La veille du départ

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Le ciel bleu est parcouru de nuages blancs. Les fleurs des jardins du palais royal brillent sous les rayons du soleil. L'air nous apporte une brise rafraichissante. Il fait indéniablement beau. Quel contraste avec mon coeur ombragé !

Les rires de mon fils me tirent de mes pensées. Il court entre les arbres et les parterres de fleurs pour échapper à une petite fille aux longs cheveux noirs et aux yeux verts. Elle tente de le suivre lorsqu'il contourne l'une des fontaines en pierre, mais glisse sur le sol humide entourant la construction et tombe à plat ventre.

Elle réagit aussitôt comme tout enfant de deux ans : elle éclate en sanglots. Je me précipite vers elle et la prends dans mes bras pour m'assurer qu'elle n'est blessée. Ce n'est heureusement pas le cas. Je la réconforte donc :

- Ne pleure pas ma petite Silvia. Tu n'as rien.

Je sors mon mouchoir et essuie ses larmes. Elle se blottit ensuite contre moi le temps de se calmer. Son camarade de jeux revient vers nous en courant et lui demande :

- Est-ce que ça va Silvia ?

Elle hoche la tête et je le sermonne avec douceur :

- Tu ne devrais pas courir aussi vite quand tu joues avec elle. Elle est plus jeune que toi et aurait pu se faire mal en tentant de te rattraper. Pense à elle.

Ses sourcils s'affaissent et il baisse ses yeux violets en s'excusant :

- Pardon.

- C'est bon. L'essentiel est que personne n'est blessé.

Je repose la petite fille au sol en lui disant :

- Retourne jouer avec Alexandre.

Ce dernier la prend par la main et l'entraîne à une vitesse pus raisonnable vers un ballon avec lequel ils commencent à s'amuser.

Je les observe pendant de longues secondes en souriant. Mon regard se porte ensuite vers les fenêtres du palais et s'arrête sur celles correspondant au bureau de mon époux. Il est en train de travailler dedans. Les garçons sont certainement en train de faire des rondes dans tout le domaine pour s'assurer de la sécurité des lieux. Ils se rendent peut-être de temps à autre dans les cuisines pour chiper de la nourriture à Aurélie. Cette simple pensée me fait sourire. Robert doit aussi souvent penser à sa femme et à sa fille. Calista est maintenant Premier médecin du royaume de Forestisle et a donc bien plus de travail qu'autrefois. Voilà pourquoi je m'occupe de leur enfant en même temps que le mien. Le couple passe cependant tout son temps libre avec leur fille qu'ils aiment plus que tout. Je comprends leur sentiment étant donné que je suis moi-même parent. Je ne pensais pas que nous pourrions partager cela un jour. . .

Je suis une nouvelle fois tirée de mes pensées en sentant le ballon des enfants atterrir sur mes genoux. Ces derniers approchent au pas de course et Alexandre le ramasse en s'excusant :

- Pardon !

- Ce n'est rien.

- Madame ? m'interpelle Silvia.

- Oui ?

- Quand rentrons-nous à la maison ?

Nous nous rendons dans la capitale deux fois par an car la présence du souverain dans la cathédrale de Dianapolis est indispensable pour célébrer les cérémonies religieuses. Mathieu en profite pour s'occuper des affaires d'État qui nécessitent sa présence physique. Nous rentrons cependant à Westofrest aussitôt que tout est réglé. Les choses sont différentes cette fois :

- Nous rentrerons lorsque je serai revenue de mon voyage.

- Quel voyage ? me demande mon fils.

Je passe mon bras autour de ses épaules et l'attire contre moi en lui expliquant :

- Je dois me rendre à Fieldisle pour arranger la situation. Ils connaissent des difficultés auxquelles je dois apporter une solution pour que les choses ne s'aggravent pas. Est-ce que tu comprends ?

- Oui. Vous allez les aider.

- C'est cela.

- Ce sera long ?

- Je ne sais pas. Nous verrons bien.

- Quand commence votre voyage ?

- Je partirai demain matin.

Une lueur de tristesse traverse ses yeux violets et il passe ses bras autour de mon cou en disant :

- Je veux venir avec vous !

- Ce n'est pas possible, mon chéri. Tu dois rester ici.

- Pourquoi ?

- Qui va jouer avec Silvia si tu pars ? Elle a besoin de toi.

- On a qu'à emmener Silvia ! Tu veux venir ? ajoute-t-il à l'intention de son amie.

- Seulement si papa et maman viennent avec nous.

- Ils ne peuvent malheureusement pas venir avec moi. Ton papa doit rester ici pour veiller sur le roi et sur vous et ta maman a encore de nombreux patients qui comptent sur elle. Ils doivent rester ici car tel est leur devoir tout comme il est de mon devoir de me rendre à Fieldisle pour sortir mon peuple des difficultés dans lesquelles il s'est plongé. Chacun a un devoir en ce monde et doit tout faire pour l'accomplir.

- Quel est le nôtre ? me demande Alexandre.

- Le tien est d'obéir à tes parents et d'être là pour Silvia.

Il se blottit contre moi en murmurant d'une voix triste :

- Vous allez me manquer.

- Tu vas aussi me manquer. . .

Je tends un bras vers la petite fille qui nous observe en silence et lui dis :

- . . . ainsi que toi.

Elle se joint à notre étreinte et je les serre contre moi pendant de longues minutes.

Je m'assurerai de partir suffisamment tôt pour ne pas avoir à leur faire mes "au revoir". Je crains de ne plus avoir la force de les quitter autrement. . .

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