir un secret. Elle savait que quelque chose de plus profond était à l’œuvre, et que les deux premiers jours dans cette maison n'étaient que le début d'une série d'événements qui allaient bouleverser leur vie.

Au matin, alors que les premiers rayons du soleil pénétraient dans la chambre, Mariana sentit un sentiment de répit temporaire. Elle regarda Arnold, qui dormait encore paisiblement à côté d'elle, et leur fille, qui bougeait doucement dans son berceau. Mais malgré cette scène paisible, une inquiétude persistante restait au fond de son cœur.

Elle se leva pour préparer le petit déjeuner, décidée à ne pas laisser la peur prendre le dessus. Mais alors qu’elle se dirigeait vers la cuisine, elle jeta un dernier coup d’œil à la chambre de sa fille. Et là, juste au-dessus du berceau, elle vit une légère lueur violette, presque imperceptible, qui disparut aussitôt qu’elle l’eut remarquée.

Mariana sut alors que quelque chose était en train de se produire, quelque chose de bien plus grand qu’eux. Elle se promit de rester forte, pour sa fille, pour Arnold. Mais elle ne pouvait plus ignorer la vérité : la légende de Lavande n’était pas qu’un conte, et leur fille était liée à cette histoire d’une manière qu’elle devait encore comprendre.

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