Chapitre 29

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Date : 15 août 2026

Heure : 10h30

L’été s’étirait longuement sur la vallée, plongeant la communauté cachée dans une lumière vibrante et dorée. Le ciel était d’un bleu pur, sans nuages, et la chaleur semblait peser sur tout ce qui l’entourait. Les herbes hautes, bordant les sentiers pierreux, se balançaient doucement sous la caresse d’une brise tiède. Malgré la beauté du paysage, l’atmosphère à l’intérieur de la communauté était tout sauf paisible.

Mariana marchait lentement vers la place principale, tenant Violette, sa petite fille de dix mois, dans ses bras. Le village, avec ses maisons de pierre aux toits de chaume, dégageait une sérénité trompeuse. Des bannières colorées, fanées par le soleil, pendaient le long des rues, mais les visages des villageois qui s’étaient assemblés pour la réunion communautaire reflétaient la peur et la suspicion. Les murs de pierres séculaires, couverts de mousse, semblaient étouffer les voix, transformant les murmures en une cacophonie discrète mais oppressante.

Matheo, son fils de sept ans, trottinait devant elle, lançant parfois des regards inquiets vers sa mère et sa petite sœur. Le garçon sentait la tension, bien qu'il ne comprît pas encore totalement ce qui se passait. Ses cheveux bruns bouclés brillaient sous le soleil, mais ses épaules étaient basses, trahissant son inquiétude.

Autour d'eux, les membres de la communauté avaient pris place sur des bancs en bois usés par le temps, disposés en cercle autour d’une estrade improvisée. Maël, le vieux sage, se tenait déjà là, drapé dans une longue robe grise, son visage marqué par les années et la dureté de ses convictions. Sélène, une femme aux traits durs et au regard perçant, se tenait non loin de lui, ses bras croisés et son visage fermé.

Heure : 11h30

Alors que la réunion avançait, une étrange vibration envahit l’air. Mariana sentit une tension familière, une énergie qui semblait se condenser autour d'elle. Elle baissa les yeux vers Violette, et son cœur se serra. Sa fille, d’ordinaire calme dans ses bras, avait soudainement cessé de babiller. Son regard était fixe, brillant d’une lueur argentée. Mariana sentit un frisson lui parcourir la nuque. Le temps sembla ralentir autour d’elle.

Soudain, tout éclata. Un souffle invisible émana de Violette, et tout ce qui se trouvait autour d’elle réagit. Les pierres au sol commencèrent à trembler, les outils laissés sur les bancs se soulevèrent doucement, lévitant dans un silence inquiétant. Les villageois, d’abord figés par la surprise, reculèrent précipitamment. Des cris perçants déchirèrent l’air, amplifiés par les échos renvoyés par les maisons de pierre.

Le sol sous leurs pieds vibrait, et une étrange force faisait onduler l’herbe et les feuillages. Mariana sentit son cœur s’emballer. L’énergie émanant de Violette était incontrôlable. Autour d’elles, des morceaux de bois flottaient, comme suspendus dans l’air, attirés par une puissance qu’aucun des habitants ne comprenait. Le ciel, si bleu quelques instants plus tôt, semblait s’assombrir légèrement, comme si la nature elle-même répondait à l’appel involontaire de l’enfant.

« Violette, chérie, calme-toi… » murmura Mariana, serrant sa fille contre elle, mais le pouvoir de Violette semblait avoir échappé à tout contrôle.

Non loin de là, Matheo, les yeux écarquillés de peur, restait figé. Le garçon n’avait jamais vu sa sœur déclencher une telle force, et bien qu'il ait toujours su que Violette était différente, cette vision l'effrayait.

« Maman, qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi Violette fait ça ? » demanda-t-il, sa voix tremblante.

Heure : 12h00

Après de longues minutes de chaos, **Richard**, le père d’Arnold, se précipita aux côtés de Mariana. Ses cheveux gris dansaient légèrement dans le vent chaud, et son visage habituellement serein était marqué par la gravité de la situation. **Maël**, qui observait la scène depuis l'estrade, ne tarda pas à reprendre la parole. Sa voix, dure et autoritaire, résonna dans l’air oppressant.

« Vous voyez ! » s'écria-t-il, les bras tendus vers la foule. « C’est ce que j’avais prédit. Cette enfant est un danger. Elle met en péril notre communauté. Nous ne pouvons plus fermer les yeux. Il est temps de prendre une décision ! »

Les murmures dans la foule devinrent plus forts, une vague de peur traversant les rangs des villageois. Ils regardaient Mariana et Violette comme si elles étaient des étrangères, des intruses menaçant leur mode de vie. Les feuilles des arbres bruissaient autour d’eux, renforçant le sentiment d’angoisse générale.

Mariana sentait son cœur battre douloureusement dans sa poitrine. Elle savait que Maël cherchait un prétexte pour éloigner sa famille depuis des mois, mais entendre ces accusations devant tout le monde la paralysait de terreur. Elle ouvrit la bouche pour protester, mais Richard, son visage sévère, la devança.

« Maël, c’est encore un bébé, » dit-il d’une voix forte et assurée. « Violette n’a aucun contrôle sur ce qui lui arrive. Elle ne peut pas être tenue responsable de ce qui se passe. »

Les membres de la communauté restaient immobiles, attentifs, mais craintifs. Maël ne lâchait pas prise.

« Tu es aveugle, Richard. Cette enfant est un aimant pour les forces que nous avons toujours cherché à éviter. Si elle reste, elle nous détruira tous. »

Richard inspira profondément, ses mains tremblant légèrement de frustration.

« Il y a un autre moyen. Notre famille porte ces dons depuis des générations. Il existe un rituel qui permettrait de sceller une partie des pouvoirs de Violette, de les contenir. Cela nous donnerait le temps de l'aider à comprendre ce qu’elle est sans risquer que cela se retourne contre nous. »

Un silence pesant s'installa, seulement brisé par le bruissement des arbres et le chant des cigales, amplifiant l’attente.

« Et que nous coûterait ce rituel ? » demanda Maël, le regard perçant, trahissant son scepticisme.

Richard redressa la tête.

« Il prendra du temps, mais il ne représente aucun danger. C’est notre meilleure option pour éviter de la chasser et de l’abandonner aux forces extérieures qui la recherchent. »

Maël resta un moment silencieux, ses yeux durs observant tour à tour Richard, Mariana, et la foule. Bien qu'il hésitât, il savait que les habitants réclameraient bientôt des mesures plus radicales.

Heure : 15h00

De retour dans leur maison, une petite bâtisse de pierre aux volets bleus écaillés, Mariana et Arnold étaient plongés dans une discussion tendue. Violette s’était enfin endormie dans son berceau, un contraste frappant avec le chaos qu’elle avait provoqué plus tôt. L’air à l’intérieur de la maison était lourd, saturé de chaleur et de non-dits.

Mariana fixait le sol en terre battue, ses pensées tourbillonnant. Même si le rituel proposé par Richard fonctionnait, il était évident que la communauté ne ferait jamais confiance à Violette. Le visage de Maël, figé dans une méfiance froide, revenait sans cesse dans son esprit.

« Ils ne cherchent qu’une excuse pour nous chasser, » murmura-t-elle enfin, ses mains crispées sur la table en bois. « Même si nous réussissons à contrôler ses pouvoirs, ils ne la verront plus jamais comme une simple enfant. »

Arnold, debout près de la fenêtre, regardait le jardin à travers la lumière déclinante.

« Je sais… Mais que pouvons-nous faire d'autre ? »

Avant que Mariana ne puisse répondre, un coup léger à la porte attira leur attention. C’était Élise, la mère de Clara, qui entra précipitamment, les joues rougies par l’effort. Ses yeux étaient agrandis par l'inquiétude.

« J’ai entendu ce qui s'est passé après la réunion, » dit-elle d’une voix basse, en se rapprochant de Mariana. « Ils ne vous laisseront pas tranquilles, même avec ce rituel. Maël a trop d’influence. Il trouvera un moyen de vous pousser à partir. Vous devez envisager de fuir. »

Mariana leva les yeux, sentant le poids de ses mots.

« Mais où irions-nous ? »

Élise prit une inspiration tremblante.

« Il y a un endroit… Richard m'en a parlé. Un refuge encore plus isolé, où les enfants comme Violette et Clara pourraient être protégés. Je veux partir avec vous. Clara est trop liée à Violette. Si elles sont séparées, je crains que cela ne déchaîne encore plus de pouvoir en elles. »

Mariana fixa Élise, surprise par la détermination de son amie.

« Tu veux vraiment partir ? Et tout abandonner ici ? »

Élise hocha la tête sans hésiter. « Oui. Ce que j’abandonne ici n'a plus d’importance. Ce qui compte, c’est Clara. »

Heure : 18h00

Tandis que le soleil baissait à l'horizon, projetant une lumière orangée sur les murs de pierre, Arnold s'assit avec Matheo sur les marches de la maison. Le garçon avait perçu les tensions grandissantes au sein de la communauté, mais il n'avait jamais réellement compris la gravité de la situation.

Matheo, » commença Arnold doucement, posant une main rassurante sur l’épaule de son fils. « Il y a quelque chose que tu dois savoir. »

Matheo leva ses yeux bruns vers son père, ses sourcils froncés, sa mâchoire tendue par l’inquiétude.

« C’est à cause de Violette, pas vrai ? Elle fait peur aux gens. Pourquoi ? »

Arnold prit une profonde inspiration avant de répondre.

« Ta sœur est spéciale, Matheo. Elle a des pouvoirs que d’autres n’ont pas. Et quand on ne comprend pas quelque chose, parfois ça fait peur. »

Le garçon fronça les sourcils, cherchant à comprendre.

« Mais Violette ne fait pas exprès. Elle ne veut pas faire de mal, elle est trop petite. »

« Tu as raison, » répondit Arnold en esquissant un sourire triste. « Mais certaines personnes ici ne voient pas les choses comme ça. C’est pourquoi nous devons la protéger. »

Matheo resta silencieux, le regard rivé sur le sol, puis murmura :

« Est-ce qu’on va devoir partir ? »

Arnold échangea un regard avec Mariana qui les observait depuis la porte.

« Peut-être, » répondit-il finalement. « Nous devons nous préparer, au cas où. Mais je te promets que tout ira bien, quoi qu'il arrive. »

Le garçon hocha la tête, bien qu’il ne comprît pas entièrement la situation. Mais il faisait confiance à ses parents.

Heure : 22h00

Cette nuit-là, un vent léger soufflait à travers la fenêtre ouverte de la chambre de Violette. La lumière argentée de la lune baignait le petit visage endormi de l’enfant, un contraste frappant avec les événements chaotiques de la journée. Mariana, assise à côté du berceau, veillait sur sa fille, incapable de fermer l'œil.

Le calme de la pièce ne parvenait pas à apaiser ses pensées tourbillonnantes. Partir était leur seule option, mais quitter cette communauté, aussi imparfaite soit-elle, représentait un saut dans l’inconnu. Elle savait qu’ils ne seraient jamais en sécurité ici, mais l’incertitude de ce qui les attendait au-delà des montagnes la terrifiait.

Le vent continuait de souffler doucement, faisant frémir les feuilles des arbres dehors. La nuit était calme, mais quelque part au fond de son cœur, Mariana savait que ce calme ne durerait pas.

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