Chapitre 13
Aujourd’hui
Lilly
Mon téléphone a sonné plusieurs fois ce soir. C’est le passé qui appelle, pour abimer le présent. Ma meilleure amie me répète à quel point je lui manque. Il semblerait que je manque également à Julien, même s’il s’affichait avec cette nouvelle fille, qui était bien évidemment moins bien que moi, d’après ces propos.
Je déteste être cette femme dans ces moments, mais une part de moi est rassurée. Elle était moins bien que moi, alors je ne quitterais pas le coeur de Julien aussi facilement, n’est-ce pas ? C’est horrible mais je suis certaine qu’il n’y a que dans ces situations que nous sommes aussi dures avec les autres : lorsque nous avons peur d’être oublié, nous avons avons besoin d’être immortel. Je souhaitais égoïstement qu’il soit marqué comme je le suis, je souhaitais que chaque souvenirs mémorables reviennent dans sa tête de manière impromptu comme cela arrive encore avec moi.
J’ouvre cette bouteille que j’ai acheté en rentrant de l’école, et me sert un grand verre de vin rosé. Sa couleur rose pâle me donne le sentiment que c’est une bonne bouteille. C’est pas toujours un critère de qualité, mais j’ai très rarement été déçue. Selon moi, le prix n’est plus un véritable indicateur de confiance.
Je quitte mon appartement, le verre (bien rempli) à la main et me dirige vers la plage pour admirer la lune. Avant de claquer la porte, je regrette et attrape la bouteille. Ce soir, mon astre préféré disparait et revient quand bon lui chante. Je bois une gorgée en trinquant avec moi-même à ce passé qui ne me manque pas, mais qui me brûle de ses souvenirs. L’alcool me permet de rendre tout ça moins dur. C’est mauvais, je le sais. C’est le début d’un alcoolisme, cependant je ne peux pas me permettre de vouloir renoncer à la vie. Je veux que les épreuves soient plus légères, bien plus insouciantes. Je veux me sentir aussi légère que Dumbo s'envolant dans le ciel, laissant dans ce train infernal, toute l'horreur du monde.
- Lilly, mon coeur, tu sais tu nous manques. Ca te dirait qu’on vienne te voir ?
Je l’adore plus que tout, j’adorerais qu’elle soit là. Elle fait partie de ces personnes qui ont intégré mon coeur et qu'il sera difficile d'oublier. Je sens bien que notre amitié s'étiole également, mais je l'aime et l'aimerais plus que tout. Elle est toute ma vie, mais elle ne voit pas les cicatrices de mon âme, elle voit pas que la colle ne suffit plus à maintenir les morceaux en place. Que lorsque j’ai dû avorter de Julien et qu’il n’était pas là, je n’ai pas pensé à l’appeler elle. Pas parce que je ne lui faisais pas confiance, mais parce que je ne pouvais pas partager cette épreuve avec elle. Elle aurait rendu ça, tellement ça dérisoire alors que je renonçais à une part de moi, que je souhaitais voir grandir.
- Bien sur, baby. Quand tu veux. On prendra l’apéro comme ça ensemble ! À la tienne.
Et avant que j’ai pu raccroché, Peter se glisse derrière moi et m’embrasse sur la joue.
- OULALALA C’EST QUI ÇAAAA ?
Je regarde Peter d’un regard sévère, c’est parti pour l’interrogatoire.
- Ahaha Menya, voici Peter, un très bon ami de l’école. Peter, voici Menya ma meilleure amie qui vit encore à Paris, bien trop loin de moi, présentais-je en tournant mon écran de téléphone. Vous vous rencontrerez et pourrez discuter quand vous vous verrez. Bisous baby !
Et je clique sur le bouton rouge, pour me focaliser sur cet être qui est en train de chambouler ma vie.
- Lil ?
- Pete ?
- J’adore t’appeler. C’est un son merveilleux, ton prénom.
Puis son regard se pose sur la bouteille derrière moi.
- Tu es accompagnée ?
- Non. Oh, tu parles pour la bouteille ? Non pas du tout. J’avais juste envie de profiter de la douceur de la soirée.
Je sais qu’il me connait et qu’il sait que c’est pour faire taire les voix dans ma tête. Mais il ne dit rien. Il me prend mon verre et boit une bonne partie. Son front reste froncé, tandis qu'il me sert contre lui. Peter est ce type d'homme qui ne parle pas pour ne rien dire, alors au lieu de forcer quelque chose, il éloigne ma tristesse en me confinant dans ces bras.
- Alors je t’accompagne.
C’est la meilleure proposition de la soirée. Peter porte une belle chemise bleue ciel, mettant en avant son torse musclé. Lorsque la tête commence à me tourner et que je rigole à toutes les blagues idiotes qu’il peut dire, on comprend tous les deux qu’il est temps de rentrer. Sauf que mon désir pour lui s’est décuplé. Mon moyen de rendre les problèmes plus simple, s’applique également aux hommes.
- Tu préfères être seule ce soir ?
- Oui, NON
Acceptant à contre coeur mon envie, il me dit au revoir et pendant que sa tête se décolle de mes joues, je vois sa bouche revenir vers mes lèvres. Son regard est devenu plus sombre d’un désir que je ne pensais moi même plus ressentir. Ses doigts se glissent dans mes cheveux et lorsque ses lèvres rencontrent les miennes, c’est une envolée d’abeilles qui viennent piquer mon ventre. Son autre main attrape la mienne et la serre fort. Ses bisous sont dévorants. Parfois, il s’arrête et me regarde afin de déterminer si ce qu’il vient d’entreprendre est une bonne chose. Dans ces moments là, sa main quitte mes cheveux et caresse ma joue, ma bouche, mon cou. Puis ses lèvres reprennent leur activité. Parfois elles s’aventurent sur mon visage et câlinent mon front, mes joues, mon cou. Et parfois ce sont ses dents qui me retiennent à lui.
Il sait que j’ai le coeur abimé, qu’il en reste une faible partie que je tente tant bien que mal de reconstruire. Telle une plante fanée, je le protège de ce qui pourrais l’anéantir définitivement afin de le faire renaître.
Je viens de découvrir que Peter à un désir plutôt violent. La tendresse exprimée via son amour est toujours présente, mais il est plus féroce, plus possessif. Comme une force animal, il me dévore. La flamme de son désir augmente la température ambiante.
Mon sexe comment à pulser de désir, au même rythme que sa langue qui s’enfonce dans ma bouche. Je le veux. Je le veux maintenant.
- J’ai menti. Je veux que tu restes avec moi.
Le sourire de Peter s’élargit.
- Lil ?
- Pete ?
- Tu crois que c’est une bonne idée ?
- Je préfère ne pas réfléchir, crois moi…
- On peut plutôt parler de ce qu’il se trame dans ta tête ?
L’air se refroidit. Je ne veux pas parler. Je souhaite juste que le temps s’arrête, que cet instant dure une éternité. Cela fait des mois que je n’ai pas été aussi légère. Les problèmes, le passé, ma mère, ma meilleure amie, Paris, tout ça me semble loin. Peter a volé, avec ses baisers, ma peine. En échange, il m’a offert une bulle de bien être.
On ne te parle jamais de ce simple garçon, que tu croises par hasard et qui te sauve malgré tout, avec tout son amour comme bouclier et toutes ses promesses comme avenir.
Mais comme toute bulle, il y a un moment où elle éclate.
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