Vendredi 8 juillet.

Munis de son nouvel appareil photo, Roland était parti à pied de Davayé pour gravir le Mont Pouilly. À la lueur du soleil levant, heureux, il traversait les vignobles. Parfois, il s’arrêtait pour souffler, et admirer le paysage vallonné qui s’étendait à ses pieds. Quand, la pente devint plus raide, malgré un genou douloureux, il poursuivit son effort. À soixante-dix ans, ce n’était pas un peu d’arthrose qui l’empêcherait d’atteindre son objectif. Durant une bonne demi-heure, le vieil homme crapahuta dans les sentiers rocailleux, et quand les arbustes laissèrent place à un tapis d’herbes sèches, il éclata de joie.

Roland était fier d’être arrivé au sommet, et il eut une pensée pour Agathe l’amour de sa vie, partie au ciel depuis un an jour pour jour. C’était elle qui lui avait transmis cette passion de la randonnée, et c’est ensemble qu’ils avaient découverts ce circuit. Lorsque des larmes coulèrent le long de ses joues, Roland les essuya délicatement avec sa manche, puis il dégaina son appareil photo pour mitrailler la Roche de Solutré.

En zoomant dessus, le vieillard repéra une silhouette qui s’approchait dangereusement de la falaise. En agrandissant encore l’image, il distingua un homme nu, en équilibre précaire au-dessus du vide.

« Ne saute pas ! » songea Roland.

L’inconnu vacilla, et à 492 mètres d’altitude, il dirigea son pénis de gauche à droite, pour arroser avec sa pisse, un site emblématique de Saône-et-Loire.

Excédé par ce comportement outrancier, Roland cria :

— Connard ! Tu mériterais de crever en te fracassant la gueule sur les rochers !

Agacé, il rangea son appareil photo, puis en brusquant ses guibolles, il s’en alla.