Date : 20 juin 2026

Heure : 09h00

L’été s'était installé dans la vallée, enveloppant la communauté dans une chaleur douce. Les fleurs sauvages bordaient les sentiers de pierre et les arbres bruissaient sous le vent léger. Malgré l’apparente tranquillité des lieux, une tension grandissante pesait sur **Mariana** et sa famille. Violette, âgée de dix mois, continuait d’éveiller une méfiance croissante parmi les habitants. Ses pouvoirs, bien qu’encore incompris, étaient devenus plus puissants et imprévisibles.

Ce matin-là, Mariana observait Violette, assise dans l'herbe à quelques mètres, jouant avec Clara, la fille d'Élise. Les deux petites filles, devenues inséparables, partageaient une complicité presque magique, renforcée par leurs dons surnaturels. Violette babillait joyeusement, ses mains délicates touchant l'herbe, mais une légère lueur argentée semblait émaner de sa peau, signe inquiétant que son pouvoir se manifestait inconsciemment.

Élise, assise à côté de Mariana sous l’ombre d’un vieux chêne, jeta un coup d’œil inquiet vers sa fille. « Elles deviennent de plus en plus puissantes ensemble, tu ne trouves pas ? » murmura-t-elle. « Clara… elle n'a jamais eu autant de contrôle sur l'eau avant. »

Mariana acquiesça.

« Oui. C’est comme si Violette amplifiait tout autour d’elle. Je crains que la communauté ne le remarque bientôt. »

Le silence s’étira entre elles, seulement brisé par le doux bruissement des feuilles. Depuis trois mois, les murmures au sujet de Violette s’étaient intensifiés, et certains membres, influencés par Maël, le vieux sage, commençaient à exprimer ouvertement leur méfiance. Pour Mariana, cette pression devenait insupportable. Sa fille n'était qu'un bébé, mais ici, elle était perçue comme une menace.

Heure : 09h30

Alors que Violette et Clara jouaient près du petit ruisseau qui traversait les champs, un phénomène étrange commença à se produire. L'air autour des filles se mit à vibrer, comme saturé d’énergie. Le sol se fissura légèrement sous leurs pieds, et des volutes d’eau s’élevèrent du ruisseau, tourbillonnant autour des deux enfants.

Mariana sentit son cœur s'emballer. Ce n'était pas la première fois. Elle se leva d’un bond, son instinct maternel la poussant à réagir immédiatement.

« Clara ! Violette ! Arrêtez, revenez vers nous, tout va bien, » appela Élise, une note de panique dans la voix.

Mais les filles, prises dans une sorte de transe, ne réagirent pas. Les mains de Clara s’étendaient vers l’eau, cherchant à la contrôler, tandis que Violette, les yeux brillants d’une lueur argentée, semblait être la source de cette perturbation. La nature autour d'elles paraissait fléchir sous leur pouvoir combiné.

Mariana courut vers Violette, la prenant délicatement dans ses bras, tandis qu'Élise attrapait Clara, tentant de la calmer.

« Tout va bien, Violette, je suis là, calme-toi… » murmura Mariana, en caressant doucement les cheveux de sa fille. Mais même après avoir été soulevée du sol, l’énergie qui entourait Violette restait palpable, une force invisible mais puissante.

Les mères parvinrent à apaiser les petites, et peu à peu, la tension dans l’air s’évanouit. L'eau retomba en éclaboussant les bords du ruisseau, et le sol se stabilisa, mais le choc restait vif. Elles avaient failli provoquer un désastre.

Mariana, encore tremblante, regarda Élise.

« Elles sont de plus en plus puissantes. Ce n’est plus quelque chose que nous pouvons cacher… » murmura-t-elle, la voix cassée.

Élise acquiesça, l'inquiétude se lisant dans ses yeux.

« Il faut faire quelque chose. Si Maël ou Sélène voient ça… »

Heure : 10h00

De retour dans la communauté, l’incident s'était déjà propagé. Plusieurs membres avaient vu les effets de la manifestation de pouvoirs, et des rumeurs se répandaient comme une traînée de poudre. Maël, le vieux sage, restait plus méfiant que jamais, convaincu que la présence de Violette déstabilisait l'équilibre fragile de leur refuge. Il n’avait jamais caché ses doutes, mais cet événement semblait le conforter dans ses craintes.

Alors que Mariana s’occupait de Violette, qui s’était endormie après l’incident, Richard, le père d’Arnold, entra dans la maison. Son visage marqué par l’âge semblait plus grave que d'habitude.

« J’ai entendu ce qui s'est passé ce matin, » dit-il doucement en s’asseyant à côté de sa belle-fille. « Maël est en train de monter les anciens contre vous. Il pense que Violette est devenue trop puissante et qu'elle attire l'attention de forces extérieures. »

Mariana sentit un frisson glacial lui parcourir la nuque. Cela signifiait qu’ils étaient en danger.

« Que pouvons-nous faire, Richard ? » demanda-t-elle, la voix tremblante. « Je ne peux pas laisser Maël nous chasser… Violette n’a même pas conscience de ce qu’elle fait. »

Richard secoua la tête avec un soupir.

« Je vais parler à Maël. Il a toujours respecté mon opinion, même s’il est rigide. Je vais essayer de le calmer, de lui faire comprendre que Violette n’est qu’une enfant. »

Mariana le regarda avec espoir, bien qu’elle sache que Maël était têtu. Mais si quelqu’un pouvait encore raisonner le vieux sage, c’était Richard.

Heure : 14h00

Richard marcha lentement jusqu'à la maison de Maël, située au cœur de la communauté. L’air était lourd de chaleur, mais aussi de tension. Lorsqu’il arriva, il trouva Maël assis à l’extérieur, observant la vallée d’un regard distant.

« Tu viens me convaincre, Richard ? » lança Maël d’une voix rauque, sans même tourner la tête.

Richard prit place à ses côtés, laissant le silence s’étendre quelques instants avant de répondre.

« Tu sais que Violette n’est qu’une enfant, Maël. Elle ne contrôle pas encore ses pouvoirs, mais cela ne signifie pas qu’elle doit être vue comme une menace. »

Le vieux sage soupira, son regard toujours fixé au loin.

« Elle est plus qu’une enfant, Richard. Elle attire l’attention. Tu l’as vu toi-même, cette énergie qui l’entoure… elle est dangereuse. Nous avons déjà vu ce genre de pouvoir détruire des familles, des communautés. »

Richard fronça les sourcils.

« Tu crois vraiment que la chasser réglera quoi que ce soit ? Si elle part, elle sera encore plus vulnérable aux forces extérieures. Et crois-moi, ceux qui recherchent des enfants comme Violette ne reculeront devant rien. »

Maël resta silencieux, ses doigts tapotant lentement l'accoudoir de sa chaise.

« Peut-être… » murmura-t-il enfin. « Mais chaque jour qu’elle passe ici, elle met notre communauté en péril. »

Richard se redressa, tentant de maintenir son calme.

« Je comprends tes inquiétudes. Mais nous devons l’aider à contrôler ses pouvoirs, pas l’abandonner. Nous avons les connaissances ici pour l’entraîner, la guider. La réponse n’est pas de la chasser. »

Maël tourna enfin la tête vers Richard, son regard lourd de scepticisme.

« Peut-être as-tu raison. Mais si quelque chose tourne mal, si elle perd le contrôle encore une fois, je ne serai plus le seul à vouloir qu’elle parte. »

Heure : 17h00

Après l'échange tendu entre Richard et Maël, Mariana sentit la pression monter. Arnold, quant à lui, avait pris une décision difficile. Matheo, leur fils de Sept ans, avait ressenti l’inquiétude qui régnait dans la maison, mais personne ne lui avait encore expliqué la véritable nature de la situation. Ce soir, Arnold savait qu'il devait lui parler.

Assis à côté de son fils sur les marches de la maison, Arnold observait Matheo, qui jouait distraitement avec une petite branche. Le garçon était vif, curieux, mais ces derniers mois, une certaine tristesse l’habitait.

« Matheo, tu sais que Violette est spéciale, » commença Arnold doucement. « Elle a des capacités que d’autres n’ont pas, et parfois, ces capacités font peur à certaines personnes. »

Matheo leva les yeux vers son père, confus.

« Pourquoi est-ce qu’elle fait peur ? C’est juste ma petite sœur. Elle ne veut pas faire de mal, je le sais. »

Arnold sourit tristement.

« Tu as raison. Elle ne veut pas faire de mal. Mais elle a un pouvoir qu’elle ne contrôle pas encore, et certains ici pensent que cela peut être dangereux pour nous tous. »

Matheo fronça les sourcils.

« Est-ce que je dois avoir peur de Violette ? »

Arnold sentit un nœud se former dans son estomac.

« Non, Matheo. Tu ne dois jamais avoir peur de ta sœur. Elle t’aime, et elle ne te ferait jamais de mal. Mais maman et moi devons l’aider à apprendre à maîtriser ce pouvoir. Et pour ça, nous avons besoin que tu sois courageux, d’accord ? »

Matheo hocha la tête, bien qu’il ne comprît pas tout. Arnold savait que c’était suffisant pour le moment.

Heure : 21h00

Alors que la nuit tombait, Mariana, épuisée par les événements de la journée, s’assit sur le rebord de la fenêtre, tenant Violette dans ses bras. La petite fille dormait paisiblement, inconsciente des troubles qui l’entouraient. Mariana se demandait combien de temps encore ils pourraient rester ici. Richard avait tenté de calmer Maël, mais elle savait que l’opinion du sage ne changerait pas si facilement.

Arnold entra dans la pièce, s’approchant doucement de sa femme.

« J’ai parlé à Matheo. Il comprend mieux maintenant. Mais… je pense que nous devons envisager de partir, Mariana. Si Maël ne change pas d’avis, nous n’aurons pas d’autre choix. »

Mariana serra un peu plus fort Violette contre elle, son cœur battant la chamade.

« Où irions-nous, Arnold ? »

Arnold s’assit à côté d’elle, le regard fixé sur leur fille.

« Mon père a parlé d’un autre endroit. Un lieu encore plus isolé. Peut-être que là-bas, nous pourrions trouver la paix. »

Le silence s’étira entre eux, lourd de décisions non prises. La nuit avançait, et avec elle, la certitude que leur avenir dans cette communauté devenait de plus en plus incertain.