Saint-Louis, vendredi 4 septembre 2020
Geneviève s’accorda une petite prolongation au lit. Bernard était déjà parti lorsqu’elle se leva. Les deux derniers jours avaient été extrêmement fatigants et la journée qui s’annonçait promettait d’être longue.
Lorsqu’elle arriva au commissariat, l’équipe était déjà au complet. Sébastien l’accueillit.
— Bonjour madame la commandante, on vous attendait pour la perquise chez Léa Baysang. C’est rue de Lectoure. C’est tout à côté.
— Oui, je sais, bon, allez, un café et on y va.
Il lui tendit une tasse avec un grand sourire.
— Et voilà, j’ai anticipé.
Elle la prit avec un soupir.
— Au fait, vous n’avez trouvé aucun membre de sa famille.
— Non, le père est parti à l’étranger et a disparu. La mère est décédée voilà deux ans comme on a dit et à part ça, rien.
— À ce point, c’est rare quand même.
Elle reposa sa tasse.
— Bon, allez-y, je passe à mon bureau et on y va.
Elle déposa son sac, prit son brassard, ouvrit un tiroir et y pécha un carré un chocolat.
— Oh et puis tiens ! un autre.
Elle rejoignit Thomas qui s’engageait dans l’escalier en même temps.
— Tu vois Thomas, encore une enquête. Je te vois bien APJ dans un premier temps. Je sens bien que ça te plait.
— Oui, madame la commandante. En deux ans, j’ai déjà vu beaucoup plus que certains. Bon APJ, c’est vrai que j’y ai pensé, mais c’est encore tôt.
Les trois véhicules étaient prêts. Le trajet fut bref. Ils pénétrèrent dans la cour arrière d’un curieux immeuble bas, tout en longueur, avec un étage. Un homme assez âgé sortait les poubelles. Sébastien se dirigea vers lui et lui montra sa carte.
— Bonjour monsieur, vous habitez ici je suppose. Il faut que vous nous serviez de témoin. On doit perquisitionner un logement.
Une forte contrariété s’afficha sur le visage de l’intéressé. Voilà une journée qui commençait mal.
— Vous connaissez l’appartement de Léa Baysang ?
Il hésita.
— Je ne la connais pas, vous savez ici…
— Étage, gauche, au fond, les interrompit Éric.
— Bien, monsieur vous venez avec nous.
Il les suivit malgré lui ; il comprit que de toute façon il ne semblait pas avoir le choix.
La porte présentait trois fixations. Éric inspecta les serrures et se mit au travail. En deux minute, la porte était ouverte. Geneviève interpella Laura.
— Avec Thomas, vous allez interroger les voisins et vous devriez trouver notre deuxième témoin parce que là on n’est pas dans les clous.
Justement, la porte en face s’ouvrit et une femme visiblement inquiète, en sortit. Laura lui expliqua la situation.
Geneviève rejoignit le reste de l’équipe. L’appartement se résumait à une pièce centrale, salon, coin cuisine et une chambre. Les murs étaient blancs, nus, avec pour seuls ornements, des magnets sur le frigo et, au-dessus du canapé, un grand poster représentant un paysage nordique du genre de ceux que l’on trouve dans tous les magasins de décoration. Elle jeta un regard circulaire sur le meuble de cuisine. Tout était rangé et propre.
— Normal, puisqu’elle partait.
Elle regarda deux ou trois photos posées bien en évidence sur l’étagère du salon. Elle en prit une où l’on voyait Léa enlaçant un homme qui semblait un peu plus âgé qu’elle. Elle la contempla un instant.
— Elle avait bon goût, un beau mec.
Puis, elle se souvint que Sébastien lui avait parlé d’une relation toxique qu’elle voulait fuir. Elle se concentra sur le visage de l’homme. Il était souriant et rien ne laissait supposer une telle chose.
— Comme quoi, ne pas se fier aux apparences.
Elle entra dans la chambre et ouvrit le placard. Ici, par contre, le désordre régnait, il y avait même des vêtements sur le lit.
— Hum, là, par contre, on sent plutôt un départ précipité, effectivement.
L’équipe s’activait à trier les affaires. Jean Wolf sortit une petite valise en osier. Il la posa sur le lit et l’ouvrit. Elle contenait des carnets de croquis. Geneviève s’approcha et en feuilleta quelques-uns. Elle reconnut bien la « patte » qu’elle avait constaté au moulin. L’un des carnets la frappa. La plupart des dessins représentaient des visages torturés. Quelques paysages griffonnés à la hâte étaient empreints d’une noirceur morbide.
— On dirait que le moral n’était pas toujours au beau fixe !
Elle referma le carnet et en ouvrit un autre. Il concernait son ami du moment. Elle le reconnu sans difficulté après les avoir aperçus sur les photos du salon. La majorité de dessins le représentaient nu. Elle reposa le tout en se faisant la remarque qu’il n’y avait aucun autoportrait. Jean descendit un carton de l’étagère du haut. Il contenait différentes babioles et des photos.
— Une boite de souvenirs, fit-elle remarquer.
— On dirait, oui, confirma Jean en emportant l’objet.
Le coin toilette n’apporta pas d’informations complémentaires. Elle rejoignit Sébastien.
— Alors ?
Il haussa les épaules.
— La récolte est maigre.
Elle jeta un regard circulaire.
— Oui, il fallait s’en douter. Bon et bien on va rentrer.
De retour, dans la pièce des scellés, ils trouvèrent quelques cartons, remplis des affaires récupérées à Durlinsbach par l’équipe scientifique. Là encore, peu de chose au final et, à priori, pas beaucoup d’indices. Le téléphone avait été expédié au labo. Geneviève poussa un soupir en contemplant le tout.
— Reste à espérer que la scientifique aura quelque chose, au moins une empreinte, je ne sais pas moi. Si non, on va finir par croire à l’histoire de Bruno, finit-elle avec un petit rire.
Elle se tourna vers lui pour constater qu’il ne riait pas. Il leva les yeux dans un geste de dépit.
Elle regarda sa montre et leva la main.
— L’après-midi est chargée, je propose que l’on aille manger vite fait. On fera le débriefing avant de commencer les auditions.
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