Chapitre 17

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- Viens ici, Anaël.

L’angelot obéit sans attendre et s’agenouilla sagement à côté de Maître Arkes. Depuis qu’il l’avait fait partir dans son propre monde, sans même le toucher, leur relation avait énormément évolué. À chaque fois que Maître Arkes lui parlait, il avait espoir qu’il lui offre de nouveau un tel moment et même s’il ne le faisait pas, Anaël n’avait jamais eu à souffrir de ses choix. Tout était toujours raisonnable.

- La défenseuse des droits Djinns, Aeternia, va arriver d’une minute à l’autre. J’aimerais que nous signions ton contrat avant son arrivée. J’ai rédigé quelque chose de basique. Il s’agit d’un contrat temporaire pour un mois ou moins sans possibilité de libération malheureusement ni possibilité de cession.

Il le lui tendit. Les doigts de l’angelot tremblaient lorsqu’il saisit le contrat. Lentement, il le lut sans vraiment comprendre. Le papier était un cadre légal permettant de protéger le soumis de potentiel abus. Habituellement il se négociait d’un Maître à un autre Maître et le soumis était tout juste consulté. Le Maître référent était censé le connaître et faire au mieux pour lui. Ce que proposait Arkes, l’air de rien, c’était de devenir ce Maître référent qui négocierait pour lui… et en attendant, le contrat stipulait un nombre d’interdits incroyablement longs et quelques pratiques minimes autorisées. Pas de sexe avec lui ce qui impliquait l’absence de fellation et de pénétration. Une annotation avait été ajoutée indiquant qu’il pouvait être amené dans le cadre de sa Discipline à une participation secondaire à des scènes sexuelles avec un autre soumis. C’était ce qu’il avait fait en s’occupant des mamelons de l’elfe… Dans cette liste de ce qu’ils ne feraient pas, il y avait les contentions, le bondage, l’introduction d’objets sexuels dans son corps, l’humiliation … La liste se poursuivait, encore et encore, mettant côte à côte des pratiques qui l’auraient choqué comme la douche dorée à des pratiques anecdotiques comme le port d’un bandeau. De l’autre côté du papier, dans un encart particulièrement court étaient listées les pratiques que le Maître désirait faire avec lui. Il y avait écrit l’emploi de correction douce et une série de mentions avait été ajoutée pour l’exemple dont la fessée à main nue, l’isolement social, l’exécution de tâches … Il y avait également le port d’un collier de propriété au nom de son Maître, ce qui n’était pas obligatoire, mais souvent conseillé dans certains milieux. Les corvées domestiques ne le surprirent pas, l’elfe passait une bonne partie de sa journée à nettoyer la maison, le linge ou préparer les repas. Les séances de sports obligatoires étaient plus surprenantes. C’était une chose assez courante pour les soumis en formation pourtant, surtout quand ils étaient à la recherche d’un Maître, afin de leur sculpter un corps qui pourrait attirer plus facilement. Mais si ça le surprit, c’était surtout à cause de ce que cela impliquait. Maître Arkes voulait réellement le prendre en charge, négocier un contrat pour lui et lui trouver le meilleur, sinon, pourquoi se donner autant de peine ? S’il avait voulu, il aurait fait faire du sport à son propre soumis. Ce n’était visiblement pas une pratique qui l’intéressait personnellement.

Seulement, ce n’était pas fini. En bas du contrat, Maître Arkes avait stipulé qu’il s’agissait d’un contrat temporaire qui ne servirait pas de bases à l’établissement d’un contrat permettant avec un dominant quel qu’il soit et que le soumis devrait établir une grille de référence sur laquelle le contrat définitif se baserait en priorité. Des pratiques pourraient être testées dans ce cadre, levant certains interdits potentiels.

- Y-at-il des points qui te semblent abusifs ?
- Non, Maître… Merci. Merci beaucoup.

Il sursauta quand une main vint se poser dans ses cheveux, comme pour le caresser, mais ça ne pouvait pas être réellement ça, aucun Maître n’avait jamais pris la peine de faire ce genre de chose.

- Alors je te laisse le signer et rejoindre mon garçon. Va l’aider à faire la cuisine.
- Oui, Maître.

Et aussi simplement que ça, il signa.

***

Devant la porte, Aeternia gouta la force de l’enchantement et caressa doucement les crânes de l’encadrement. Jolie magie. Elle serait difficile à briser, assez pour ne pas donner envie à qui que ce soit de rentrer chez Arkes, néanmoins, elle toqua pour s’annoncer.

L’intérieur de l’appartement avait été assez peu touché par la magie visuellement, mais la pression était de partout. Un simple coup d’œil par-dessus le soumis qui lui ouvrit suffit à le lui apprendre.

- Bonjour, Madame.
- Je suis la Défenseuse des droits Djinns, Aeternia.

L’elfe s’effaça en ouvrant la porte silencieusement. Soit il prenait une initiative que son Maître pourrait punir sévèrement, soit il avait reçu des ordres en ce sens. Ce n’était dans tous les cas pas à elle de couvrir les bêtises potentielles d’un soumis, alors elle entra. L’elfe referma derrière elle et alla toquer à une autre porte, sans doute pour faire venir son Maître et effectivement, il arriva rapidement.

- Maître Arkes, le salua-t-elle.
- Défenseuse.
- Jolie magie, rajouta-t-elle.

Arkes observa autour de lui, puis acquiesça doucement.

- J’ai malheureusement dû accomplir un vœu. Mes proches ont également été pris à parti et leurs déclarations peuvent se joindre au dossier.
- Bien. Est-ce nécessaire ?
- Non. Le contrat est signé. Une copie peut l’être afin de prouver qu’il signe de sa main. J’ai fait des progrès avec lui.

Tout en parlant, Arkes marcha jusqu’à la salle et demanda à Anaël de les rejoindre d’un simple geste de la main. La différence avec la première fois où elle l’avait vu était flagrante. Le petit était debout, dans une attitude soumise, à moitié caché derrière Arkes comme n’importe quel soumis inquiet ayant trouvé un Dominant référent. Ses ailes étaient toujours aussi abimées par contre, mais cela prendrait du temps pour guérir.

Plusieurs coups secs furent donnés à la porte, mais cette fois-ci, l’elfe ne bougea pas. Il s’était installé sagement à genoux dans un coin de la pièce, discret au possible, comme la majorité des soumis vivant dans la discipline.

- J’ai surveillé les annonces, mais le mariage n’a pas été officiellement annulé, indiqua Arkes.

Trois jours. Le mariage était aujourd’hui et nul doute que les sorciers étaient venus chercher le jeune promis. Aeternia acquiesça tranquillement. Elle avait également surveillé la potentielle annulation qui n’avait pas eu lieu. À la place, elle avait appris l’organisation d’un certain nombre de réunion chez différents défenseurs, ce qui n’était pas forcément bon signe.

- Anaël, tu as signé un contrat avec Maître Arkes ?

Le petit sursauta au simple fait qu’elle lui adresse la parole, mais dès qu’Arkes posa une main réconfortante sur son épaule, il osa répondre.

- Oui, Madame.
- Que dit-il dans les grandes lignes ?
- Il s’agit d’un contrat temporaire d’un mois.
- Le temps de te trouver un Dominant donc, ajouta Aeternia en acquiesçant.

C’était une bonne chose. Si Arkes avait récupéré le soumis pour son propre compte, les autres auraient pu l’accuser d’être intéressé par l’argent uniquement et pas par le soumis en lui-même.

- Bien, je vais aller ouvrir alors, conclut simplement la défenseuse.
- Anaël, va rejoindre mon garçon. À genoux, derrière lui.

Cela fit sourire Aeternia tant la demande était vicieuse. Il replaçait l’elfe en position d’indiquer un code rouge, c’était superflu au vu de la magie ambiante, mais cela devrait suffire à faire douter la majorité des Dominants. Seulement, devant la porte, ce n’était pas de simples Dominants, mais plusieurs défenseurs des droits, suivi par une escorte de Dominants protecteurs et à quoi s’ajouter les plaignants. Ils étaient venus en grande pompe. Pour toute mise en bouche, Aeternia leur offrit un sourire pincé et annonça :

- Je poursuivrais personnellement tout défenseur des droits angéliques qui oserait se tenir devant moi. Vous êtes la honte de notre statut et je ne l’accepterai pas. J’accuserais.

Le premier défenseur qui avait ouvert la bouche resta comme suspendu dans le temps, bloqué par cette seule déclaration. Un autre eut un petit rire et répondit :

- Vous n’allez tout de même pas rentrer en guerre contre d’autres défenseurs ?
- Je peux vous faire une promesse Djinn si vous le préférez. Je promets que tout défenseur des droits angéliques qui viendra défendre ce mariage sera poursuivi. Je promets que tout défenseur des droits angéliques digne de ce nom se tiendra à mes côtés.
- Le club de l’Envolée des Anges a une excellente réputation et ils m’ont demandé d’intervenir, répondit alors Gayanael, hésitant malgré tout.
- Je vous invite donc à vous retourner contre eux. Les crochets de dressage employés pour transpercer ses ailes à eux seuls méritaient que vous intercédiez en sa faveur. Vous avez peut-être fermé les yeux trop longtemps pour le comprendre, mais il est temps de reprendre votre rôle ou de vous retirer.

Gayanael était un vieux défenseur, l’un de ceux qui ont vu trop de choses et qui n’exercent plus que par habitude. Plus rien ne pouvait réellement le surprendre, mais des crochets ? Vraiment ? Il soupira. Le dressage avait été plus abusif qu’il ne l’aurait cru.

- Vous êtes impertinente.
- Merci, répondit Aeternia en souriant.
- Ce n’est pas un compliment.
- Venant de vous Gayanael ? Mais voyons bien sûr que si. Nous en reparlerons donc devant le conseil des défenseurs. J’accuse Gayanael de ne plus être apte à faire son métier. J’accuse Gayanael de ne pas être un défenseur. J’accuse Gayanael d’être un bourreau.

Un grand froid se répandit entre eux. Un bourreau, l’inverse d’un défenseur, c’était la pire accusation qu’elle pouvait porter.

- Je n’ai jamais…

Gayanaël se tourna vers ses confrères pour affirmer haut et fort qu’il n’avait jamais blessé intentionnellement un soumis de sa vie.

- La négligence compte. Désirez-vous continuer de plaider face à moi ?
- Vous les Djinns… Vous vous croyez tout permis !
- Voyons, monsieur, ne faites pas un tel vœu devant moi, répondit-elle avec un sourire carnassier.

Il se tut, écarquillant les yeux et acquiesça sèchement.

- Je plaiderais ma propre cause face à cette accusation injustifiée.

Et il se détourna, partant sans un mot de plus. À côté, l’un des défenseurs sorciers soupira et rappela à Aeternia que menacer un défenseur dans l’exercice de ses fonctions n’était pas une chose qui se faisait.

- De plus, les droits concernant Anaël sont clairement stipulés dans son contrat. Il n’a pas le droit d’en signer un, sans l’accord des personnes que nous défendons.
- Par un joyeux coup du sort, il s’avère que je défends le soumis Anaël. J’ai autorisé l’écriture et la signature d’un contrat si, et seulement si, Anaël le faisait volontairement. Un contrat a effectivement été signé. Il ne s’agit pas d’un contrat en faveur du dominant Arkes. Il ne s’agit pas d’une prise de pouvoir sur l’entreprise. C’est un contrat temporaire. Je conseillerais au dresseur Arkes que les dossiers des maîtres Sorciers et Lycanthropes soient mis en avant et que le dominant sélectionné ne compte pas parmi ses proches. Ainsi aucun bien ne sera retiré à vos peuples respectifs. Notez bien que ceci est optionnel.
- Optionnel ? Vous vous rendez compte de ce que vous dites !?

Ils fulminaient devant elle, mais elle poursuivit tranquillement, avec une espèce de certitude qui lui permettait de parler longtemps sans être coupée.

- Oui. Très bien. Vous devez comprendre qu’en tant que Djinn, ce n’était pas un souci pour moi de faire barrière et de défendre l’un des miens. Mais vous m’avez offert un combat encore plus facile. Anaël vit à présent en enfer, enfer dirigé par le Maître Arkes. Vous n’avez strictement aucun droit sur lui. Seul un défenseur des droits angéliques digne de ce nom pourrait intervenir en sa faveur et en sa faveur uniquement. Vous avez également fait pression sur les amis dresseurs du dominant Arkes qui ont porté à mon intention un certain nombre de déclarations dont une accusation. Si vous insistez, nous allons devoir trouver un endroit plus grand pour nous réunir.

Derrière les défenseurs, Veni le futur époux et son père, fulminaient. Veni était déjà apprêté pour la cérémonie qu’il était hors de question d’annuler à son sens. C’était son destin !

- Vous ne pouvez pas la laisser faire ! C’est totalement impossible d’accepter ça ! On doit se marier. Ce n’est pas juste une entreprise sorcière, c’est la mienne !
- Vous savez, monsieur Gonay, si vous ne vouliez pas qu’une telle chose arrive, il ne fallait pas envoyer votre futur soumis se faire torturer par un dresseur qui n’en mérite pas le nom. Quant à votre petite personne, notez bien qu’elle ne m’intéresse absolument pas.
- Elle devrait pourtant, parla doucement le père du futur époux. Nous avons beaucoup de pouvoirs.

Elle lui offrit un sourire mutin. Beaucoup de pouvoir. Dire une telle chose face à une Djinn c’était tellement amusant.

- Vous vous sentez peut-être forte, mademoiselle, mais les traités ont réduit les Djinns à l’égal des autres peuples et il serait de bon ton de ne pas l’oublier.
- Oh monsieur Gonay… Il faut que vous compreniez. Le fait est que vous m’avez mise en position de faire appel à un défenseur sorcier pour défendre Anaël. Vous m’avez mise en position de force vous-même, en asticotant les amis du dominant Arkes. Alors oui, je me sens forte parce que vous m’avez rendue incroyablement puissante. Et il s’avère qu’en plus, je suis une Djinn… J’ai le pouvoir de répondre à vos vœux et la perfidie nécessaire pour qu’ils soient toujours à mon avantage. Défenseurs, désirez-vous poursuivre où l’arrangement qui ne retirera rien à vos peuples vous convient ?
- Cela nous convient, acquiesça mollement un des défenseurs en jetant un coup d’œil aux autres.

Elle acquiesça, fit demi-tour sans un mot de plus et retourna en enfer. Là, elle put offrir un grand sourire à l’angelot qui se tenait très sagement contre l’autre soumis.

- Ton contrat est valide. Tu vas rester avec Maître Arkes quelques semaines et puis, tu rejoindras le Dominant de ton choix. Tu as eu beaucoup de chances.
- Merci Maîtresse.

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