Brixton.

Inutile de décrire Brixton. Le slum a réputation d'être un coupe-gorge, mais si on se mêle des ses affaires, il ne peut rien arriver de grave. Surnommé « l'âme des noirs de Grande-Bretagne », c’est un quartier très vivant, possédant une scène musicale particulièrement large et influente. On y trouve des marchés proposant des produits d’Asie, d’Afrique du Sud et même d’Amérique Latine. Un carrefour des différentes cultures du monde entier.

L’ex-flic frappe à la porte d'une maison de briques rouges délabrée. Après quelques secondes d’attente, elle entend les clés claquer contre le bois. Law tourne la poignée pour pénétrer dans le bâtiment. Une élégante dame, la soixantaine très bien conservée, l'accueille dans l'escalier.

Shoshana Voightberg, étrange personnage, surréaliste même ! Une bourgeoise parfaitement intégrée dans ce paysage de bas fonds...

La propriétaire des lieux lui fait signe de monter, Mortensen la suit. Arrivée à l’étage, elle entre dans une pièce parfaitement entretenue. Un canapé, une table basse, une cuisine américaine avec bar, décorent ce petit intérieur sobrement aménagé. Non loin, à côté de la porte, une télé ronronne une quelconque série que personne ne regarde. La marchande de rêve artificiel, trie ses drogues. Elle les pèse, puis les répartit dans des sachets. La venue inopinée de l’enquêtrice a interrompu ce petit rituel bien orchestré.

— Comme d'hab ? demande la trafiquante à Law, qui acquiesce avant de lui tendre l'argent.

La chimiste échange les billets contre le cocktail habituel de l'ex-inspectrice, qui tourne aussitôt les talons pour s'en aller. A ce moment là, Shoshana retient sa cliente par le bras et lui tend une carte de visite :

— Vas le voir.

Mortensen met la carte dans la poche arrière de son jean et sort.

*

Somewhere in Rush Common.

SUPERMASSIVE BLACKHOLE, est le nom de la boîte de nuit où Law a tendance de traîner, quand elle se sent au plus bas.

Quelle ironie !

La musique rythmée, les lumières des stroboscopes, la chaleur dégagée par tous ces corps en mouvements désordonnés, augmentent fortement les sensations provoquées par le cocktail que Law s'est injecté. C’est comme un vortex kaléidoscopique, qui l’emporte loin de sa routine amère. Noyée dans la foule Mortensen oublie. Brusquement, l'extase se transforme en enfer. Les basses provoquent de fortes nausées insoutenable. Désorientée, la jeune femme bouscule une dizaine de personnes abrutis par la musique et l’alcool, qui la séparent de la sortie de secours. Une fois dehors, elle rend toutes ses tripes. Reprenant progressivement ses esprits, Law s'adosse au mur, essoufflée. L'arrière de la discothèque donne sur une ruelle déserte et lugubre. Se sentant épiée, l’enquêtrice regarde nerveusement autour d'elle. Ne constant aucun danger, elle finit par se laisser glisser au sol. Assise par terre, adossée contre le panneau de béton glacé par la température hivernale de la nuit, Law puise dans ses dernières forces pour s'allumer une cigarette. Les mains tremblantes, elle réussit à tirer quelques lattes, puis recrache doucement la fumée comme s’il s’agissait de sa dernière bouffée d’oxygène.

— Faut vraiment que je consulte.