La conne seule avec son con

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- Tu tires ?

J’aimerais bien me tirer de là, oui. Je pensais oublier le Steven avec ses binouzes premier prix et ses pets foireux et me voilà avec un Romain qui passe son temps à fumer de la beuh en compagnie de trois hippies qui lui servent d’amis. On se croirait dans les années 70 à San Francisco. Manque plus que la balade de McKenzie et le cliché nous jouerait sa plus belle mélodie. Mon ex ne supporterait pas. Ma foi, qu’est-ce que j’en ai à foutre ? Je ne le supportais pas non plus de toute façon.

Le trio de Janeiro est somptueux. Vraiment. Michou est un … Michou. J’ai vraiment besoin d’en dire davantage ? C’est un surnom bien entendu, je ne suis pas conne. Mais à moins que je le sois vraiment, un surnom est censé être classe ou du moins nous donner un certain charme. Et l’autre baiseur d’arbres s’est nommé Michou. Vous osez me demander ? Ouais, il est gay. Il me l’a précisé en levant les yeux au ciel, comme si je n’étais pas apte à comprendre l’homosexualité de quelqu’un. Dis-donc le fumeur de pelouse, si tu savais le nombre de doigts que j’ai foutu dans le cul de tes congénères hétéros, tu la ramènerais moins. C’n’est pas un snobinard bourré de fric qui va me faire une leçon de bien-pensance. Puis merde, prend du poids quoi. T’es aussi fin que l’herbe fraîche qui te parfume le gosier.

L’autre ganja s’appelle Toro, parce qu’il est fort. Monsieur passe sa journée dans les salles à se défoncer les biceps, qui, jusqu’ici, ne lui ont servi qu’à se tenir la queue pendant qu’il pissait. Le reste du temps, et ce depuis les dix jours où j’ai emménagé chez Romain, il rigole bêtement et montre parfois les muscles en nous parlant de produits dopants. L’éclate. Un soir, alors que j’allais couler un bronze, j’ai marché sur lui sans faire exprès. Comme il n’y a qu’un matelas dans tout l’appartement, le culturiste du dimanche roupille, à l’image de ses deux petits amis, sur le sol de la cuisine qui est, je cite : « le plus confortable de toutes les pièces ». Je l’avais réveillé et pour me rassurer, il me sort alors que ce n’est pas une minette comme moi qui risque de lui faire du mal et que pour me le prouver, je pouvais m’allonger sur lui afin de me « rendre compte » de sa force. Je lui ai écrasé les couilles par « maladresse » avant de chier. Il bandait comme un taureau. Le con.

Le dernier est un petit glandeur que tout le monde surnomme Loulou. C’est sûrement le moins pire de tous, mais comme on dit, tout est relatif. J’sais pas pourquoi est-ce qu’il s’amuse à tirer des lattes, mais on sent bien qu’il fait plus ça pour se donner un genre que pour assouvir une soif de tabac à la garniture salade. Il ne parle quasiment pas. Faut dire que le bougre est aussi bègue qu’un Patrick Bruel sous vitamines et a le même charisme qu’un taureau qui vient de se faire écraser les burnes. Son visage est à la même hauteur que l’entre-jambe de Romain et son corps, bien que plus en chair que notre Michou national, est aussi lâche que faible. C’est à se demander comment il peut tenir debout. Ses épaules ont déjà abdiqué d’ailleurs. Je n’ai jamais vu un mec aussi voûté, à quoi … 24, 25 ans ? Apparemment, il est heureux en amour. Sa gonzesse ne doit sûrement pas voir les choses de la même façon. J’espère qu’elle a un homme de rechange, mais sans les potes qui vont avec …

Romain insiste pour la énième fois.

- Tires. Crois-moi c’est de la folie ce truc.

La beuh ? De la folie ? Laisse-moi t’expliquer ce qui est réellement fou, mon cher ; les gens qui n’ont toujours pas compris que ça ne sert à rien de demander à une personne de faire quelque chose vingt milliards de fois tout en lui proposant de la même façon, les types qui n’ont aucun sujet de conversation, les femmes qui ne mettent pas de serviette hygiénique lors de leur menstruation, les fans de catchs, les fans de foot, les fans des deux à la fois, les antiracistes qui sont tout aussi racistes que ceux qui le sont vraiment, les mecs qui pensent que la terre est plate, les petits connards qui font un boucan avec leur scooter trafiqué à des heures impensables, les victimes de quelque chose qui passent leur temps à se plaindre de ce quelque chose en question au lieu de passer outre, celles qui veulent que les femmes puissent avoir la liberté de se promener seins nus à la plage mais qui traitent de salopes celles qui couchent à gauche à droite, les artistes et leurs leçons de moral très souvent tirées par les cheveux, ceux qui veulent absolument qu’on les suce mais qui ne lèche jamais leur conjointe parce que c’est « dégueulasse », les sites de cul et leur filtre d’âge risible, les connards qui jettent leur McDo n’importe où, les enfants quand ils bouffent du sucre, les vieux qui te rétorquent que si tu ne veux justement pas d’enfants c’est parce que tu es égoïste, les débiles profonds qui abandonnent leurs animaux sur les bords des routes, les électeurs qui se plaignent tout le temps mais qui votent toujours pour les mêmes têtes de bite, les gens qui font des débats mais sans en connaître la réelle définition, ceux qui bouffent uniquement des aliments qui font grossir mais qui ne prennent jamais un gramme, les gens qui ne vont au cinéma que pour voir les Avengers, les politiciens qui pensent combattre les discriminations en imposant des quotas dans les entreprises, les mecs qui imaginent que c’est en étant musclé qu’on devient un homme, les femmes qui redeviennent plates après leur premier enfant, la Saint-Valentin, la fête des mères, des pères, des grands-mères, des grands-pères, les merdeux qui cherchent les problèmes mais qui n’aiment pas en avoir, les vieux qui matent les jeunes filles qui ont à peine dix-huit ans, les vieux qui matent les gamines de leur propre famille alors qu’ils les ont vu naître, les types qui klaxonnent dès qu’ils croisent une gonzesse en slim, le tribunal de Twitter, la course aux « J’aime » sur Facebook, ceux qui aiment raconter leur vie de merde mais en croyant qu’elle est incroyable sur les réseaux sociaux, les influenceuses sur Instagram qui sont toutes plus cruches les unes que les autres, les collégiens qui mesurent leur bite, les collégiennes qui mesurent leur poitrine, les collégiens, les gens qui trompent leur conjoint mais qui ne veulent pas qu’on les trompe en retour, ceux qui travaillent une fois tous les six mois pour toucher le chômage, ceux qui font la morale mais qui ont une vie de prince, les jeunes qui ont la vingtaine mais qui continuent à prendre des goûters à 16h, les gens qui parlent toujours tout seul et qui rigolent quand ils chopent leur ami faire de même, ceux qui crachent en parlant, les gosses qui font tout pour énerver les clebs mais qui …

Puis merde, file moi ça !

Je lui chope sa feuille et en aspire une bonne bouffée. Il n’est pas né de la dernière pluie celui qui pense que les minettes dans mon genre n’ont pas de corones.

Les quatre autres rient niaisement tandis que j’avale la fumée.

Ouaip. Bah j’sens pas grand-chose. Si, je sens seulement leur regard de défoncé me dévisager comme si j’étais une œuvre d’art. Mais pas n’importe laquelle. J’ai l’impression d’être l’un de ces tableaux qui a été peint par le trou du cul d’un artiste. Le genre d’art qui n’a absolument aucun sens mais qui te scotche bien deux minutes au moins. J’ai la sensation qu’ils cherchent le petit détail en moi. Celui qui m’érigerait au rang de tableau historique. Sauf qu’ils n’ont pas l’air de le trouver.

Je leur refile la pelouse et je m’assois au milieu de la cuisine avec eux. Je devais rédiger un faux acte pour une professeure de merde qui adore nous foutre des oraux à tout bout de champs, mais roh ça va hein. J’suis première de ma classe, je peux bien me permettre de faire un break en subissant les yeux de mon plan cul et de ses trois acolytes.

- Vous voulez quoi à la fin ? Me lécher le visage ?

Leur rire au ralenti s’échappe de nouveau entre deux nuages de fumée.

- T’en as vachement pris, me lâche le Toro.

Loulou tend son majeur et le fait glisser le long du mur situé à côté de lui. Bien sûr.

- Alors, t’es foncedé ? me demande le grand gaillard qui comble mes besoins sexuels démesurés.

Michou étire sa carcasse d’os et lance une mélodie sur l’enceinte. Il regarde l’objet avec désir. C’est surprenant.

Qu’est-ce qu’il lui arrive au gay snob ? Il n’est plus si indésirable qu’auparavant. Je ne saurais vous dire pourquoi, mais quand il a effectué ce mouvement aussi lambda soit-il, j’ai eu envie de lui mettre un doigt dans le cul. Mais pas pour rigoler, comme je faisais avec mon cousin quand on était gosse, non. J’ai vraiment le désir de lui rentrer l’index dans le p’tit trou. Puis ce regard, là. D’accord, c’est une enceinte mais il est vachement fort. Le duo est parfait, magique. On se croirait dans La La Land. Lui, c’est Emma Stone stone et la boîte à musique semble aussi désirable et bonne musicienne que Ryan Gosling.

A moins que …

Le doigt de Loulou … Je ne sais pas trop ce qu’il traficote mais j’ai un tout autre fantasme à présent. J’imagine ; son majeur dans le cul de son ami. Le mur aime sûrement se faire caresser, mais une phalange dans le trou, c’est quand même tout autre chose. Puis un gay assume encore plus le fait d’aimer ça qu’un hétéro coincé au possible. Et alors si c’est un pote défoncé qui s’y colle … Ah, si. Ce serait bien. Michou lâcherait des petits bruits coquins tandis que l’autre lui ramonerait le tunnel de la prostate … Vous croyez qu’un bègue tremble autant du doigt qu’il tremble des cordes vocales ? Non, je demande juste. Mais avouez que ça serait un atout non-négligeable.

« T’en as vachement pris ». Il ne parlait pas à moi. Non, il veut enculer le type « en couple » une fois de plus. Sa phrase prend tout son sens, ce n’est pas la première fois qu’il s’occupe de son cas. Rien à voir avec la beuh. Il l’avertit qu’une pénétration anale approche à grand pas. Oh, ce que j’aimerai qu’il s’allonge sur Loulou pour qu’il se rende compte de sa force. J’espère quand même qu’il a encore une paire digne de ce nom entre les jambes. Je m’en voudrai à mort. Non, le message était clair. Tu vas prendre et pas qu’un peu mon coco. Je crois rêver. Je vais avoir le droit à un porno gay ! En live. Mais attention, pas question de ne pas en profiter.

Romain enlève soudainement son haut. Putain, lui aussi il s’y met. Quatre queues. A moi la révolution sexuelle. J’suis détendue. Et quand j’suis détendue j’veux me taper quelqu’un. Et comme je suis vachement détendue, j’ai vraiment envie de baiser. Et comme j’ai vraiment envie de baiser, tous ces hommes tombent à pic.

Je suis le délire. En quelques gestes, me voilà seins nus. Les tétons pointent en direction des quatre mâles. Tout mon corps n’a qu’une ambition, s’évader. Ma tête, elle, veut s’aérer. Mon cœur, se libérer.

Je m’approche de Romain qui se dirige déjà vers Toro. Toro est à deux centimètres de Loulou. Loulou effleure la peau de Michou. Michou tripote l’enceinte.

Mon plan cul me repousse alors violemment et donne une grosse claque sur le torse musclé du taureau émasculé. Ils rigolent tous bêtement.

Ok. Je ne m’attendais pas à ce genre d’expérience mais je ne rechigne jamais à quelques petites claques bien placées.

Michou frappe Loulou avec nonchalance à l’aide de l’enceinte. Le mec aux épaules plus voûtés que l’architecture d’une église tombe au sol en se tordant de douleur. Les autres se marrent puis continuent à s’échanger des coups.

Sans que je puisse essayer de comprendre ce qu’il se passe, ils continuent leur petit jeu jusque dans le salon. Toro se sert de la porte de la pièce pour écraser la tête de Romain contre la cloison. Puis il la ferme et je les entends se battre, tout en continuant leur rire bien spécifique.

Ah bah merde.

J’entends un des quatre rigolos lancer un « Chokeslam ! ».

Putain, j’y crois pas. Ils catchent.

Je reste là, comme une conne, pendant quinze bonnes minutes. La poitrine à l’air. La chatte qui mouille encore. Je ne pense plus à rien. L’envie de baiser vient de s’écrouler soudainement et je me sens vide. Comme un homme à qui on aurait refusé une pipe. Pour autant, je suis encore bien stone.

Au moment où je tourne les talons, Romain ouvre et essoufflé me demande si je peux lui passer quelques capotes. On en a plus que trois. Je lui en passe deux. J’aimerai bien baiser une dernière fois avant de me casser. Mais il fait la moue. Il m’en demande une troisième. Je regarde dans l’entrebâillement de la porte. J’aperçois des corps nus entrelacés. Enculés. Je la lui jette.

- Tu n’sais pas ce que tu loupes mon con.

J’suis conne. C’est bien mon con qu’il loupe ce soir.

Il s’enferme et retourne à ses occupations lubriques.

J’suis pas si cruche après tout. Ils voulaient bien se culbuter. Mais pas avec la demoiselle aux nichons pointus. Boarf.

J’m’en vais m’faire une p’tite caresse. Des fois, ça soulage juste la colère. Puis au moins je chope le matelas, j’passerai une bonne nuit.

Putain de clebs non-binaire. J’ai complètement zappé de te promener.

Il n’a pas loupé la coche. Il a chié pile là où je dors. Belle. Puante. Suintante.

Une sacrée merde.

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