Chapitre 1

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À ce nom lâché avec solennité, je ne pus m'empêcher de pouffer.

– Les Éclairés ? On dirait le début d'une mauvaise blague, raillai-je.

– Content que cela t'amuse, répliqua Hamid avec sérieux, mais pour nous, cela n'a rien d'une blague. Beaucoup d'entre nous ne sont plus là pour en parler.

Cette fois, je me retenais de rétorquer. Le regard de ce gaillard trahissait de la détermination mais aussi la lassitude de celui qui se demandait si le tunnel qu'il avait emprunté aurait une fin. Beaucoup d'entre eux possédaient le même regard, dont Sébastian.

Mila m'observait avec une fraîcheur optimiste, elle semblait beaucoup attendre de moi.

– Quels sont vos objectifs ?

– Sauver Rain City, lança une voix familière dans mon dos.

Celle de Stone, qui me dépassa pour saluer Mila.

– Sauver Rain City? M'exclamai-je, perplexe. Je n'ai pas eu l'occasion de vous voir vraiment à l’œuvre.

– Notre mouvement a été crée, il y a quelques années. Trop récent pour constituer une menace sérieuse pour nos ennemis, expliqua Hamid.

– Et vos ennemis sont les Protecteurs, je suppose ?

– Tu supposes bien, mon fils, répondit Sébastian.

– D'après leur nom, ils ne sont pas censés protéger la ville ? C'est-à-dire, ce que vous prétendez faire en fait ?

Tous échangèrent un bref regard.

– C'est un nom trompeur, confia Mila. Dès le début, leur tâche n'était pas seulement d'assurer la sécurité de tous mais aussi d'empêcher quiconque de quitter la ville avant la mise en place du bouclier.

– Ils encadrent le ravitaillement de la ville, ajouta Sébastian. Nourriture, médicaments… tout passe entre leurs mains.

– C'est ce qui leur confère un énorme pouvoir, dis-je. Et le Duc dans tout ça ?

Je pressentais la réponse avant qu'ils ne parlent.

– Le Duc les commande.

– Cynthia Macelen travaillait pour vous, affirmai-je tout à coup.

La tristesse se lut dans le regard de Mila.

– Elle ne manquait pas de cran.

– Que faisait-elle dans cet immeuble du Narrows avec ses deux copains ? Je me doute qu'elle ne faisait pas que de la simple collecte de renseignements parmi ses clients.

– Ils réfléchissaient aux moyens d'entrer en contact avec vous, sans attirer l'attention, répondit Stone.

– Pourquoi vouloir rentrer en contact avec moi ?

– Pour vous recruter.

Je n'avais pas oublié la défiance de Stone à mon égard qu'elle avait exprimé clairement devant moi au Hachoir.

– Ça ne faisait pas l'unanimité, on dirait.

Je déversai mon amertume dans ces derniers mots comme le Styx charriait ses ordures dans les tripes de Rain City.

– On ne fait pas confiance facilement, concéda Mila.

Je ne pus m'empêcher de soutenir le regard de Hamid.

– Certains plus que d'autres, j'imagine.

– Nous sommes en guerre, Selstan, répliqua l'autre.

– Ouais, l'avoir entendu une fois me suffit. Qu'es-ce qui peut me convaincre que vous êtes vraiment du bon coté ? Ou que votre petite guéguerre ne va pas détruire ce qu'il reste de cette ville ?

– Nous n'avons pas le choix, Rain Cty est déjà en train de se détruire, plaida Mila.

Cette fois, la détresse perçait dans sa voix.

– Nous avons besoin de toute l'aide disponible.

– Ne brûlons pas les étapes, Mila, contesta Hamid. On ne sait rien de ce gars-là.

Elle se tourna vers lui.

– Il faudra bien qu'il apprenne en quoi consiste notre lutte. Le plus tôt sera le mieux.

– Je ne lui fais pas confiance.

– Alors fais-moi confiance.

Elle promena une expression impérieuse sur toute cette petite assemblée et personne ne pipa mot. Elle dévoilait un nouvel aspect de sa personnalité que je ne lui connaissais pas. Une cheffe dans l'âme.

Mila…

– Nous avons terminé, merci à tous, trancha-t-elle.

L'un après l'autre, ils quittèrent la pièce. Il ne resta bientôt plus que nous deux.

– Tu ne pourras pas rentrer chez toi, me lança-t-elle. Olson t'y retrouverait.

– Ça ne fait rien, les cafards ne me manqueront pas.

– Ça ne te dérange pas d'avoir les rats comme nouveaux amis ?

Je ne répondis que par un sourire désabusé. Nous étions réduits à des rats à visage humain, obligés de nous terrer sous le béton et le ciment. Pourquoi cela me gênerait d'être parmi mes vrais semblables ?

D'errer parmi ceux qui me ressemblaient le plus.

Non, cela ne me dérangeait pas.

– Bienvenue dans la résistance, David, me souhaita-t-elle alors.

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