Chapitre 6

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Nous dévalâmes sans dire un mot de plus un autre escalier et je surpris Eric se rejeter en arrière vivement alors qu'il ouvrait la marche. Il me retint fermement alors que nous allions arpenter un autre couloir éclairé aussi par des feux de poubelles.

– Il y a du monde, me chuchota-t-il.

– Des toxicos ? Demandai-je.

– Nan, des chiens de garde.

Certainement des Protecteurs, donc.

– Laisse-moi voir ça, lui demandai-je.

Il s'écarta à l'instant et je glissai prudemment dos au mur pour contorsionner ma tête au-delà de l'angle. Je surpris au fonds du couloir, deux silhouettes en uniforme de police lourdement armées de fusils d'assaut, qui gardaient une entrée.

Un contrefort à mi chemin les masquait en partie, les deux gigolos semblaient détendus. J'avais du mal à croire encore qu'ils avaient pu être mes collègues dans une ancienne vie. Je me doutais qu'ils devaient avoir d'autres potes à l'intérieur de la salle dont ils gardaient l'entrée, et étant donné leur attirail, ce n'était certainement pas une bonne idée de les attaquer de front.

– Alors, on se les fait ?

Eric respirait l'envie d'en découdre, il fallait modérer cette pulsion.

– Aucune chance, répondis-je d'un ton cassant. Ils ont des marteaux piqueurs et nous des pailles.

– Alors, on se tire ?

– Non on va essayer de s'approcher plus près. Mais sans tenter quoi que ce soit de stupide.

Les dents serrées, il avait compris le message.

– Pigé, je vous colle au train.

Je jetai de nouveau un regard prudent dans leur direction. Les deux cerbères ne prenaient pas leur mission de surveillance au sérieux, le bruit de leur conversation pas très relévée niveau philosophie nous parvenaient par bribes.

Ils rirent aux éclats à la suite d'une blague salace et je jugeai que le moment était opportun. D'un geste impérieux de la main, j'ordonnai à Eric de s'accroupir puis de foncer à moitié pliés vers le mur d'en face.

Ce que nous fîmes sans être repérés.

Nous nous adossâmes au mur et profitions du contrefort pour nous rapprocher des Protecteurs, toujours plongés dans une conversation philosophique. Ils ne nous entendirent pas et décidions de patienter derrière ce retour de mur.

Le temps nous parut long jusqu'à ce que leur conversation cessa lorsque la porte s'ouvrit dans un grincement métallique.

Nous ne pouvions pas le voir sans nous trahir mais nous pouvions le deviner à l'ouïe. Une dizaine de Protecteurs avaient rejoint leurs deux potes mais il n'y avait pas qu'eux dans le lot. Deux voix se mirent à ricocher jusqu'à nos oreilles, achevant une conversation.

Celle entre Harold et… monsieur Stakes.

Je reconnus la voix de ce maudit vautour et le tintement de sa canne qui martelait le sol.

– Comme je vous le dis, mon cher Harold, cessez de vous inquiéter pour le ravitaillement et assurez-vous seulement que la Vipère Jaune soit bien distribuée dans tous les quartiers de la ville. Le Duc sera satisfait de votre diligence.

– Ouais, ouais monsieur Stakes. Et pour les Eclairés, vous comptez faire quoi juste? J'ai besoin de garanties, histoire d'éviter les pertes sèches.

Le rire de Stakes provoqua des démangeaisons dans tout mon corps.

– Cessez de craindre cette minable bande de terroristes amateurs. Contentez-vous de faire votre part de travail.

– Ouais, grogna le successeur de Seth le Fou. Ca m'arrangerait que vous fassiez votre part de travail aussi, monsieur Stakes. Sans vouloir vous offenser.

– Je n'aime pas beaucoup votre insolence, gronda l'autre aristocrate. Votre prédécesseur savait montrer plus de respect pour le Duc.

– Ben vous direz de ma part à votre foutu Duc ou plutôt monsieur…

– Ne prononcez pas son nom ! Tonna tout à coup Stakes.

Merde, ca promettait de devenir intéressant. Voilà une information capitale qui m'échappait. En tout cas, la brutalité du vautour fut suffisante pour remettre à sa place le petit valet de service.

– Pardon, je tenais seulement à vous faire remarquer que vous aviez subi des pertes imprévues récemment.

– Les pertes que nous avons subies sont négligeables et ne vous regardent pas, trancha Stakes d'un ton méprisant. Faites votre travail et vous vivrez peut-être assez longtemps pour voir aboutir le Grand Projet.

À ces mots Grand Projet, je coulais un regard vers Eric qui me répondit sans dire un mot qu'il ignorait de quoi il s'agissait.

La Vipère Jaune était donc le moyen d'achever le Grand Projet, cela ne présageait rien de bon. Surtout après avoir vu à l'oeuvre la nouvelle version.

– Ouais, ponctua une nouvelle fois Harold. Enfin j'espère surtout ne pas y laisser de plumes.

– Vous aurez le privilège d'être aux premières loges.

Harold aurait sans doute quelques réponses à nous donner. Je sentais Eric bouillonner à mes cotés et je le calmai d'une simple main sur l'épaule.

Il fallait patienter encore un peu.

Nous nous planquâmes un peu plus dans la pénombre lorsque les Protecteurs partirent encadrant étroitement monsieur Stakes qui s'appuyait sur le pommeau de sa canne. Ils nous dépassèrent sans nous remarquer.

Nous poussâmes un discret soupir de soulagement lorsqu'ils disparurent hors de notre vue.

– Dites, z'avez vu comment il était sapé, l'autre ? Merde, c'est qui ce bourgeois ? Brailla à voix basse Eric.

– Quelqu'un qu'il ne faut pas contrarier.

Eric ignorait à quel point je parlais en connaissance de cause. Il semblait avoir deviné mes pensées car son expression exprimait une crainte instinctive.

– OK, faut pas rester sur son chemin.

– Jusqu'à ce que nous soyons assez forts pour lui faire face, lui promis-je.

Je m'écartais du mur, imité par Eric. Nous avions tous deux dégainé notre flingue, il était temps de dire quelques mots à Harold.

Nous plaçâmes devant la porte et le môme plaqua son oreille droite contre le métal humide pour y déceler le moindre bruit qui trahirait une autre présence que celle de notre cible. Nous entendîmes tout à coup des cris aigus franchir la fine paroi d'acier, celle d'une femme.

– Lâche-moi, ordure ! Glapissait-elle.

– Tiens-toi tranquille ou je te cogne ! Hurlait une voix rauque.

Eric recula jusqu'à moi.

– Il est pas seul, m'sieur.

– J'avais compris, petit. Tu me couvres, j'y vais en premier.

Avec résolution, je m'élançai et projetai vigoureusement mon pied contre la porte qui s'ouvrit à la volée.

Il s'agissait d'une grande cave, éclairée par deux feux de poubelle encadrant l'entrée étroitement. Contre les parois s'étendaient empilées les unes sur les autres comme des briques scellées par le ciment, des caisses entièrement remplies de fioles au reflet citron. Une marée mortelle qui se déverserait bientôt dans les rues de Rain City et la plongerait dans un chaos encore plus dévastateur que maintenant.

Sauf si nous l'arrêtions.

Au centre de la scène se tenait un bouledogue hargneux ramassé sur lui-même. Il me faisait vaguement penser à un garde chiourne d'un quelconque entrepôt en ruines, mis à part que celui-ci n'avait rien d'inoffensif.

Rien qu'à sa mâchoire serrée comme celle d'un catcheur en plein rut, il donnait pas envie de l'inviter à dîner.

À ses pieds se tenait une pauvre gamine dont le maquillage et la tenue suggestive indiquaient qu'elle provenait des Brumes de l'Extase. Ce salopard avait du la ramasser dans la rue pour abuser d'elle, si on prenait la peine d'étudier ses traits de jouvencelle effarouchée préadolescente.

Une marginale livrée à elle-même, devenue la proie d'un charognard qui aimait peut-être jouer avec la nourriture avant de la manger. Les traces de coups sur son visage, ses bras à découvert et ses maigres jambes nues en disaient long sur la bestialité de l'enfoiré qui se retourna vers nous.

– Si vous voulez votre dose, vous attendez votre tour comme les aut'es.

Nous le braquions avec nos flingues, le faisant écarquiller les yeux.

– Nous sommes pas là pour consommer, répliquai-je.

Il leva docilement les bras, confus tandis que la gamine reculait en rampant vers les caisses de Vipère Jaune, s'écartant de lui… et de nous deux par la même occasion.

Elle ne nous connaissait pas bien, personne ne pouvait lui en vouloir.

– Ben, vous voulez quoi ?

– Te trouer, espèce d'enfoiré ! Rugit Eric.

Il allongea le bras et je le sentais prêt à appuyer sur la détente. J'étais prêt à le laisser faire jusqu'à ce que je me rappelai des mots de ce salopard de Monsieur Stakes.

À propos d'un certain Grand Projet.

De la main gauche, je le forçai à détourner son arme ailleurs.

– Nous avons d'abord besoin de réponses.

– Vous perdez vo'te temps, vous deux, plaida Harold. Je suis pas au courant de grand chose.

– On va voir ça, coupai-je.

Je comblai d'une grande foulée la distance qui me séparait de lui et lui balançai un direct dans la mâchoire qui le fit vaciller mais à peine.

Il était plus solide que ce que je m'y attendais. Je comprenais mieux pourquoi il avait été le bras droit de Seth le Fou.

Je surpris son sourire goguenard à travers le sang qui giclait de sa lèvre inférieure éclatée comme une cerise trop mûre.

– Va falloir apprendre à cogner plus fort que ça, l'ami, ricana-t-il à mon intention.

– T'en fais pas, j'apprends vite.

La pointe de ma godasse écrasa ses bijoux de famille, le faisant chuter sur un genou. Cette fois à ma grande satisfaction, il éructa un juron inaudible.

– Alors ?

– Pas mal, se contenta-t-il de répondre en serrant les dents.

– Maintenant que nous écoutons la même musique, dis-moi ce que tu sais du Grand Projet.

Il se releva de toute sa hauteur et son rire rauque résonna dans la salle.

– J'en sais foutre rien, mais on m'a assuré que ce serait encore moins joli à voir que maintenant.

Je tremblai imperceptiblement, le souvenir de la détresse de cette toxico que j'avais apaisé n'était pas près de me lâcher.

– Toute cette Vipère Jaune en fait partie, je suppose.

Cette fois Harold décocha un rictus qui me fit froid dans le dos.

– Monsieur Stakes m'a assuré que ce n'est que le début.

– Le début ? Le début de quoi ?

Je n'avais pas remarqué le talkie walkie affalé sur une des piles de caisse jusqu'à ce qu'une voix crachée par les parasites se fit entendre.

– Chef ? Fit un des sbires de Harold. Olson est là, il veut vous causer !

Merde, Olson. En voilà un qui tombait mal.

– Ben qu'il s'amène alors, rétorqua Harold sans se retourner.

– Euh OK, chef.

C'est à cet instant que je compris vraiment que je n'impressionnais pas Harold plus que cela. Cet enfoiré était un vrai dur. Nan, pas étonnant que Seth l'ait choisi comme bras droit. Son sourire s'élargit, devinant mon incertitude nouvelle.

– Quoi qu'il arrive, vous sortirez les pieds devant, tous les deux.

Le môme cria à mon intention:

– David, faut qu'on se tire maintenant !

J'accrochais le regard d'Eric pour lui intimer de rester calme… ce fut une erreur qui manqua de me coûter cher.

L'autre salaud profita de cette seconde d'inattention pour sortir de ma ligne de mire et m'attraper le poignet. Pris de court, je pressai malgré moi la détente, bousculé par le taureau en arrière. La détonation n'étouffa pas le cri de pie apeurée, vomie par la gamine terrorisée. Par dessus l'épaule de Harold, je l'aperçus se recroqueviller un peu plus comme une crevette.

Confusément, j'entendis le talkie walkie retranscrire :

– Chef, tout va bien ?

L'haleine pestilentielle de mon nouvel ami s'infiltra dans mes narines lorsqu'il brailla :

– A mon tour de rigoler !

Je dus lâcher mon flingue qui ricocha sur le sol, me demandant ce qu'attendait Eric pour l'abattre. Sans doute avait-il peur de me toucher. La poigne d'Harold était plus puissante que je ne l'avais escompté.

Sans cesser de m'agripper, il me catapulta contre le mur, me coupant le souffle. Pour me dégager, j'empoignai son cou de géant surprotéiné et lui envoyai ma caboche dans son pif. Autant se fracasser tête la première contre un roc.

Le sang dégoulina de plus belle sur sa face d'ours alors qu'un immense éclat de rire le secoua. Quant à moi, j'eus l'impression d'émerger d'une gueule de bois trop arrosée.

– Je vais te montrer qui est le vrai maître du Hachoir !

Il serra ses mains épaisses autour de ma gorge, allait-il m'étrangler comme un goret ? Non, il me souleva littéralement du sol et m'envoya valser vers… Eric, resté paralysé. Nous atterrîmes tous les deux contre des caisses de Vipère Jaune, qui se répandirent en une marée gluante à nos pieds. Sonnés, nous tentions de nous redresser.

Eric grogna lorsque Harold l'éjecta sur le flanc d'une simple claque sur la tempe.

– Dégage minus, j'ai pas fini avec ton pote !

Il obscurcit mon horizon lorsqu'il se pencha au-dessus de moi pour me saisir de nouveau. Il me hissa en lévitation de la force de ses bras.

– Alors tu fais moins le malin, hein ?

Cette fois, ses doigts se crispèrent sur ma trachée et je ruai pour tenter de le faire lâcher prise.

– Tu ne verras même pas le soleil !

Il serra plus fort, ses phalanges étaient plus raides que des tenailles. Avec force, je projetai mon poing dans sa trogne. Une fois, deux fois, trois fois… sans plus d'effet que si je cognais le sable. Le monde se troubla autour de moi, à mesure qu'il me privait d'oxygène.

Le moindre effort me coûtait de plus en plus.

Bang !

Je me retrouvai d'un coup sur le sol alors qu'un hurlement bestial se répercuta longuement d'un bout à l'autre de la pièce. Au moins Harold ne riait plus, c'était bon signe. Il gisait par terre, se tordant de douleur, une main plaquée sur son rein.

Moi et Eric fixions pétrifiés la gamine qui tenait le flingue de ce dernier, lâché dans sa chute avec moi. Je récupérais mon jouet, tandis que Eric s'approcha prudemment de l'infortunée pour reprendre le sien.

Il leva les mains en signe d'apaisement lorsqu'elle le menaça avec une résolution désespérée.

– Eh, on est dans le même camp !

Harold rampait hors de notre portée, étouffant ses gémissements. Il glissait sur le sang qui s'écoulait de sa plaie en abondance.

– Chef ? Que se passe-t-il ? Répondez ! Hurlait l'autre à travers le talkie.

Il n'y avait plus de temps à perdre, il ne restait plus qu'à espérer que ce salaud ne survive pas à sa blessure.

Si Dieu voulait vraiment écouter nos prières en ce bas monde…

– Eric, on y va ! M'écriai-je.

– Attendez une seconde !

– On n'a plus le temps !

Je franchis le seuil pour vérifier que la voie était libre, ce qui était le cas. Avant de presser mon jeune compagnon:

– Grouille-toi, bordel !

Il fixait droit dans les yeux la pauvre petite à qui nous inspirions une défiance naturelle. Elle ne lâchait pas le colt d'Eric, continuant de le tenir en respect.

– Écoute-moi, lui fit-il le plus calmement possible. S'ils nous coincent ici, ils nous tueront tous, toi compris. Si tu veux vivre, viens avec nous et rejoins les Éclairés.

Après une hésitation qui nous semblait infinie, elle baissa l'arme vers le sol et hocha la tête. Elle prit même la main qu'il lui tendait.

Ouais, très touchant…

– Vous ferez connaissance plus tard tous les deux, les raillai-je malgré moi. Nous aurons bientôt de la compagnie.

– Je garde ça, croassa la fille tout à coup.

Son attitude avait évolué, elle se tenait debout avec orgueil et avait quitté sa posture de lapin effrayé blotti au fonds de son terrier. Néanmoins elle n'avait pas rendu son arme à Eric, preuve qu'elle ne nous accordait qu'une confiance toute… relative.

Elle était une enfant de Rain City, après tout. Comme nous tous.

Nous abandonnâmes Harold qui ne pouvait rien contre nous. Nous l'entendions hurler en direction de son talkie qu'il fallait éradiquer des rats de la Ruche. Nous éradiquer.

Conscients que le temps nous manquait, nous filâmes droit vers la sortie. Nous avions escaladé le premier escalier lorsque je m'arrêtai net. Des silhouettes peu amicales traversaient les rangs des camés, arme aux poings.

Ils étaient cinq, bien mieux lotis que nous.

Je voulus me rejeter en arrière derrière le coin de mur, où se terraient Eric et sa nouvelle copine des Brumes de l'Extase. Trop tard.

Celui qui ouvrait la marche pointa un index menaçant dans notre direction. Deux élevèrent le bras, et des balles sifflèrent à mes oreilles. M'accroupissant, je ripostai.

Un cri étouffé m'indiqua que j'avais du en toucher un.

Je m'empressai de m'abriter, le cœur battant à tout rompre, alors que le mur s'émiettait sous les impacts des tirs désordonnés dont nous faisions l'objet.

– Merde, David ! On fait quoi ? Brailla Eric.

– Laisse-moi réfléchir !

Ceux-là devaient seulement faire partie de la bande à Harold. Au milieu de leurs clameurs, je crus reconnaître la voix de ce fameux Lewis.

– Laissez-moi le têtard ! Beuglait-il.

Eric passa devant moi, je tentai de l'arrêter:

– Eh, qu'est-ce que tu fiches ?

Le môme se mit tout à coup à crier sans que je pus le retenir.

– Ce sont eux qui vous ont volé le soleil, ce sont eux !

Étonné de cette initiative inattendue, je jetai un coup d'oeil prudent pour observer si cela avait eu l'effet escompté. Et ce fut le cas…

Les camés de nouveau affalés tels des cadavres inertes, se redressèrent tous à cet appel impromptu. Un appel répété par Eric au milieu des tirs que nous essuyions. Je ne ratai rien du spectacle malgré les risques que je pris.

Les cinq mignons de Harold se retrouvèrent encerclés par les dizaines de toxicos qui se mirent à scander mécaniquement:

– Le soleil… vous nous avez volé le soleil ! Rendez-le nous !

Ils les agrippèrent tout à coup par leurs vêtements, leurs armes ce qui fit cesser la mitraille à notre grand soulagement. Lewis et ses potes se débattirent énergiquement en donnant des coups de pied et de poings.

– Lâchez-nous, bande de tarés !

– Rendez-nous le soleil que vous avez volé ! Ripostaient les autres.

Quelques coups de feu nous parvinrent et des corps maigres s'effondraient au sol, pas assez pour empêcher Lewis et ses potes d'être ensevelis par cette marée grouillante de bras décharnés, d'yeux déments.

– Allez, on y va ! Fis-je.

Nous nous élançâmes vers la sortie, traversant avec précaution les rangs des camés qui ne nous prêtaient aucune précaution. Nous marchions prudemment au milieu des jappements de la masse et des cris de leurs victimes jetées au sol et piétinées sous leurs pieds.

– Le soleil… nous voulons le soleil !

Ils étouffèrent les appels à l'aide de Lewis et le tumulte s'estompa à mesure que l'on s'en éloignait. La pluie de Rain City nous noya sous ses larmes intarissables à la sortie de la Ruche. La moitié des bagnoles des Protecteurs était partie, sans doute pour raccompagner Stakes hors du Hachoir.

Il était temps pour nous aussi de rentrer.

Je surpris un attroupement important à notre droite, à une vingtaine de mètres composés de policiers – des Protecteurs – et de mignons d'Harold qui entouraient un petit basané en imper et au regard sournois.

Olson, qui était en pleine conversation.

Je rabattis le bonnet sur ma caboche, Eric en fit autant avec sa capuche tout en prenant la petite par les épaules pour la protéger contre les intempéries. Celle-ci qui ne lâchait pas son colt, le repoussa sans ménagement, montrant plus de fierté que prévu.

– J'ai pas besoin d'être dorlotée ! Protesta-t-elle.

– Eh, le prends pas comme ça, riposta Eric. Si t'as besoin d'un manteau ou d'une veste, y a qu'à demander.

– Je t'ai rien demandé, j'ai l'habitude de rester comme ça aux Brumes de l'Extase.

– On peut te ramener là-bas si tu continues à me les briser !

Leurs éclats étaient un peu trop perçants à mon goût.

– Criez plus fort, ils ne vous entendront pas, les grondai-je.

– Désolé, s'excusa Eric.

Le môme se tourna vers sa camarade de classe.

– Au fait, moi c'est Eric. Lui, c'est David.

– Enchantée p'tit con, moi c'est Esa.

Je devinai le sourire d'Eric, amusé par le ton abrupt de la fille des Brumes de l'Extase.

– Enchanté aussi, sale peste.

Nous descendîmes les marches rapidement sans paraître trop pressés pour ne pas être suspects. Nous traversâmes la rue, parés à disparaître dans la ruelle sombre la plus proche. Le linceul sinistre de la nuit éternelle serait notre protection.

Je n'irais pas jusqu'à dire que les souterrains dans lesquels les Eclairés se réfugiaient, me manquaient à ce point.

Mais Dieu qui nous avait tous parqués dans cet endroit maudit, n'allait pas se montrer clément de sitôt. Ce serait trop facile.

– Eh, vous trois ! Hurla tout à coup une voix derrière nous.

Cette apostrophe provenait d'Olson et mon poing se serra malgré moi, de fureur contenue. Si nous ne nous arrêtions pas, ils nous tomberaient sur le rable. Dans le cas contraire,… ce serait à peine mieux.

Mes doigts serrèrent la crosse de mon flingue alors que je glissais aux deux chérubins.

– Vous deux, laissez-moi parler.

– OK, David.

Je freinai pour me retourner vers mon vieux camarade de toujours. Olson et sa sale gueule d'enfoiré étaient masqués par les silhouettes de deux racailles de Harold, suivis de très près par Cinq Protecteurs.

Il était temps de faire appel à mes talents d'improvisation. Olson était trop loin pour distinguer ma trogne malgré les flammes mourantes des feux de poubelle qui éclairaient la rue, mais la distance de sécurité se réduisait inexorablement.

– Vous allez où comme ça ? S'écriait Olson.

– On rentre chez nous, monsieur, répondis-je la voix enrouée exprès pour ne pas me trahir.

– Et c'est où, chez vous ?

Ce salaud insistait.

– À la cour des Illusions, monsieur.

– La cour des Illusions ? S'étonna ce charmant ex collègue. Pas la porte à coté, hein ?

– Non, monsieur. Mais on a besoin de travailler… pour manger, nourrir la p'tite famille. Mes deux cousins, quoi.

Ils continuaient de se rapprocher, méfiants et circonspects à notre égard. J'étais pas sûr que mon baratin ferait illusion longtemps, surtout contre Olson.

– Ouais, je vois le tableau… dis donc, ta cousine comme tu dis… Elle ferait pas un tour de temps en temps aux Brumes de l'Extase ?

– Si, monsieur, de temps en temps.

– Vous rendez donc des services à Harold, vu que vous venez de sortir tous de la Ruche.

Ça sentait le piège. Je jetai un coup d’œil nerveux sur la ruelle qui s'enfonçait sur ma gauche.

– On le connaît seulement de réputation, on ne l'a jamais croisé personnellement.

L'étrange intensité dans le regard de ce serpent m'indiqua qu'il ne croyait pas un mot de ce que je disais.

– Intéressant, lâcha-t-il d'un ton laconique. C'est drôle, parce que Harold vient de nous prévenir que trois péquenauds ont foutu la merde dans la Ruche et l'ont salement amoché.

– On ne sait rien à propos de ça, monsieur.

L'angoisse me prit aux tripes, quand les hommes de main de Harold enfouirent les mains dans leurs poches de façon suspecte. Tout à coup, un claquement résonna juste à ma droite suivi d'un autre… et d'un autre encore.

Les deux bandits s'écroulèrent sur le trottoir, fauchés par le colt d'Esa. Eric en était resté bouche bée devant l'exploit de sa nouvelle copine. Olson bondit derrière l'une des poubelles en train de flamber, pour se mettre à couvert.

Je fus le plus réactif des trois.

– On se barre !

Sans hésiter, nous nous jetâmes dans la ruelle sombre sur notre droite, dont nous ne parvenions pas à distinguer l'extrémité.

J'entendis Olson rugir dans notre dos.

– Poursuivez-les, bordel !

Eric prit les devants, nous guidant à travers le dédale du Hachoir vers l'un des accès les plus proches aux souterrains de Rain City. Derrière nous, pendant un temps, des rafales de fusils d'assaut déchiquetèrent le silence de ce quartier.

La peur nous donnait des ailes, j'avais eu un bref aperçu de ce que les Protecteurs infligeaient à leurs adversaires au cours de mes entretiens prolongés avec Olson et ses toutous. Eric et Esa à en juger par leur allure, devaient en avoir aussi leur petite idée.

La gamine ne cessait de jeter des regards par dessus son épaule. Son affolement maîtrisé alimentait sa volonté de survie. Si elle s'était libéré de l'emprise de cette ordure de Harold, ce n'était pas pour y retourner de sitôt.

Au bout de quelques minutes, nous parvînmes à les semer mais ce n'était qu'un répit éphémère. J'entendais par dessus les larmes amères de la ville, les éclats de voix continuer de résonner jusqu'à nous.

Les chiens enragés étaient décidés à remonter notre trace. Nous étions tout autant décidés à ne pas leur faciliter les choses.

Je reconnus la bouche d'égout par laquelle Eric et moi avions fait surface. Le môme se précipita pour décaler le couvercle avec mon aide. Il croisa le regard d'Esa qu'il pressa, mû par l'urgence.

– À toi l'honneur.

Elle le remercia d'une inclinaison du menton et s'engouffra la première sous terre.

– Vas-y, gamin, fis-je à mon tour.

Les Protecteurs arrivaient, leurs clameurs se faisaient de plus en plus distinctes. Nous deux n'aurions pas le temps d'évacuer et de protéger notre retraite. À moins que...

– David…

– Toi, le premier, insistai-je.

Il s'inclina et disparut à son tour avec agilité. À sa suite, je me penchais pour agripper la plaque d'égout et refermer le passage derrière lui. Je l'entendis protester avec véhémence :

– Mais qu'est-ce que vous foutez ? Vous êtes malade !

– Ce sont trois péquenauds qu'ils recherchent, pas un clochard ! Répliquai-je. Te fais pas de mouron pour moi.

– Mais ils vont vous buter !

Je restai sourd et refermai l'accès, étouffant ses glapissements. Je rabattis mon bonnet sur le crâne et me plaquai assis dans une position foetale contre le mur d'une maison en ruines à un mètre de là, attrapant mes jambes pour les attirer vers mon torse. Je ramassai un peu de boue mélangé à du ciment pour me conférer un air misérable, en en recouvrant mon imper. Comme cela, je ressemblai ainsi à n'importe quel marginal de Rain City.

J'espérais seulement que je ne faisais pas une grosse connerie.

– Par là, j'crois qu'ils sont passés par là !

La voix du Protecteur qui venait d'apparaître à l'intersection sur nos talons, possédait une étrange familiarité. Sa silhouette trapue évoquait celle d'un gorille mal formé, éclairé par le halo d'une lampe torche.

Je me protégeai la figure derrière mes genoux pliés et tendis la paume vers le haut.

– Un bout de pain, l'ami. Un bout de pain…

– Ta gueule, le clodo !

Ah ce bon vieux Elvis, toujours brillant de courtoisie et de subtilité. J'entendis ses bottes claquer sur le béton trempé vers moi.

Il fut rejoint immédiatement par quatre autres Protecteurs dont l'un lui demanda :

– Ils sont passés par là, t'es sûr ?

– Ouais. Laisse-moi demander à l'autre, là !

Il s'approcha de moi, m'apostrophant sans humanité.

– Eh toi ! Me beugla-t-il tel un taureau en rut. Où sont partis les trois Éclairés, ils sont bien passés devant toi, non ?

Je marmonnai d'une voix faussement enrouée.

– Un bout de pain, à vot'e bon cœur.

– J'tai posé une question, connard !

Son pied se lova brutalement dans mon foie, m'arrachant un hennissement de douleur. Je me couchai sur le flanc tout en me protégeant mon visage, hors d'atteinte de leurs lampes torche. Il me flanqua deux autres coups de bottes avant.

– Alors tu vas répondre, oui ? Ou tu veux qu'on te coffre pour la nuit, pour refus d'obéir à un agent dépositaire de l'autorité publique ?

Prudemment j'étendis le bras vers ma gauche, pour leur indiquer une fausse direction.

– Par là… y sont partis par là, m'sieur l'agent.

Je n'eus aucun mal à simuler une voix misérable, surtout après la volée que j'avais reçus.

– Merci, pauvre merde ! Me cracha Elvis. J'espère pour toi que tu n'as pas raconté de bobards, sinon je reviendrai te voir !

Ils se mirent à courir comme des dératés, pressés de mettre la main sur le jackpot. Je les vis disparaître au coin de la rue avant de me redresser le corps endolori. Cet enfoiré d'Elvis ne perdait pas la main.

Sans perdre de temps, je fis glisser la plaque d'égout sur le coté pour plonger à mon tour dans les souterrains. Je commençais à m'accroupir en agrippant l'échelle quand une voix railleuse coupa mon élan:

– Eh toi, où vas-tu comme ça ?

J'avais reconnu dans mon dos cette voix satisfaite empreinte de sadisme, celle de Stan, inexplicablement à la traîne. Je pouvais pas manquer de pot à ce point là. Ouais, ce n'était rien d'autre que le copain de chambrée d'Elvis.

Foutu rouquin.

Un claquement sec résonna, il avait armé son joujou. Il ricana sous les larmes de Rain City, indifférent à son chagrin.

– Vous les clochards, vous êtes pire que les cafards! On vous trouve vraiment à tous les coins de la rue ! On en bute un, et un autre prend sa place! Au Narrows… à la Cour des Illusions… aux Brumes de l'Extase, bon là à la rigueur je peux comprendre, vu que ça permet à des miteux comme toi de se rincer l’œil !

Je sentais l'éclat de sa lampe torche me chauffer les omoplates.

– Eh tu sais quoi ? On en trouve même à la Fange ! Des tas ! Renchérit-il de plus belle. Tu les rejoindras bientôt pour faire leur connaissance.

Les éclats de rire continuaient de secouer ce débile.

– Bon, tout ça n'aura bientôt plus d'importance de toute façon ! Dis-toi que je te fais une faveur ! Surtout dans un quartier pareil où on fait pas de vieux os !

Une faveur... tu parles, mon salaud. Mon instinct de flic me hurlait qu'il comptait prendre son pied avant de m'envoyer ad patres. J'en avais eu un petit aperçu lors de notre première rencontre, un souvenir amer qui m'étais resté en travers de la gorge.

– Allez tourne-toi ! Montre voir ta sale gueule !

Très bien, puisqu'il le demandait gentiment… je clignai des paupières, aveuglé par l'éclat de sa lampe. Ce con ne se préoccupait pas le moins du monde de ma gêne. Je tentai de dissimuler en partie mon visage avec ma main, en pivotant vers lui.

Il me fixa suspicieux.

– Dis donc, tu me fais penser à quelqu'un ! On s'est pas croisés quelque part ?

Je ne pus me retenir de lui répondre :

– Peut-être bien.

Il plissa les yeux, étudiant plus attentivement mes traits puis ils s'agrandirent sous le coup de la stupéfaction.

– Selstan ?!

– Gagné, ducon.

Il avais commis l'erreur de baisser son flingue, j'en profitai pour lui agripper le poignet et tenter de le lui arracher des mains. D'abord surpris, il tint bon et résista de toutes ses forces. Ce putois malodorant m'envoya sans prévenir son genou dans mes bijoux de famille, m'arrachant un hennissement étouffé.

Puis il tenta de me frapper à la machoîre avec sa lampe que je bloquai avec le coude. Dans la confusion, il la lâcha et elle se brisa par terre dans un bruit de verre émietté, nous plongeant dans l'obscurité la plus totale.

Heureusement les rats n'avaient pas besoin de lumière pour se battre. Nous nous agrippions par les vêtements comme de sacrés forcenés, tentant chacun son tour de nous déséquilibrer. Le rouquin était plus hargneux que ce que je croyais, il ne se laissait pas faire. À cause de l'épaisse pénombre, je ne le vis pas venir.

Son front heurta ma trogne suffisamment fort pour m'étourdir, et me faire lâcher prise. Il se dégagea et je devinai l'affut de son jouet pointé vers moi. J'étais un enfant de Rain City et j'avais appris à survivre.

Envers et contre tout. Ouais, j'étais sacrément coriace.

Mû par un réflexe de bête assoiffée de vivre, je me plaquai sur le béton alors que deux balles sifflèrent au-dessus de ma tête dans des bruits de pétards assourdissants.

– Crève, enfoiré ! Crève ! Rugissait-il.

Les tirs allaient rameuter du monde, d'autres Protecteurs armés jusqu'aux dents. Bordel, le temps commençait à manquer, il fallait que je me débarrasse de lui. En vitesse.

Je voulais revoir Mila, sentir de nouveau son parfum enivrant, entendre le timbre soyeux de sa voix de cheffe déterminée.

Je devais m'échapper, je devais buter l'autre enfant de putain.

Je me redressai sur mes genoux, attrapai de nouveau son poignet pour écarter l'arme et m'appuyant sur lui pour prendre de l'élan, je lui décochai un crochet rageur dans la joue. La puissance de mon coup de poing le flanqua au sol, et je pointai son arme vers lui.

Les rôles étaient maintenant inversés. Je pariai sans risque qu'il ne ferait pas autant le malin que d'habitude. Il était temps pour lui de contempler la mort, le cadeau ultime de Dieu, notre bourreau collectif.

Il était temps pour lui d'avoir peur.

Je le surpris en train de remuer sur le dos, comprenant qu'il avait perdu le contrôle.

– Eh, attends! On peut discuter avant, non ?

Non, il n'en menait pas large.

– Discuter de quoi ? On n'a pas grand chose à se dire, l'ami, précisai-je d'un ton sec.

Maintenant il commençait à comprendre ce que l'on ressentait lorsqu'on se retrouvait à la merci des éléments ou de quelqu'un qui voulait notre peau. Je lui offrais un avant goût de l'enfer véritable dans lequel les plus innocents étaient à jamais embourbés.

Cet avant goût ne devait pas lui être agréable.

– Euh écoute… tu sais, je suis vraiment désolé de t'avoir mené la vie dure mais je faisais qu'obéir aux ordres ! T'imagines pas à quel point c'est dangereux de ne pas satisfaire les exigences du Duc, je faisais tout pour rester en vie !

Peut-être y avait-il une part de vérité dans les conneries qu'il me baratinait. Mais cela ne constituait pas pourtant une excuse. Jamais.

– Ouais, je pige très bien que tu ne prenais aucun plaisir à exécuter les ordres. Parle-moi plutôt du Grand Projet.

– Quoi ? Croassa-t-il. Quel Grand Projet ?

Sa réponse avait été spontanée et confuse et cela n'était pas spécialement dû à la crainte que je lui inspirais. Non, il ne se payait pas mon portrait.

J'étais certain qu'il ignorait de quoi il s'agissait. Ah, c'était franchement dommage pour lui. S'il avait été mis au parfum et s'était montré coopératif, je l'aurais peut-être laissé vivre. Ouais, vraiment dommage.

– Non rien, laisse tomber, fis-je en élevant le bras pour viser sa face de charognard.

– Non, attends !

Je demeurai insensible.

– T'inquiètes pas, le rouquin. Là où je vais t'expédier, tu retrouveras deux potes. Greg et Delas, tu te souviens bien ?

Je l'entendis chialer comme une princesse.

– Mais tu peux pas faire à ça, t'es flic comme moi ! Tu vas pas descendre un autre collègue, hein ?

Cela avait assez duré, ses autres copains Protecteurs ne tarderaient pas à me tomber dessus. Et je n'avais pas l'intention de l'épargner.

Je me souviens de Buck que j'avais estropié dans les Brumes de l'Extase, je me souviens de ce soldat tombé dans une de nos embuscades. Ils m'avaient imploré comme l'autre cafard le faisait.

Je n'oubliais pas le regard de Mila.

J'avais tué pour elle et je continuerais de tuer pour elle.

– Je suis un Éclairé, maintenant, avouai-je posément.

Le tonnerre déchira les cieux et étouffa le bruit de la détonation. J'avais visé la figure et Stan ne risquait pas de s'en remettre.

Ce cafard avait eu une mort de cafard. Adieu, le rouquin...

Un cri passa au-dessus de moi, à travers les pleurs incessants de Rain City.

– J'ai entendu le coup de feu par là ! Aboyait Elvis quelque part à deux ruelles de moi.

Je n'avais plus de temps à perdre. Je saisis la plaque d'égout et la maintenais penchée pour glisser dans mes jambes dans la gueule béante qui semblait m'aspirer. Je la remis en place et descendis l'échelle.

Il n'y avait plus rien à faire pour le moment.

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