XIII
Vive les mariés !
Suite à la cérémonie macabre, la Reine Cordelia fut traînée hors du château. Sa blessure refermée, qui avait eu pour seul objectif de la distraire le temps de l’hécatombe, elle avait retrouvé de sa vivacité. On avait dû l’assommer pour rendre le trajet plus confortable pour les gardes, transporter une Reine hurlante et violente n’était pas de tout repos.
Le plan de Glenn s’exécutait à merveille, sous la tutelle des Anciens qui supervisaient son bon déroulement. La famille adverse avait été évincée, leur chef mariée au Roi et le Roi seul sur le trône. Le pouvoir tout entier était leur. Maintenant, il fallait que leur bon Roi ne fût pas trop mauvaise tête et qu’il se soumette à l’autorité des Anciens. Il était leur marionnette, le meilleur pion pour abattre l’adversaire.
Cordelia fut jetée dans la tour la plus sinistre, pour y être oubliée. Déclarée morte par suicide à la Cour, rayée de la carte à jamais, la défunte Reine vivait désormais solitaire, dans la tour qui serait sa tombe.
Mais Glenn, passionné par son épouse, se rendit à la tour, par une nuit de belle lune. Cela faisait des semaines que Cordelia était enfermée là-bas, que devenait-elle ? Le Roi frémissait à l’idée de la revoir, brûlant d’un désir qu’il ne pouvait satisfaire avec aucune autre. Il voulait sa Reine.
Il atteignit la haute tour qui se dressait devant lui. La pierre demeurait froide, inébranlable, elle gardait sa femme prisonnière. Glenn pénétra par la porte de derrière, seule entrée possible pour retrouver la belle. Il grimpa le long escalier circulaire qui menait à la pièce maîtresse, tout en haut. Il y était presque.
Enfin, devant ses yeux sombres, la porte close. Il posa son front contre le bois glacé pour marquer une pause, solennel. Il respirait doucement, goûtant de tous ses sens à l’instant ultime des retrouvailles. La seconde d’après, elle serait devant lui.
Il introduisit la clef dans l’imposante serrure rouillée, la tourna deux fois. La main sur la poignée, il poussa la porte.
Bloquée.
« Comment ? » Il ne comprenait pas. Forçant comme un beau diable, il s’acharna sur la poignée en jurant.
« Ouvre-toi, bon sang ! »
Il tenta de défoncer cette dernière en fonçant de tout son poids contre elle. Rien.
« Cordelia ? Cordelia ouvre-moi ! cria-t-il tout en continuant son manège, je viens te sortir d’ici ! Aie confiance, Cordelia ! »
Soudain, coupant court à sa frénésie de porte, il entendit du verre se briser. Puis un choc plus lointain.
Son sang ne fit qu’un tour.
« Cordelia ! » Son hurlement se perdit dans le fracas de la porte qu’il venait de détruire.
Sa Reine ne se trouvait plus dans sa prison. La seule fenêtre, brisée, laissait entrer la douce lumière nocturne, une légère brise animait les rideaux qui l’entourait.
Glenn se précipita dans la pièce, rendu fou par la peur.
« Cordelia ! »
Elle s’était jetée par la fenêtre.
Mais ce ne fut pas son corps inerte sur le sol qu’il vit. C’était sa femme, debout le défiant du regard et lui souriant. Ses longs cheveux de feu, sa petite robe de chambre blanche qui dansaient au vent.
Il ferma les yeux.
Elle avait disparu.
Annotations
Versions