8 - Une pilule difficile à avaler - 3/3

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Je rentrai à la maison avec une mission : récupérer l’ordonnance, et tout le contenu du tiroir de Grand-Papa. Je devrais aussi aller à Brivorest, mais ce serait pour lundi. Entrer à l’hôpital le week-end semblait improbable.

Je filai tout droit à la chambre de mon grand-père, mais la trouvai fermée à clef. Je me rendis alors à la cuisine où ma mère m’attendait.

— Salut maman, tu sais pourquoi la porte de Grand-Papa est fermée.

— Quand j’ai expliqué à ton père où était ton grand-père, il a fait la tête. Eh puis, il a décidé de récupérer la chambre pour lui. T’imagines : dormir à la place de son père, c’est le remplacer, un symbole de puissance ! La bonne nouvelle, c’est que je peux récupérer ma chambre, j’arrête de t’encombrer !

La présence de ma mère dans ma chambre, bien que discrète, m’importunait tout de même un peu. J’avais l’habitude de mon confort.

— On a pris des décisions avec ton père. Je ne veux plus le voir et c’est réciproque. Il va vivre entre le salon et la chambre de ton grand-père, nous disposons des autres pièces. La seule chose, c’est que l’on va devoir lui apporter ses repas, là bas. Je te propose que l’on fasse ça à tour de rôles.

Cela ne me facilitait pas la tâche pour accéder au tiroir de Grand-Papa en toute discrétion. Comment allais-je donc en récupérer le contenu ?

Le lendemain matin, samedi, je filai tout droit chez Eorelle. Normalement je n’avais pas cours avec elle, mais elle avait bien spécifié que je pourrais venir la vovisiterir tant que je le souhaitais.

Lorsque j’arrivai chez elle, il n’y avait personne, puis je réalisai qu’elle enseignait à certains religieux du temple de la Mère Universelle ce jour-là.

Il me fallait faire encore plus d’une heure de marche dans le sens inverse pour m’y rendre. La barbe ! Tant pis, je n’y couperais pas. Je me mis en chemin, en petites foulées pour aller plus vite.

Arrivée sur place, épuisée par la course, je la trouvai en plein cours. Je m’approchai après avoir soufflé un peu. Dans le groupe ,je distinguai Éléonore qui me salua d’un petit signe de la main auquel je répondis timidement.

Eorelle me fit un accueil chaleureux, ce dont je commençais à avoir l’habitude, et me présenta à sa classe comme « Margaux » son « amie très chère », ce qui ne manqua pas de soulever quelques exclamations ou interrogations chez les participants. Éléonore me lança un regard qui en disait long sur ce qu’elle avait compris.

La jolie professeure me demanda si je voulais bien lui donner un coup de main, ce que j’acceptai avec plaisir et elle me désigna comme son assistante. Le cours était bien plus avancé que le mien, car ses participants pratiquaient depuis plus longtemps que moi, mais j’en compris une grande partie et me montrai à la hauteur de ma tâche.

Comme l’avait dit Éléonore, Eorelle restait très professionnelle. Je pus m’en rendre compte par moi-même. Elle n’hésitait pas à lancer quelques boutades de temps en temps mais ne se permettait aucune familiarité avec ses élèves.

Puis ce fut le retour, encore une heure de marche, je commençais à en avoir plein les bottes. Nous arrivâmes enfin à sa maison où elle avait déjà préparé le repas.

— Je n’invite pas mes élèves ici où je ne reçois que des amis.

— Il est tout de même assez aisé de trouver ton logis par hasard, non ?

Un air de mystère se peint sur son visage.

— Cette maison est protégée. Viens, je vais te montrer.

Elle m’entraîna vers l’entrée.

Au-dessus de la porte, elle ôta une petite plaque de bois que bien dissimulée, révélant une pierre précieuse d’un bleu saphir, semi-transparente et de grande taille. Quand je l’eus contemplée, elle remit le cache.

— C’est un des plus beaux cadeaux d’Alamarielle. Une pierre qu’elle a elle-même enchantée pour que personne ne puisse trouver la maison sans y être invité. Toi-même tu ne la trouverais pas si je ne souhaitais pas te laisser approcher ou si tu étais accompagnée par un indésirable. Et à l’inverse, si tu étais perdue et que tu me cherchais, elle te guiderait jusqu’ici.

— Alamarielle ? C’est le nom de celle que tu aimais ?

— Oui. Elle était mage.

— Mais en tant que sorcière, ne peux-tu pas faire ce genre de choses ?

— Pas du tout, j’utilise seulement la nature. Il n’y a rien de magique là-dedans.

Enfin attablées toutes les deux, je me décidai à lui demander ce que j’étais venue chercher.

— Excuse-moi, mais aujourd’hui ma venue n’est pas totalement désintéressée. J’aurais aimé savoir ce que tu pourrais me donner pour que mon père dorme très bien cette nuit.

— Dorme bien… Tu t’intéresses à son bien-être maintenant ?

À l’étincelle de malice qui brillait dans ses yeux, je sus qu’elle avait compris qu’il ne s’agissait pas de qualité de sommeil, mais bien de profondeur.

— Oh ! Si en plus, il pouvait faire des cauchemars, ça ne me déplairait pas ! Non, le problème, c’est qu’il a pris la chambre de Grand-Papa. Pour récupérer le contenu du tiroir ça ne va pas être facile. J’ai pensé agir pendant son sommeil. Il faudrait également qu’il ne sente pas le goût dans la nourriture… Tu vois ce que je veux dire ?

— Bien sûr ! Je vais te trouver ce qu’il te faut, mais quand nous aurons mangé. Chaque chose en son temps !

Nous prîmes tout notre temps à table, profitant de notre compagnie mutuelle. Le repas fut suivi d’une tisane délicieuse, mais très différente de la précédente. Tout ceci compensa fort bien les trois heures de marche que j’avais effectuées dans la matinée.

Ensuite, elle chercha dans ses étagères ce qui pourrait me convenir. Elle revint avec plusieurs petits pots et s’attela à faire un mélange parfait, tout en me donnant des explications. Secrets de sorcières !

— Voilà de quoi préparer un plat digne de ce nom. Cette mixture mélangée à une petite sauce tomate et des pâtes sera parfaite, il dormira d’un sommeil bien lourd.

Nous nous séparâmes avec nos bises rituellement appliquées sur chaque joue dans la douceur d’un amour qui ne voulait toujours pas dire son nom. Et je pris le chemin de la maison pour déposer la décoction dans ma chambre.

En fin d’après-midi, je me rendis au monastère. Grand-Papa était dehors, sur sa chaise, en compagnie d’Éléonore. À ma grande surprise, Eorelle les accompagnait.

Il allait bien mieux que la veille ! Éléonore nous confia qu’il avait mangé avec davantage d’appétit, ce qui nous ravit.

Nous évoquâmes notre enquête, et je demandai s’il serait judicieux d’impliquer Steph. Il pourrait faire analyser un des cachets par un laboratoire. Il y avait encore quatre boîtes, une par mois. Si nous voulions passer par la justice il y aurait moyen de s’en servir comme preuve. Une autre idée émergea, refaire un test de dépistage du cancer, pour prouver que Grand-Papa avait été mal diagnostiqué.

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