Chapitre 43

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Date : 14 mars 2027
Heure : 10h30

Le ciel gris pesait lourdement sur le village ce matin-là, accentuant l’atmosphère morose qui régnait dans la petite maison. Les volets légèrement entrouverts laissaient filtrer une lumière froide et terne, se mêlant aux ombres dansantes des arbres dénudés. Mariana, assise dans la cuisine, regardait son café refroidir dans sa tasse, son esprit embrouillé par les événements récents.

Louise allait arriver sous peu. Elle lui avait promis de passer pour discuter, et Mariana sentait que cette conversation serait difficile. Les choses avaient pris une tournure si étrange depuis l’arrivée de la Confrérie dans leur vie. Pourtant, une part d’elle s’accrochait à cet espoir que Violette et Matheo pourraient revenir à la normale.

Le bruit léger de la porte d’entrée signalait l’arrivée de Louise. Mariana se leva et alla l’accueillir dans le salon. Louise, avec son manteau épais et ses cheveux légèrement ébouriffés par le vent, avait l’air préoccupé.

« Salut, Mariana, » dit-elle doucement en entrant, son regard se posant rapidement sur elle. « Comment tu vas ? »

Mariana haussa les épaules en réponse, ne sachant pas vraiment quoi répondre. Louise enleva son manteau et s’installa sur le canapé, observant la pièce avec une certaine appréhension.

Heure : 11h00

Les deux femmes étaient assises dans le salon, des tasses de café entre les mains. Louise semblait mal à l’aise, ses doigts jouant nerveusement avec le bord de sa tasse.

« Je voulais te parler de quelque chose… » commença Louise, sa voix teintée d’hésitation. « Je sais que tu travailles avec la Confrérie pour Violette et Matheo. Je comprends que tu fasses tout ce que tu peux pour eux… mais… j’ai entendu des choses, Mariana. Des rumeurs. »

Mariana posa sa tasse, ses mains légèrement tremblantes.

« Des rumeurs ? »

Louise hocha la tête, visiblement inquiète.

« Oui. Certaines personnes dans le village m’ont dit que la Confrérie… enfin, qu’elle n’est pas ce qu’elle prétend être. Ils aident, oui, mais il y a toujours un prix à payer. Les enfants qu’ils prétendent "guérir" finissent par disparaître, ou pire encore, ils deviennent… différents. »

Un silence s’installa entre elles. Mariana sentit son estomac se nouer. Les doutes qu’Arnold n’avait cessé d’exprimer refaisaient surface, mais elle repoussa ces pensées. « Louise, je sais que c’est difficile à comprendre, mais la Confrérie m’a donné des preuves que ça fonctionne. Violette et Matheo ont eu des moments où ils étaient eux-mêmes, où ils me parlaient comme avant. Ça ne peut pas être une coïncidence. »

Louise fronça les sourcils.

« Mais ces moments… tu as dit qu’ils ne duraient pas longtemps, non ? Qu’est-ce qui se passe quand ils ne sont plus eux-mêmes ? »

Mariana soupira, se sentant prise entre deux forces opposées.

« Ils… ils changent, oui. Ils redeviennent distants, presque comme des étrangers. Mais je sens qu’il y a encore de l’espoir. La Confrérie essaie de les aider. Ils ne sont pas mauvais, Louise. »

Louise resta silencieuse un moment, réfléchissant aux paroles de son amie.

« J’ai pensé à les contacter aussi, » avoua-t-elle finalement.

« Mais après tout ce que j’ai entendu, j’ai des doutes. J’ai peur qu’ils ne cherchent pas à sauver les enfants, mais à les utiliser. »

Mariana, bien que troublée, secoua la tête.

« Ils ne sont pas comme ça. Ils essaient de comprendre ce qui se passe, tout comme nous. »

Heure : 11h30

Alors que les deux femmes débattaient de la Confrérie, des éclats de voix se firent entendre à l’étage. Mariana se figea, reconnaissant immédiatement les voix de Violette et Matheo. Mais cette fois, quelque chose était différent.

« Maman ! » cria Matheo, une peur palpable dans sa voix.

Mariana bondit du canapé, suivie de près par Louise. Elles montèrent précipitamment les escaliers et trouvèrent Violette et Matheo dans la chambre, debout l’un à côté de l’autre. Ce qui frappait immédiatement, c’était leurs expressions. Contrairement à l’habituelle froideur vide, ils semblaient tous deux totalement conscients.

« Maman, elle est partie, » murmura Violette, sa petite voix brisant le silence de la pièce.

Mariana s’approcha d’eux, le cœur battant à tout rompre.

« Qui est partie, ma chérie ? »

« Céleste, » répondit Matheo, la voix pleine de crainte. « Elle nous laissait seuls avant, mais maintenant… elle est plus loin. Elle ne nous contrôle plus. »

Mariana sentit un souffle d’espoir envahir son être. C’était plus long que les autres fois. Ils étaient là, devant elle, pleinement conscients. Louise, quant à elle, restait bouche bée, incapable de croire ce qu’elle voyait.

« Est-ce que… est-ce que ça va durer ? » demanda Mariana, les larmes aux yeux.

Violette secoua la tête doucement.

« Non… Elle va revenir. Elle revient toujours. Mais maintenant, on peut parler à nouveau. » Ses yeux violets brillaient d’une clarté nouvelle, comme si elle retrouvait une part d’elle-même qu’elle croyait perdue.

Mariana se tourna vers Louise, le souffle coupé.

« Tu vois ? C’est pour ça que je crois en la Confrérie. Ils les aident. Ils peuvent les sauver. »

Louise, malgré son incrédulité, ne pouvait nier ce qu’elle venait de voir. Elle s’approcha doucement de Matheo et Violette, mais garda une certaine distance.

« Vous étiez sous l’emprise de Céleste ? Vous saviez que vous étiez là, mais vous ne pouviez rien faire ? »

Matheo hocha la tête, son regard intense.

« Elle nous garde prisonniers… dans notre tête. On voit tout, on entend tout, mais on ne peut pas parler. C’est comme un rêve dont on ne peut pas sortir. »

Un frisson parcourut l’échine de Louise. Elle ne savait plus quoi penser. D’un côté, les rumeurs sur la Confrérie persistaient, mais de l’autre, il y avait ces enfants, debout devant elle, reprenant vie après des semaines de silence. Cela semblait être un miracle, mais elle restait troublée par les implications.

Heure : 12h00

Les enfants étaient retournés jouer, leur moment de lucidité s’étant prolongé bien plus que d’habitude. Mariana et Louise, toujours assises dans la chambre, étaient bouleversées.

« Qu’est-ce que tu penses de tout ça ? » demanda Mariana à voix basse, sentant que le regard de Louise vacillait entre scepticisme et espoir.

Louise resta silencieuse un moment, puis soupira profondément.

« Je ne sais pas. Ce que je viens de voir est… incroyable. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser aux rumeurs. Si c’est vrai que la Confrérie aide à libérer les enfants, pourquoi est-ce que certaines familles disent que leurs enfants disparaissent ou changent complètement après ? »

Mariana détourna les yeux.

« Peut-être qu’ils n’ont pas eu la patience… peut-être que le processus est long et difficile. » Elle voulait y croire, désespérément.

Louise prit une profonde inspiration.

« Écoute, je ne dis pas que tu as tort. Je veux croire que Violette et Matheo peuvent être sauvés. Mais sois prudente, Mariana. Je ne veux pas te voir te perdre dans quelque chose de dangereux. »

Mariana hocha la tête, bien qu’une part d’elle-même restait convaincue.

« Je fais tout ça pour mes enfants. Je ne peux pas abandonner maintenant. »

La journée se poursuivit dans un calme fragile, mais Mariana sentait que quelque chose avait changé. Violette et Matheo étaient encore là, au moins pour l’instant, et elle se raccrochait à cette petite lueur d’espoir, malgré les doutes grandissants de Louise et d’Arnold.

La vérité, pourtant, restait insaisissable.

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