Chapitre 32

6 minutes de lecture

Date : 22 février 2027

Heure : 06h30

Une semaine s'était écoulée depuis que Violette, âgée d’un an et quatre mois, avait commencé à manifester des comportements de plus en plus troublants. Elle continuait à attirer l’attention avec des paroles étranges, mais ce matin-là, un nouvel événement marqua un tournant dans l'inquiétude grandissante de Mariana et Arnold.

Le vent froid de l'hiver soufflait contre les fenêtres, et la lumière blafarde du jour perçait à peine à travers les lourds rideaux. Mariana, assise près de la cheminée, surveillait distraitement ses enfants. Matheo jouait silencieusement avec des blocs de bois, tandis que Violette, assise sur le tapis, regardait fixement la fenêtre. Ses grands yeux violets semblaient observer quelque chose que personne d'autre ne pouvait voir.

Soudain, elle parla d'une voix calme et innocente :

« Le pigeon va frapper la fenêtre dans une minute. »

Mariana, accoutumée aux remarques étranges de sa fille, fronça les sourcils mais ne réagit pas immédiatement. Arnold, qui se trouvait dans la cuisine, entendit la phrase mais ne s'en inquiéta pas davantage. Ce n’est qu’un instant plus tard que Mariana, le cœur battant, sentit que quelque chose n'allait pas.

Elle se leva lentement et s'approcha de la fenêtre. Le silence dans la pièce devenait de plus en plus lourd. Puis, sans prévenir, un coup sourd résonna contre la vitre. Un pigeon venait de heurter la fenêtre, exactement comme Violette l’avait annoncé.

Mariana se figea, fixant l’oiseau assommé sur le rebord. Le souffle court, elle sentit son cœur battre dans sa poitrine. Arnold arriva précipitamment à ses côtés, attiré par le bruit.

« Qu’est-ce qui s’est passé ? » demanda-t-il en voyant l'oiseau à travers la vitre.

Mariana se tourna vers lui, la gorge serrée.

« Violette… elle l’a dit. Elle a dit qu’un pigeon frapperait la fenêtre dans une minute. »

Arnold fixa sa femme, incrédule, avant de jeter un regard à Violette, toujours assise tranquillement sur le tapis.

« Tu plaisantes ? Elle a vraiment dit ça ? »

Mariana hocha la tête, ses mains tremblantes.

« Oui, juste avant que ça arrive. »

Arnold soupira, passant une main sur son visage, cherchant à rationaliser ce qui venait de se passer.

« Peut-être que c’était une simple coïncidence. Les pigeons volent parfois trop bas, surtout en hiver. »

Mariana secoua la tête, ses yeux remplis d'une inquiétude croissante. « Ce n’était pas une coïncidence, Arnold. Elle l’a dit avec une telle certitude. Comme si elle savait exactement ce qui allait se passer. Ce n'est pas la première fois qu'elle fait ça. »

Arnold jeta un coup d'œil vers Violette, qui jouait maintenant avec une peluche, complètement indifférente à la conversation de ses parents.

« Tu veux dire quoi, Mariana ? Tu crois qu'elle peut... voir l’avenir ? »

Mariana hésita, cherchant les bons mots.

« Je ne sais pas, mais ça ne me semble pas normal. Ce matin encore, elle a dit que la tempête arriverait cet après-midi, et maintenant le ciel est en train de s’assombrir. Elle ne peut pas savoir ces choses par hasard. »

Arnold soupira profondément, visiblement désemparé.

« Peut-être qu’elle capte des choses que nous ne remarquons pas. Peut-être qu’elle est juste… très observatrice. »

Mariana secoua la tête avec frustration.

« Non, Arnold. Ce n’est pas ça. Elle parle de choses qui n’ont aucun sens pour une enfant de son âge. La Rivière des Esprits, Céleste… et maintenant, elle prédit des événements avant qu’ils ne se produisent. Tu ne peux pas simplement tout expliquer par la chance ou la coïncidence. »

Arnold croisa les bras, fixant le sol avec intensité. Il savait que Mariana avait raison, mais l’accepter lui faisait peur. Il redoutait ce que cela pourrait signifier pour leur fille, et pour eux.

« Qu’est-ce qu’on est censés faire ? » murmura-t-il enfin, brisant le silence.

Mariana secoua la tête, les larmes montant à ses yeux.

« Je ne sais pas, Arnold. Mais ce n’est pas normal. Rien de tout ça ne l’est. »

Heure : 13h00

Alors que la journée avançait, le ciel s’était progressivement assombri, tout comme Violette l’avait prédit. Des nuages noirs couvraient maintenant la vallée, et le vent s’était levé, rendant l’atmosphère plus oppressante. Le feu crépitait dans la cheminée, mais même sa chaleur ne parvenait pas à réchauffer l'angoisse qui s'était installée dans la maison.

Mariana regardait par la fenêtre, son esprit tourmenté par ce qui s’était passé ce matin. Matheo était retourné jouer, mais il semblait plus distant, perturbé par la tension palpable entre ses parents.

Arnold se tenait à ses côtés, observant lui aussi la tempête qui s’annonçait.

« Tu penses vraiment qu’elle peut… voir ces choses ? » demanda-t-il doucement.

Mariana prit une grande inspiration. « Je ne sais pas exactement ce qui se passe avec elle, Arnold. Mais tout cela… ces prédictions, ces paroles, ce ne sont pas des coïncidences. Il y a quelque chose de plus. Elle semble… connectée à quelque chose d’autre. »

Arnold baissa la tête, les poings serrés.

« Et cette… Céleste dont elle parle ? Tu crois que ça a un lien avec tout ça ? »

Mariana ferma les yeux un instant, rassemblant ses pensées.

« J’ai fait des recherches sur la légende de Lavande, tu le sais. Céleste est un nom qui revient dans les récits. Une figure mystérieuse, censée guider Lavande dans l’utilisation de ses pouvoirs. Mais je ne comprends pas pourquoi Violette parle d’elle. Comment pourrait-elle savoir tout ça ? »

Arnold resta silencieux un moment, luttant avec ses propres peurs.

« Peut-être que ce n’est pas notre Violette qui parle… » murmura-t-il finalement, l'idée terrifiante échappant à ses lèvres.

Mariana sentit son cœur se serrer à cette pensée. L’idée que leur fille, si jeune, soit influencée par une force extérieure, ou pire, qu’elle soit une réincarnation de cette Lavande légendaire, la terrifiait au plus profond d’elle-même. Mais il y avait trop de signes, trop de coïncidences pour qu’ils puissent continuer à l’ignorer.

Heure : 16h00

Le vent soufflait violemment autour de la maison, les branches des arbres fouettant contre les murs. La tempête était arrivée, tout comme Violette l’avait prédit, et elle était plus violente que Mariana ne l’avait imaginé. Assise près du feu, elle tentait de se réchauffer, mais son esprit restait focalisé sur ce que sa fille pouvait voir, sur ce qu’elle semblait savoir.

Un léger bruit attira soudain son attention. Un grattement, à peine audible, venant de la porte d’entrée. Mariana se leva prudemment, se demandant si elle avait rêvé, mais le bruit se répéta, cette fois plus fort.

Elle s’approcha de la porte, hésitant un instant avant d’ouvrir. Une bourrasque glaciale s’engouffra dans la maison, faisant vaciller les flammes dans la cheminée. Devant la porte, rien ne semblait anormal. Mais lorsqu’elle baissa les yeux, elle aperçut un petit morceau de papier plié sur le pas de la porte.

Les mains tremblantes, elle ramassa le papier et l’ouvrit doucement. Ce qu’elle lut lui glaça le sang.

"Vous ne pouvez pas fuir ce qui est inévitable. Céleste revient."

Heure : 18h00

Mariana se tenait dans la chambre de Violette, observant sa fille jouer calmement avec ses jouets. Tout semblait paisible, comme si le message qu’elle avait trouvé plus tôt n’avait jamais existé. Mais la vérité était là, palpable, dans l’air autour d’eux.

Elle se pencha pour ramasser un dessin que Violette avait fait. Un frisson la traversa en voyant les détails sombres et inquiétants sur le papier. Une clairière obscure, entourée d’arbres tordus, avec une rivière noire serpentant au milieu. Et au coin du dessin, une silhouette floue, à peine visible, se tenait à l’écart, comme une présence silencieuse.

« Violette, qui est-ce ? » demanda Mariana, sa voix vacillante malgré elle.

Sans lever les yeux, Violette répondit d’une voix douce et calme.

« Céleste. Elle m’a dit de la dessiner. »

Mariana sentit un frisson parcourir son échine. Ce nom, ce dessin, tout cela la dépassait. Mais la réponse de sa fille fut encore plus troublante.

« Pourquoi Céleste te parle-t-elle ? » demanda-t-elle, à moitié effrayée par ce qu’elle entendrait.

Violette leva alors la tête, son regard innocent, mais empli d’une étrange maturité.

« Parce qu’elle m’attend là-bas. »

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