8. De l'autre côté

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Damien me fait un signe. Nous devons descendre pour franchir la porte céleste. Sans y réfléchir, je m’exécute. Une descente en flèche nous attend. Mais le contact de mon pied sur le sol me fait perdre l’équilibre et tomber la tête la première. Une douleur se réveille au niveau de ma cheville, je l’avais presque oublié.

En me tournant, pour m’asseoir sur mes fesses, je remarque le regard moqueur du démon. Il me tend pourtant la main, alors que des miennes, je frotte la partie enflammée de ma peau qui accueille les marques de Thémis. Des griffures, et des traces de doigts sont visibles sur la surface de mon épiderme, l’ambassadrice y a vraiment mis toutes ses forces.

— Debout petit ange, nous n’avons pas de temps à perdre, intervient Damien. Attrape ma main. Quoi ? Peu importe ce que tu as en tête à cet instant, crois-moi, tant que nous ne serons pas à l’abri, ils pourront nous retrouver.

— Ils ?

— Oui ! Les archanges, les déchus et surtout le cercle.

— Mais Hector…

— Je t’expliquerais plus tard. Dépêche-toi, ils arrivent !

Il a raison. En regardant devant nous, je peux remarquer les gardes qui courent déjà vers nous. Et en ouvrant un peu plus grand les oreilles, je perçois le battement de plusieurs paires d’ailes. Ils se rapprochent tous vers une seule et même direction, la nôtre. Dans un geste, j’entremêle mes doigts à ceux du démon.

Il m’attire à lui, et me soulève pour me remettre sur pied. Mais alors que je pose une seconde fois mes talons et mes orteils sur le sol, un courant électrique remonte dans ma jambe. Je ne vais pas pouvoir aller bien loin avec ce genre de blessure. Damien comprend que la douleur est trop intense quand un gémissement m’échappe.

Alors il me demande de m’appuyer sur lui pour avancer. Je cale donc mon bras sur son épaule tandis que lui place son bras sous mon aisselle pour tenter de me maintenir. Puis, nous partons à une allure bien plus ralentie qu’en volant. Mais d’après Damien, les déchus nous laisserons passer. Comment ? C’est la question à laquelle j’aimerais qu’il réponde.

D’un pas clopinant, nous nous dirigeons lentement vers la porte de la barrière. Les déchus, qui en gardaient l’accès jusque-là, accourent. Nous formons un drôle de duo. En cinq enjambées, les deux gardiens nous arrêtent. Intimidée, je me cache dans le dos de Damien. Comme si agir comme un enfant allait me sauver de quoique ce soit, et de qui que ce soit.

— Damien ? Bienvenue du côté sombre, mon vieux. En même temps, c’était ta destinée. C’est elle ?

— Oui. Vous avez reçu les ordres ? Nous devons passer chez le guérisseur. Thémis s’est transformée en furie, je n’avais jamais vu une telle férocité chez quelqu’un, même chez nous. À croire que les démons sont plus sages que les anges.

Perdue, j’observe avec suspicion les deux démons échanger comme si tout était normal. Sauf que rien ne l’est ! Pourtant, Damien poursuit sa conversation, demandant même à ce garde si leur guérisseur est disponible. Bien entendu la réponse est négative, à part les deux démons face à nous, aucun n’est présent de l’autre côté. Nous allons devoir nous débrouiller seuls, du moins jusqu’au retour d’Hector.

— Hector ? Demandé-je en sortant de ma cachette. Qu’est-ce qu’il a à voir avec tout ça ?

— C’est une longue histoire ?

Les deux amis me répondent en chœur. Quant au troisième démon, il reste à leurs côtés, les écoutant parler. Je fronce les sourcils quand il se penche pour chuchoter à l’oreille de celui qui discute avec Damien depuis quelques minutes. Dans un haussement de sourcils, je les vois reprendre une posture droite et nous tendre les bras.

— Vous devriez vous dépêcher de traverser. Damien, content de t’avoir revu. Bon courage pour la suite.

— Ash, articule mon démon en me tirant vers l’avant.

Un pas après l’autre, nous reprenons notre route. Je jette plusieurs regards au-dessus de mon épaule, afin d’observer les deux déchus. Celui qui n’a pas prononcé un mot, nous tourne le dos, l’arme à la main, prêt à en découdre avec le nuage d’archanges qui se précipitent dans cette direction. Le second, celui dont le nom est apparemment, Ash, me fait un signe de la main. Comme un au revoir.

Damien rit de mon comportement. Je sens que le démon en lui, se marre bien de cette situation alors que nous sommes tous deux en danger. Autant dire, qu’il ne se rend pas compte de l’ennui dans lequel nous nous trouvons. Instinctivement ma main libre se dirige vers ma bouche, et c’est sans y réfléchir que je commence à me ronger les ongles.

Mon toc est de retour en force. Le stress prenant place au creux de mon ventre, au fur et à mesure que nos pas nous mènent à la porte. C’est une fois juste devant, qu’une tape vient frapper ma main. Je me renfrogne, m’énerve pensant encore au geste de ma meilleure amie, juste avant la cérémonie, et le fiasco qui à suivi. Mais quand je relève la tête vers la personne à l’origine de cette tape. Je tombe sur le démon.

— Tu es dégoûtante pour un ange, ricane Damien au moment où nous franchissons enfin l’ouverture.

— Quoi ? Non mais tu peux parler toi ! Tu prends tout à la légère ! Tu es au courant qu’on est au milieu de l’apocalypse là ?

— Mais bien sûr… Ce sont seulement quelques gardes à la poursuite de leur peur.

C’est une blague, j’espère. Et il continue de rire, alors que moi, je suis en pleine panique. Mais en voulant, répliquer pour le faire réagir, j’ouvre enfin les yeux sur le paysage qui s’offre à nous. J’étais loin de m’attendre à ça. Mes yeux en prennent plein la vue, alors que le noir est la nuance la plus présente ici.

Une route principale, pavé de briques teintées d’une couleur sombre. Les bâtiments alentour sont colorés d’un dégradé de noir, passant de l’ébène au gris anthracite. C’est étrange mais ces couleurs forment un ensemble harmonieux, dans lequel on se plaît à avancer. Je découvre d’ailleurs au coin d’une rue, une fontaine, l’eau qui en coule est claire et semble même pure.

Une goutte d’innocence dans un tableau d’obscurité. En suivant le parcours de cette eau qui ruisselle, nous tombons sur des chemins fleuris, des parcours enjolivés par une multitude de lumières. Des coins de paradis perdus en enfer. Ce côté me paraît bien moins cruel que ce qu’on nous décrit dans les livres, ou en cours. Les anges voient même cette partie de notre communauté comme la maison des titans. Mais quand j’ouvre les yeux sur ce qui s’offre à moi, je constate que nous en sommes bien loin.

Certes ce n’est pas la partie la plus lumineuse, ni la plus pure pourtant, un sentiment de bonheur se dégage de ces rues, de ces maisons. On sent que la vie habite en temps normal cette ville, cet autre côté. L’envers du décor est bien plus magique que ce à quoi je m’attendais. J’en suis ébahie, ralentissant le pas pour en admirer chaque détail.

— Viens ! Nous devons encore parcourir quelques allées avant de pouvoir souffler.

— Tu nous amènes où ?

— Dans le sous-sol d’Hector, m’annonce Damien avec fermeté.

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